7 - La deuxième Épreuve

543 69 4
                                    

Selene

°°°


Je demeure allongée sur le lit qu'on m'a gentiment offert dans une chambre aux milles et unes plantes, aux murs ternes et aux fenêtres trop fines pour laisser entrevoir suffisamment de lumière. Je fixe le plafond et je sais qu'Adriel adopte la même posture, je sens sa présence mais le matelas du lit ne s'affaisse pas sous son poids. 

— Selon toi, que vont-ils nous demander de faire cette fois ? soufflé-je. 

Adriel met du temps à répondre. 

J'espère rien de trop difficile à reproduire, soupire-t-il. Je ne suis pas un Mage Noir et utiliser une telle magie me demande trop de puissance. Je crains que ton corps ne le supporte pas à la longue. 

— Pourtant nous devrons faire semblant encore un bout de temps. Et c'est toi qui a eu l'idée.

— Je sais... 

Je croise mes mains sur mon ventre, le plafond est voûté, la pierre apparente entretenue, si bien qu'elle semble briller comme presque tout cet endroit. Vue de l'extérieur, cette tour ressemble à un donjon mais une fois à l'intérieur, malgré le froid environnant, les revêtements sont incroyables. 

— Avais-tu connu la mère d'Emilius ? 

Non et tu connais son histoire. Elle l'a abandonné, il était encore trop jeune pour le comprendre. 

Adriel s'assoit sur le bord du lit. Je m'appuie sur mes coudes, je le regarde mais lui, semble ailleurs, préoccupé. 

Il en veut au monde entier mais pas à sa mère qui a été incapable de gérer la situation. Si elle n'avait pas baissé les bras si lâchement, Emilius aurait vécu une vie paisible. Les ténèbres sont, certes, puissants, mais entre les mains d'une personne sans troubles, ils sont inoffensifs et identiques à de la magie noire. C'est simplement qu'ils ont empoisonné l'esprit d'Emilius, quand il s'est senti abandonné par le monde entier. 

Il pousse un profond soupir. 

Mais tout cela n'a plus d'importance. Nous sommes morts et les morts ne reviennent pas à la vie. 

— Si tu avais une seconde chance, est-ce que tu la saisirais ? Est-ce que tu lui pardonnerais ? 

Adriel se lève puis se poste devant la fenêtre, là où il observe l'extérieur et l'obscurité environnante, sans aucune étoile dans le ciel pour l'illuminer. Il pose sa main sur la vitre, c'est comme si une projection de minuscules étoiles prenait forme dans le ciel, fictives, rêveuses...

Une part de moi l'aimera pour toujours. Je ne peux nier que je ne me comportais pas comme un compagnon exemplaire à l'époque et j'adorais papillonner à droite puis à gauche. Emilius me le reprochait constamment et pourtant, mon cœur ne battait que pour lui mais... pour mon père, deux hommes qui s'aiment n'était pas envisageable pour l'avenir d'un Royaume. Contrairement à Emilius, j'étais incapable de désobéir à mon père et incapable d'abandonner mes responsabilités de roi. 

Il se tourne vers moi, alors les étoiles disparaissent aussitôt du ciel comme des braises qui s'éteignent. 

Tu sais, cette guerre entre les Mages et les Elfes n'a jamais réellement cessé d'exister et qu'on le veuille ou non, Emilius est né avec ce principe : les Mages ne sont pas dignes de confiance, quand bien même son père en était un. Nos convictions et nos façons de penser divergeaient et divergeront toujours. Parfois, certains peuples ne sont pas faits pour s'entendre, même lorsque l'amour s'en mêle. Surtout... quand l'amour s'en mêle. 

TENEBRIS LUMINA : L'Arbre de Vie [INTÉGRALE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant