48 - Mer froide

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Andromède


Soudain, la rechute. Dans une vie sombre, craintive, comme avant. Ma mère qui avait oublié son dernier sourire à cause des factures qui traînaient ; Icare qui ne pensait plus à faire apparaître le mien à cause du départ de son meilleur ami ; et Ophélia qui était redevenue une apparition spectrale ne croisant même plus mon monde.

Il suffisait de tellement peu pour me faire vivre, pour me faire sortir de l'engourdissement de mon être, et si peu pour m'y faire revenir. Dans des eaux noires aussi épaisses que des sables mouvants.

Tom était bizarrement celui qui me manquait le moins dans tout ça. Car même à des centaines de kilomètres, je le sentais plus vivre que tous les autres. Il était triste lui aussi, même si il ne me le disait pas. Mais il me parlait, il m'appelait, m'envoyait des photos de sa nouvelle maison. Il disait que je manquais à ses parents, et qu'ils lui demandaient souvent de mes nouvelles, ça me faisait rire. Il me demandait aussi des nouvelles d'Ophélia, qui ne lui parlait plus, et d'Icare, qui ne lui parlait plus non plus. Mais j'étais pas plus avancée que lui.

Je faisais des tours de ma chambre sans trouver le nord, lascivement. Ça s'était fait petit à petit, les premières semaines on se cherchait encore partout, on échangeait sur nos journées et on se faisait des sourires. Après le premier mois, nos journées ne valaient peut-être plus vraiment la peine d'être racontées, toutes si ressemblantes... Entre le travail et l'absence de Tom, la fin des rendez-vous cafés et les autres préoccupations. Se construire un bon dossier pour pouvoir avoir plus de chances dans nos prochaines années, chercher où allait nous mener la vie, et, parmi tout ça la fatigue de l'hiver et les jours gris.

C'était il y a combien de temps qu'on était heureux ? Ça semblait si éphémère, tout ce qu'on avait vécu, comme si on avait concentré toute la beauté de la vie en quelques instants.

Je nageais en pleine nostalgie, dans une mer beaucoup trop froide. Une si vaste étendue que je n'y croisais aucun marin, ni aucun ange déchu. Où donc était mon blondinet qui avait survécu à tant de marées ? Je ne l'avais pas croisé une seule fois quand, le cœur battant, je parcourais les étagères de la bibliothèque, ni observant l'intérieur du café en passant devant la vitrine.

Aucune lueur de soleil à l'horizon non plus, ma belle amie ne daignait pas faire réapparaître ses rayons dans ma nuit. Je l'avais, au contraire d'Icare, aperçue au lycée quelques fois, où son regard et son faible sourire ne m'apparaissaient que comme de ternes étoiles déjà trop lointaines. Mes questionnements étaient alors revenus. Et si ma mère avait raison quand elle avait pensé qu'Ophélia ne serait que de passage ? Et si au final elle était venue vers moi comme avec quiconque d'autre et qu'elle en était repartie sans aucun sentiment ? Sans regrets, sans nostalgie, sans rancune. Je l'avais pourtant vue vivre si fort, je l'avais pourtant vu me sourire à s'en tordre le visage de joie, je l'avais vue danser, je l'avais écoutée parler de tous ses sentiments qu'elle disait ne confier à personne. Avait-elle menti ? J'avais peur de ne plus la connaître, qu'elle ne se soit ouverte à moi que quelques semaines qui avaient duré quelques instants puis qu'elle s'était enfuie. J'avais peur de m'être trop livrée à elle et que mon intérieur que je lui avais offert s'enfouisse dans la nature...



SMS d'Andromède à Tom
Tu nous manques. Je sais plus quoi faire sans toi.

SMS de Tom à Andromède
Qu'est-ce qui ne va pas ?

SMS d'Andromède à Tom
J'ai perdu la foi...
Tu crois qu'Icare s'est noyé ?

SMS de Tom à Andromède
Pffff impossible.
Tu le connais, il fait sa drama queen. Il a le droit en même temps, son grand amour est parti.

SMS d'Andromède à Tom
Je croyais que c'était toi et moi le grand amour ????

CollisionsWhere stories live. Discover now