41 - Soirée Pyjama

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Andromède


Il était bientôt minuit quand ma mère est rentrée, un peu pompette. Elle n'avait donc pas fait trop attention à si Icare dormait bien dans la chambre d'amis, et après quelques mots à notre égard, était allée directement dormir.

Après avoir tant dansé, joué à de multiples jeux, chanté et ri, nous avions décidé que c'était l'heure de tous nous emmitoufler dans de grosses couvertures et de discuter plus calmement dans mon lit. Un amas de quatre personnes dans un lit une place n'a pas semblé les déranger.

- Chouette ! Une soirée pyjama ! J'ai jamais fait de soirée pyjama ! s'était exclamé Icare rempli d'excitation. Alors maintenant on parle de nos petits secrets et tout et tout, c'est ça ?

Ça nous avait fait tous rire, il était si mignon. Tous, mais quand même moins Tom qui semblait songeur. Je le regardais d'un air interrogatif, mais pour la première fois, je le surpris à me fuir. Je ne voulais pas le gêner devant les autres, qui ne semblaient pas avoir remarqué, mais je gardai quand même cette idée dans un coin de la tête.

Il reprit ses esprits quelques instants après, quand Icare se mit à raconter une de leurs aventures, et ponctua le récit de son ami d'éclats de rire et de précisions. Il se tourna vers moi en me lançant un sourire qu'il voulait à mon avis rassurant.

Nous avons continué comme ça bien longtemps, une éternité, coupés du monde, voguant dans l'infini, sans que l'heure ni l'extérieur n'existent. Je n'avais jamais cru pouvoir ressentir ça un jour en dehors de mon monde psychique. Mais ils étaient tous là, rieurs et heureux, si tangibles.

Et puis, il a fallut que quelque chose vienne briser tout ça.


_____

- Hey, murmura Tom alors que nous avions arrêté de parler et que nous étions proches du sommeil. J'ai quelque chose à vous avouer.

- Yes ! se réveilla soudain Icare. Enfin un secret !

Ma sérénité avait disparue, et j'offrais un sourire triste au blond. Je pensais à l'air songeur de Tom de tout à l'heure qui ne présageait rien de réjouissant. Ophélia se redressa avec peine de son affalement, et dirigea toute son attention aux sourcils froncés vers Tom. Je respirais avec peine, et espérais que je me trompais.

- C'est pas si joyeux que ça à vrai dire... Je voulais pas gâcher la soirée en vous le disant au début, et en plus je n'ai trouvé aucune occasion... Bon, je vais faire bref. Je vais déménager.

J'ai cru attendre un «quoi?!» éberlué d'une voix féminine à travers ma vision trouble. Je me mis à regarder le plafond pour ne pas voir le visage décomposé du meilleur ami de Tom, qui devint pour une fois terré dans un silence inconnu. Ophélia, n'y croyant pas, lui demanda plus de précisions.

- Ma mère a été mutée à Paris, c'est une immense opportunité pour elle, alors mon père et moi allons la suivre. Je ne le sais que depuis quelques jours. Ils ont d'abord cherché à faire du repérage, pour savoir où l'on pourrait habiter, où je poursuivrai mon année...

- Mais tu pars quand ? S'impatienta Ophélia.

- En janvier. Je ne retourne pas au lycée après les vacances, je serai à Paris dans un tout nouveau bahut, avec que des inconnus.

J'observais maintenant la situation. Ophélia était excédée, à deux doigts de partir en courant, je sentais son envie de hurler qui faisait trembler ses mains et déformait les traits de son visage habituellement si sûr de lui. Icare, à mon grand étonnement, ne disait rien, ne regardait rien ; on l'avait perdu. Il avait les yeux baissés sur la couverture qu'il caressait de ses mains. Le brun lui lançait des regards furtifs.

Mon mur d'espoir avait été démoli en quelques secondes. Je n'imaginais plus nous sans lui, ni moi sans lui. Un immense vertige me prit, mais je devais être là pour Tom avant tout. Ça devait être encore plus dur pour lui de nous le dire que nous de l'entendre.

- Tu seras sûrement dans un bon lycée à Paris, et tu es déjà excellent en classe. Je ne doute pas du fait que ça ne perturbera pas ton année, et que tu auras ton bac. Et puis, tu pourras postuler dans une très grande école en sortant, Paris ce n'est pas rien. Malgré tout je suis heureuse pour toi car je sais que cette ville ne t'apportera que des bénéfices et sera à la hauteur de ton ambition.

Personne n'avait décoché un mot, mais tous les regards, même le bleu, s'étaient rivés d'incompréhension vers moi. Mais, je vis un début de sourire naître sur le visage de Tom.

- Je suis sûr que tu trouveras très vite ta place, tu es si brillant et intéressant, et drôle, et gentil. Tout le monde tombera amoureux du petit nouveau là-bas. J'en suis presque jalouse.

Mais ce sera pas une raison pour nous oublier hein ! On pourra toujours faire des rendez-vous cafés, tu n'auras qu'à trouver un café jumeau à la capitale, et on s'appellera en visio. Tous les lundis et tous les jeudis. Tous ensemble.

Je souris à cette pensée et à ces mots qui venaient de déferler de ma bouche sans que je ne les contrôle. Depuis quand Andromède prenait-elle la parole alors que personne n'avait rien à dire ? Ce n'était de toute évidence pas moi qui parlais. Mais, ce n'est pas ce que me dirent les larmes d'Icare qui virent le jour en premier. Je posais ma main moite sur les siennes pour qu'elles arrêtent de donner du plaisir à ma couverture, puis la blonde-vénitienne entoura ce petit amas de ses mains réconfortante. Tom, le dernier à s'en remettre, se coucha à plat ventre avec peine, et posa son visage sur notre empilement de mains. Icare renifla, et regarda enfin son ami dans les yeux.

- Le Major Tom va s'envoler mais t'inquiète on reste au bout du fil.

Un explosion de rire sortit de leurs lèvres à tous les deux suivies de véritables chutes du Niagara. Je les rejoint directement, toutes les barrières de mon visage se relâchant aux sons de leur tristesse. Icare se jetait sur son meilleur ami pour lui faire un câlin, et je m'ajoutais à eux, juste après avoir eu le temps de voir Ophélia essuyer une petite larme de ses yeux. Elle mit son doigt sur sa bouche en signe de secret et se joignit à nous elle aussi. Nous n'étions plus qu'un tas de corps empilés, pleurant et s'aimant.

- Ophélia ? l'interpella le blond sous mon poids, après un silence.

- Oui ?

- Je m'appelle Icare.

- C'est pas grave mon chou.


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