Chapitre 22 - 13h33

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Julie reprit doucement conscience. Le flux d'information s'était arrêté. Combien de temps avait duré son absence ? Quelques minutes tout au plus. Will n'avait pas bougé. Il continuait de l'étudier du regard, avec son sourire sur les lèvres.

— Tu es très réceptif, affirma-t-il, amusé. J'ai fait la même chose quand je me suis approché de Théodore. Et aussi avec ton ami David, mais avec lui, j'ai dû forcer la connexion.

— Will, dit-elle, d'une voie mal assurée. Pourquoi ton beau-père est-il passé du gentil gendarme qui t'a adopté, à cet agent qui t'a traqué dans la forêt ?

L'étranger perdit son sourire quand il répondit :

— Parce qu'il a été témoin des choses terribles que j'ai fait. Il doit caresser l'illusion que m'ayant arrêté une fois, qu'il doit être capable de le refaire.

— Je n'irais pas à Luciano. Je sais que c'est là-bas que tu comptes m'emmener, mais je ne te suivrais pas. Je ne peux pas tout abandonner. J'ai une vie ici.

Son sourire réapparu, crispé.

— Je pensais avoir été clair. Tu vis dans le monde des hommes. Cette société condamne la planète. Vous vous approchez désormais du point de rupture, qui provoquera l'emballement climatique qui risque de détruire toute vie ! Et pas dans trois-cents ans ! Les conséquences du cataclysme se font déjà ressentir aujourd'hui. Attends de voir ce qui se passera dans dix ans. Et surtout autour des années quarante. Le mur qui se profile à l'horizon arrive plus vite que prévu.

— Je me dois de tout rejeter en bloc. Je ne doute pas de son existence, mais je réfute son symbole. Croire en Luciano signifie condamner mon monde et je m'y refuse. Je veux avoir foi en demain.

— Tu n'as donc rien compris de ce que je me tue à te dire depuis une heure ? Il n'y a plus rien à faire, Julie ; ni même à espérer. Tu as une vision formatée et erronée de ce qui risque de vous arriver dans quelques années, mais tout basculera prochainement. Vous rendez cette planète inhabitable et personne ne bouge le petit doigt pour la sauver.

Julie avait l'impression qu'elle l'avait mise en colère. Elle se leva, prête à exiger de quitter cet endroit immédiatement, mais elle tenta une dernière fois de se justifier :

— Tu ne devrais pas nous condamner aussi facilement. Nous avons pourtant tellement de projets environnementaux. Il y en a eu des réformes en faveur de la planète. Les choses avancent. Nous devons continuer à faire...

VOUS N'AVEZ PLUS RIEN À FAIRE ! s'écria-t-il.

Une onde de choc s'échappa de lui, puissante, implacable. La bougie fut soufflée et les ténèbres tombèrent sur la pièce. La jeune femme qui était debout fut projetée contre son siège avec violence. Et un petit tremblement de terre les secoua et fit chuter des morceaux de pierre du plafond.


Luciano et le retour de la lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant