Chapitre 10 - 10h24

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Julie fut brutalement ramenée à la réalité, par l'incohérence de ses propos. Elle s'écarta, prise d'un sérieux ras-le-bol. Elle en avait assez de ces conversations qui n'aboutissaient pas et qu'il ne s'expliquait pas. Il était normal qu'elle ne comprenait pas le mystère qui l'entourait, s'il l'épaississait au lieu de le dissiper.

— J'accepte volontiers la balade que tu m'as proposée ce matin, dit-il d'un ton détaché. Et non, je ne me mélangerais pas aux hommes. Cela ne nous avancerait guère. Les agents possèdent un algorithme de reconnaissance dans les caméras de surveillances. Et Annecy est l'une des villes les plus observées. Je crois que leur dispositif couvre quatre-vingt-dix-sept pour cent de l'agglomération. Ils savent où je suis dès que j'apparais. Mais, c'est un risque que je dois courir. Heureusement que je perçois leur présence. N'ait crainte, je serais prudent.

Avant que Julie ait eu le temps de faire quoi que ce soit, il lui attrapa la main et ils prirent la direction du centre-ville.

— Il faut que l'on accélère les présentations, déclara-t-il. Tu dois savoir un certain nombre de choses sur moi avant de te décider. Et là, je viens de te faire une révélation capitale sur moi. Je ne suis pas un homme. Quand tu l'auras compris, on aura fait un énorme pas vers qui je suis. Tous les deux, nous sommes liés.

— Comme des âmes sœurs ? demanda-t-elle.

Will sourit. Il était si beau, si rayonnant.

— Tu es tellement naïve.

Ou stupide ? fit sa conscience, un brin moqueur.

Julie baissa les yeux, honteuse. Ils marchaient main dans la main. C'était autant excitant que redouté. Si Yann les surprenait, Will passerait un mauvais moment, et elle aussi.

Tandis qu'ils quittaient le parc de l'Impérial et qu'ils longeraient le lac, à l'ombre des platanes ; la magie opéra à nouveau. Quel que soit le magnétisme qu'il dégageait, il s'activait. C'était un spectacle surréaliste auquel assistait Julie, amusé. Elle voyait le courant des gens, presque comme un flot ininterrompu d'individus, se fendre en deux, quand Will s'approchait. Personne ne les regardait. Tout se passa naturellement. Le monde s'écartait à leur niveau et les masses se reformaient dès qu'ils les eurent dépassés. Et pourtant, personne ne fit attention à eux. Comme si la bulle dans laquelle il les avait enfermés les rendait invisibles.

Julie se maudit. Elle venait de gaspiller de précieuses secondes de silence, à observer ceux qui les entouraient, alors qu'elle avait des questions à poser.

— Si tu n'es pas un homme, est-ce que cela veut dire que tu viens d'une autre planète ? J'ai conscience que formuler cette question à haute voix prouve son ridicule mais après tout, tu fais des choses que le commun des mortels ne peut faire. Tu crées ce champ pour que personne ne t'approche. Et, je ne te parle même pas de cette façon que tu as de disparaitre. Je te soupçonne aussi d'être un télépathe et de lire dans mes pensées. C'est effrayant.

Julie se remémora ce qu'il avait dit pendant le feu d'artifice.

— C'est pour cela que tu es recherché ? Parce que tu viens d'ailleurs, d'un monde qui m'est inconnu ?

— J'avoue que cela aurait pu coller. Le seul hic, c'est que je suis bien un être humain. Je ne prétends même pas savoir si les extraterrestres existent. Je suis né à Newry, en Ireland. J'ai vécu toute mes premières années à sa périphérie, dans une banlieue industrialisée. Je n'ai pas connu mon vrai père. Ma mère ne m'en a jamais parlé. Il était interdit de l'évoquer. Elle a refait sa vie avec un autre homme, une ordure.

Julie sourit et demanda, d'un ton amusé :

— Je rêve où nous en sommes déjà à échanger sur nos enfances respectives ?

Luciano et le retour de la lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant