Chapitre 47 - 19h

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Ce fut lorsqu'un policier municipal apparut au loin que Julie comprit qu'il était temps pour elle de partir. C'était un sentiment nouveau qui la mit mal à l'aise. Après avoir été la petite fille modèle pendant dix-huit ans, elle était devenue l'indésirable, celle qui n'était plus tolérée à proximité des endroits sensibles où il y avait des enfants. Était-ce une jeune maman qui l'avait appelé ? Julie ne pouvait pas lui en vouloir. Elle savait que son état vestimentaire déplorable faisait peur.

Sa conscience intervint : Peut-être que ce gentil policier arrive parce que ton portrait a été identifié sur les caméras de surveillance de la basilique et que ton profil a été placardé dans tous les postes de police et de gendarmerie de la région ?

Julie soupira. Avait-elle vraiment envie de connaître les raisons de son arrivée ? Certainement pas. Alors, elle se leva et fila vers les magasins qui lui faisaient face. Elle longea un café, souhaitant rejoindre les coins de la ville plus reculés. Les tables des terrasses étaient bondées. Les clients profitaient des ombres des grands érables qui bordaient la rivière. Julie se laissait guider par son instinct. Elle marchait sans savoir où... à moins qu'inconsciemment, elle ait une idée. Plus elle s'éloignait du centre-ville et moins il y avait de monde sur les trottoirs. Elle progressait d'une allure rapide, légère. Elle ne voulait pas imaginer le pire, ni pour elle ni pour Iliane. La roue allait tourner, forcément. Elle refusait de penser que les événements pouvaient aller de mal en pis. C'était impossible.

Avant même qu'elle s'en soit rendu compte, Julie s'arrêta devant une route importante. Une artère qui reliait les axes périphériques pour rejoindre le lac en contournant la ville, passant par la montée des abords de la basilique. Il y avait un énorme embouteillage qui paralysait le quartier. La jeune femme comprit que la voie qui menait jusqu'au lac avait été fermée. La section de route qui encadrait la basilique avait dû être condamnée. Et comme pour confirmer ses suppositions, elle vit des policiers municipaux. Trois hommes, positionnés à un carrefour situé avant la côte, arrêtaient chaque voiture pour les orienter sur des voies de déviation. Il y avait de la tension dans l'air et des automobilistes klaxonnaient leur mécontentement. Julie entendit même certaines insultes à l'attention des forces de l'ordre. Elle traversa la route par le passage piéton. Elle passa près des trois agents de la circulation sans s'arrêter. Ils étaient bien assez occupés à l'installation d'une bifurcation temporaire pour que Julie se soucie d'attirer l'attention. Une fois l'artère franchie, elle s'arrêta et elle leva les yeux.

Elle était arrivée devant un énorme portail. Celui du cimetière de Loverchy-Balmettes, qui faisait l'angle entre la rue qui partait pour le lac et celle qui s'éloignait d'Annecy en passant par sa zone industrielle. C'était dans cette direction que les policiers tentaient d'envoyer les automobilistes pour fluidifier le trafic. Julie essaya de ne pas faire gaffe à l'air électrique autour d'elle.

Elle se demanda ce qu'elle faisait ici. Quelle aide son père pouvait-il lui apporter ? Elle avait pourtant d'autres personnes, bien vivantes, qui étaient susceptibles de la secourir. Pourquoi avait-il fallu qu'elle vienne ici ? Était-ce vraiment le moment pour se recueillir ?

Peut-être que c'est Ya qui a guidé mes pas, pensa-t-elle stupidement pour se donner du courage.

Ya ? s'étonna sa conscience. Tu parles de la divinité des Réfugiés ?

Julie le vit arriver. Il quittait le cimetière. Un homme à l'apparence louche. Il portait une veste fermée jusqu'en haut – et ce malgré les températures – dont la capuche était rabattue sur sa tête. Et pour compléter la tenue suspecte, il avait de grosses lunettes de soleil qui lui masquaient la moitié du visage. Un cliché. Il voulait tellement ne pas être vu qu'il attirait l'attention. Il avait un sac à dos. Et quand la jeune femme s'approcha du grand portail, il le franchit à son tour. Ils auraient dû se croiser. Mais ils se heurtèrent. L'individu avait la tête baissée et l'allure de celui qui quittait un endroit miné. Lorsqu'ils arrivèrent au même niveau, il la bouscula d'un violent coup d'épaule.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 17, 2021 ⏰

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Luciano et le retour de la lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant