Chapitre 13 - 11h03

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Julie secoua la tête, confuse. Elle savait que les choses pouvaient être plus compliquées dans la vie. Elle repensa naturellement à ce soir d'anniversaire où David leur avait fait part du secret qu'il renfermait et à la manière dont son groupe d'ami avait laissé Yann le chasser de la maison. Était-ce par peur que Yann avait agi ?

— Tout n'est pas aussi facile, murmura-t-elle, en ayant l'impression de répondre oralement à un exercice. Ou alors, c'est souvent les choix liés à la peur qui l'emportent, mais je ne suis pas certaine qu'on en ait conscience.

Will se tourna vers le Paquier et observa les gens qui les entouraient.

— C'est ainsi qu'on vous apprend à vivre. Ceux qui gouvernent ignorent les dégâts qu'ils provoquent, en vous l'enseignant dès le plus jeune âge. Il serait peut-être temps de vous élever spirituellement. C'est normal que la plupart du temps, vous fassiez des choix parrainés par la peur. Vous allez à l'école pour vous endurcir, pour survivre dans cette société. Vous devez apprendre à être le plus fort, le plus intelligent et le plus habile pour survivre dans ce monde ! 

— Pourquoi me racontes-tu tout ça ?

Doucement, il se tourna vers elle. Il ne souriait plus.

— J'ai dit que je t'expliquerais. Tu voulais percer mes secrets. Tu sais maintenant pourquoi des agents sont prêts à tout pour m'attraper. Parce que je suis différent et que je refuse d'être gouverné par la peur. Je suis la lumière. C'est pourquoi Bruxelles me traque depuis des décennies. Cette chasse ne s'arrêtera que lorsqu'ils m'auront exécuté. Il ne peut pas y avoir d'autres fins. Je suis menacé, car je ne suis plus le même depuis que j'ai affronté le monstre dans la scierie.

Julie l'observait, déconcertée. Elle sentait qu'on approchait de son grand mystère. Avec un certain amusement, le sourire aux lèvres, le regard espiègle, Will avoua :

— Je détiens et je protège la Vie. Et cela leur est insupportable.

Continuant sur le ton de la confidence, Julie lui demanda de s'expliquer. Mais, il secoua la tête. Il affirma que le temps passait vite et qu'il lui était impossible de la soustraire davantage à ses amis. Il savait qu'un avis de recherche avait été publié sur les réseaux sociaux et qu'elle avait été aperçue plusieurs fois avant de disparaitre aux abords de l'Impérial. Le souci pour Will n'était pas les proches de Julie, mais que les autorités fédérales s'organisaient autour d'eux.

Tandis qu'ils quittaient le banc, il lui demanda de ne plus essayer de le revoir. Il se doutait que les agents allaient la recontacter, et qu'ils durciraient les menaces alors il lui fit promettre ne pas utiliser le lien qui les unissait pour le retrouver. Elle ne comprit pas l'idée du lien, mais elle promit. Elle devrait attendre chez elle qu'il vienne la chercher. Il l'informa qu'il lui restait encore une dernière conversation sur tout un pan de la vérité qu'elle ignorait et qu'ensuite, elle devra faire un choix qui déterminera qui elle voudrait être. Soit elle décidera de conserver sa vie d'avant et de continuer à vivre dans la peur ; soit elle partait avec lui pour accepter l'idée de s'accomplir dans la lumière.

— Tu es tellement précieuse, murmura-t-il, le regard pétillant.

Julie se tourna vers lui et lui prit la main. Mais, dans son dos, elle sentit comme des présences étrangères. Elle sut que des gens pénétrèrent le champ magnétique établi par Will. Elle se retourna quand Sarah et Yann arrivèrent à leur niveau. Ce dernier avait un regard noir et des éclairs dans les yeux. Julie l'avait déjà vu une fois, ce regard, le soir de son anniversaire, juste avant qu'il s'en prenne à David.

— Tu ne nous présentes pas ? fit Sarah.

Julie se tourna vers Will. Pourquoi lui avait-il fait un coup pareil ? Pourquoi avait-il fallu qu'il laisse ses amis entrer dans son cercle ?

— Sarah, Yann, voici Will.

Ses deux amis ne le saluèrent pas. Il n'y eut pas de poignées de main ou de banal échange verbal. Ils se montrèrent froids, presque irrespectueux. Un silence lourd et malaisant s'installa. Chacun observait l'autre. De toute évidence, ni Sarah ni Yann ne voulaient discuter. Ils n'étaient là que pour récupérer Julie. Cette dernière était mal à l'aise, redoutant ce qui se passera quand Will les quittera. Alors qu'elle ne dura qu'un instant, la jeune femme crut que la scène s'éternisait. Elle sentit même que son attention se déporta vers ce qui les entourait. Elle percevait l'Ombre plus forte que jamais. Les agents n'avaient jamais été aussi proches. Julie fit quelques pas en arrière, prise d'une angoisse. Il y avait autre menace que celle des fédéraux. Quelque chose de maléfique planait sur eux. Alors, elle finit par lever les yeux. Sur les platanes qui bordaient la route, à quelques mètres d'eux, plusieurs dizaines de corbeaux les observèrent. Ils étaient posés sur leurs branches, étrangement silencieux.

— Qui a-t-il ? s'inquiéta Will, en s'approchant.

Elle se tourna vers lui. D'un signe de tête, elle lui montra les arbres, mais l'expression du garçon restait toujours aussi perplexe, comme s'il ne comprenait pas. Ou qu'il ne voyait pas. Yann arriva presque aussitôt et glissa son bras autour de la taille de la jeune femme pour la maintenir contre lui. Pour Julie, tout ce qui importait, c'était que Will continuait à chercher des yeux ce qui l'effrayait, sans rien voir.

Si tu imagines ces maudits corbeaux, c'est que tu deviens folle ! s'alarma sa conscience, paniquée.

Yann la tira vers lui et doucement, ils s'éloignèrent. Julie n'opposa aucune résistance. Elle savait qu'il était temps avec Will de se séparer. Alors, elle se laissa guider.



Luciano et le retour de la lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant