𝐴𝑟𝑡𝑒́𝑚𝑖𝑠 : 𝐿𝑒 𝐶𝒉𝑎𝑛𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝐿𝑜𝑢𝑝𝑠 [𝑇𝑂𝑀𝐸 𝟣]

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Couché sur le capot de sa voiture, les mains derrière la nuque, Chad observe attentivement le ciel étoilé. Il a eu la simplicité de penser que son âme-sœur serait contre l'avis de son père quant à sa présence dans leur demeure et quelle a été sa déception lorsqu'il l'a vu lui tourner le dos pour rejoindre le premier étage. Il l'a sûrement amplement mérité.

Juste ouvrir la bouche et tout lui avouer. Après tout, elle est déjà au courant et ce qu'elle désire est tout simplement de l'entendre de sa bouche. Seulement, l'entendre de sa bouche, comprendre que son passé est bel et bien réel, ne la poussera-t-il pas à s'éloigner ? Surtout s'il ajoute que les regrets ne font pas partie de lui ?

Inconsciemment, ses yeux s'orientent sur le sol où se reflète la lumière de sa chambre, signifiant qu'elle ne dort pas encore. Alors, lentement, il se redresse, descend de sa voiture et s'avance jusqu'au bas de sa fenêtre. Sans aucun mal, il se hisse à l'intérieur comme un vulgaire voleur et découvre la jeune femme allongée sur le lit, face à lui, les yeux fermés. Au lieu de faire demi-tour en constatant qu'elle s'est endormi la lumière allumée, il se rapproche et s'installe sur la chaise de son bureau, prenant officiellement le statut de voyeur. Il l'analyse attentivement, remarquant ses traits tendus et ses sourcils froncés ainsi que les gémissements à peine audibles qui proviennent du fond de sa gorge. Un cauchemar ? Il pensait qu'elle n'en faisait plus... Et dire que tout a commencé par sa faute...

Le Sud-Américain se met debout et se dirige vers son lit digne de celui d'une princesse avant de s'y asseoir. Il glisse délicatement le revers de sa main sur sa joue et se délecte de la douceur de sa peau. L'Afro-Américaine grogne légèrement, sans pour autant le repousser, et son visage paraît se détendre quelque peu, rassurant l'Alpha. Si elle réagit ainsi c'est que le lien qui les unit est encore présent.

- Qu'est-ce que tu fais là ? demande soudainement Phœbé, tout en gardant les yeux fermés.

- Je pensais que tu ne dormais pas encore.

- Pourquoi ? Qu'est-ce que tu veux ?

Il n'y a aucune animosité dans sa voix comme l'aurait pensé Chad. Peut-être est-ce la fatigue qui se lit dans le bleu de ses prunelles qui est responsable de ce calme ?

- Je voulais qu'on parle, répond-il en continuant de caresser sa joue.

- De quoi ? souffle-t-elle alors que ses iris disparaissent derrière ses paupières.

- De mon passé.

- Tu penses que si on remet à plus tard, tu oseras toujours m'en parler... ? poursuit-elle faiblement.

Le jeune homme soupire, comprenant que la jeune femme est en train de s'endormir sur elle-même et, après une dernière caresse, se lève. Il lui aurait bien proposé de tout réglé dans un rêve, mais il n'est pas certain qu'elle accepte donc il éteint la lumière et prend la direction de la fenêtre sans un mot.

- Reste..., lance soudainement Phœbé en écartant sa couverture en signe d'invitation.

Chad la fixe et distingue ses prunelles scintillantes dans la pénombre. Est-elle malade ? Dans tous les cas, il ne se fait pas prier et rebrousse chemin vers son lit avant de retirer sa chemise pour prendre place au côté de l'États-Unienne. Étonnement, son fin bras entoure sa taille et sa tête se loge dans son cou. Son souffle lui arrache des frissons et suivant des secondes d'hésitation, il encercle son bas dos de son bras afin de la rapprocher un peu plus contre son corps.

Sa chaleur. Son odeur. Son corps frêle entre ses bras. Tous ces détails qui lui ont terriblement manqué et qu'il réapprend à apprécier, ne désirant, pour rien au monde, voir ce moment prendre fin. La respiration de Phœbé devient lente et régulière quand elle s'endort et il ne tarde pas à la rejoindre.

✶❍✶

L'œil admiratif, l'Alpha observe la jeune femme prendre place sur le pont en bois créé par Elveyn. Couvert d'un feuillage rouge et rose, il est construit sur un grand lac entouré de végétations où plane un fin brouillard. Sortant de sa cachette, Chad la rejoint et s'installe à sa gauche, les pieds pendants juste au-dessus de l'eau.

- Tu vas tout me dire ? l'interroge la jeune femme en le regardant droit dans les yeux.

- Je vais tout te dire, soupire-t-il en orientant son regard sur l'horizon. Au risque de te perdre, songe-t-il.

- Tu ne me perdras pas, souffle-t-elle comme si, encore une fois, elle a lu dans ses pensées.

La sincérité et l'assurance qui brillent dans ses iris lui donnent du courage et enfin, il décide de se lancer et de tout lui avouer, n'omettant aucun détail. Durant son récit, il ne lui jette pas un coup d'œil, de peur de constater une expression de dégoût ou encore de colère et c'est seulement à la fin qu'il s'aperçoit qu'aucune de ces deux émotions n'y est. Son visage demeure d'une neutralité encore plus frustrante, plus effrayante que le serait un quelconque autre sentiment, car, à ce moment, il n'a aucune idée de ce qui lui traverse l'esprit.

- Pourquoi tu as fait ça ? s'enquiert-elle, calmement.

- Par plaisir, avoue l'Alpha avec franchise.

- Et tu en as eu ? poursuit-elle.

Il acquiesce silencieusement en se pinçant les lèvres.

- Tu as des regrets ? lance-t-elle en l'observant du coin de l'œil.

- Je n'y arrive pas, répond-il en hochant la tête négativement.

- C'est Elveyn qui t'en empêche ? enchaîne-t-elle désirant comprendre ses explications.

- Pas vraiment, c'est surtout que ma partie humaine ne se sent pas responsable et encore moins concernée par ce qui s'est passé donc avoir des remords, finit le sud-américain en grimaçant.

- Tu aimerais en avoir ?

- Je ne sais pas, soupire-t-il.

Pensive, Phœbé hoche la tête et reporte son attention sur le lac. Ses jambes se mettent à balancer dans un rythme régulier, montrant qu'elle est bien loin dans sa réflexion.

- Pourquoi tu ne m'en as pas parlé plus tôt ? lâche-t-elle. Tu n'as pas confiance en moi ?

Sa question le prend de court, car la réponse semble vraiment compter pour elle. Bien que son visage exprime une neutralité déconcertante, le ton légèrement tremblant de sa voix brise cette carapace.

- Ce n'est pas une question de confiance, j'avais peur que tu réagisses comme tu l'as fait la dernière fois.

Ouais, la dernière fois où se lisait peur et dégoût sur son beau visage et que ces mots se sont échappés de ses lèvres.

- À propos de ça, je m'excuse, je ne voulais pas te dire toutes ces choses, ce n'est pas toi que je voyais et j'ai paniqué. Je ne te considère pas comme un monstre ou un lâche. Par contre, si tu me caches des choses de nouveau, je te...

L'interrompant dans sa plainte, Chad pose sa main sur sa joue et l'embrasse délicatement, savourant la douceur et le sucré de ses lèvres. Elle est enfin redevenue sienne alors il n'a pas l'intention de perdre une seconde. Dire qu'il s'est refusé à lui avouer toute la vérité alors qu'elle est dotée d'une compréhension inégalable. Il a sûrement de la chance, car toutes n'auraient pas toléré un tel passé.