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Regard froid, bouche pincée, mâchoire serrée : tout chez cet homme inspirerait la peur en chaque personne qui aurait le malheur de croiser son chemin à cet instant précis. Voici la seule chose qui vient à l'esprit de Phœbé lorsque son regard se pose sur Chad par inadvertance. Ses mains sont crispées sur le volant et sa conduite est extrêmement sèche, procurant chez la jeune femme l'envie pressante de descendre.

- Ralentis.

En lâchant ce simple mot, elle ne s'attend à ce qu'un regard empli de reproches la dévisage de la sorte. Un regard froid à glacer le sang. Et au lieu de ralentir comme demandé, il paraît accélérer davantage. Se moque-t-il de sa personne ?

- Chad, je t'ai demandé de ralentir, pas le contraire ! s'écrie la jeune femme, paniquée.

Ce dernier l'ignore complètement et alors que la peur commence à s'insinuer au plus profond de son être, une remarque cinglante traverse son esprit. Une remarque qu'elle ne se gêne pas de partager :

- Tu as peut-être l'intention de me tuer aussi ? ironise la jeune femme.

Brusquement, le véhicule s'arrête, envoyant en avant son corps qui, heureusement, est maintenu par la ceinture de sécurité. Sans un mot, elle descend du véhicule et claque violemment la portière derrière elle, décidée à poursuivre sa route à pied. Mais c'est sans compter sur l'Alpha qui l'imite après avoir garé la voiture sur le bas-côté.

- Qu'est-ce que tu fais ? lui demande-t-il. Phœbé ? insiste-t-il face au silence de la jeune femme.

- Ça ne se voit pas ? crache-t-elle. Je préfère marcher que de mourir dans un accident à cause d'un crétin comme toi.

- Phœbé, l'interpelle-t-il d'une voix exigeante.

- Non, il n'y a pas de « Phœbé » qui tienne ! Fiche-moi la paix. Tu joueras le grand méchant loup sans moi.

- Pho...

- J'estime que je suis assez tolérante d'être là pour que tu agisses de cette façon, l'interrompt la concernée en lui faisant face ; comme un gamin de huit ans qui fait le contraire de ce qu'on lui demande.

- Tolérante ? reprend le jeune homme en fronçant les sourcils. Tu me tolères ?

- Exactement, ton comportement est à peine tolérable et pourtant, je suis encore là à attendre je ne sais quoi de ta personne.

- De ma personne ? ricane Chad. Je pensais que j'étais un monstre et un lâche, pas une personne.

- Ça ne semble pas te déranger plus que ça puisque tu ne m'as pas encore prouvé le contraire ! Tu baignes dans cette autosuffisance qui n'a pas sa place étant donné que tu ne t'apportes rien de bon !

- Tu...

- Non, mais laisse, le coupe pour la énième fois l'États-Unienne. Je n'ai plus envie de t'entendre.

Sans ajouter un mot, la jeune femme reprend sa marche, tournant le dos à Chad qui reste là, les bras le long du corps. Qu'il aille se faire voir. Elle en a plus que marre de son comportement puéril. Marre qu'il tente de la faire culpabiliser alors que c'est lui qui est en tort.

Ramenant ses bras contre sa poitrine, Phœbé soupire longuement. Elle n'a aucune idée de l'endroit où elle se trouve. Cette grande route qui semble sans fin lui est parfaitement inconnue. Alors comment est-elle censée retrouver sa route ? Est-elle même encore dans l'État de Californie ? Peut-être. Peut-être pas. Soupirant encore une fois, la jeune femme préfère arrêter sa réflexion ici, sentant une légère migraine pointer le bout de son nez et décide de se contenter de marcher. Elle arrivera bien quelque part, non ?

Dans son dos, Chad se déplace lourdement. Écrasant l'herbe sous ses bottes noires et traduisant sa mauvaise humeur par la même occasion. À plusieurs reprises, il souffle, il jure dans sa barbe, il shoot dans le sol : le portrait exact d'un enfant qui boude. Au moment où Phœbé s'apprête à lui faire la remarque, l'atmosphère se charge subitement et devient un peu plus pesante qu'elle ne l'est déjà.

De la brume surgit du bois qui borde l'autre côté de la route et flotte jusqu'à leurs pieds. Le Sud-Américain grogne et se place d'un geste protecteur devant elle alors qu'il n'y a rien.

- Qu'est-ce que tu fiches ici, Vladimir ? demande sèchement le jeune homme.

- Toujours sur les nerfs, se moque l'inconnu en sortant du bois.

Possédant une apparence atypique, Phœbé ne peut s'empêcher de considérer cet étrange personnage, qui paraît tout droit sorti d'une autre planète, de long en large. Cet étranger est vêtu d'un pantalon grisâtre rentré dans une paire de bottes noires dont le design et les motifs sont indescriptibles. Un long manteau brun, maintenu à sa taille par une ceinture rouge en tissu et qui ne possède qu'une manche de cette même couleur, vient surplomber son habillement et laisse entrevoir son torse à la sobre musculature.

Son teint hâlé, rivalisant presque avec celui de Chad, s'accorde magnifiquement avec ses longs cheveux ébène qui encadrent son visage aux traits enjôleurs et farceurs, contrastant avec son dur regard de jais. De plus, un losange trône fièrement sur son front ainsi qu'une barbichette parfaitement taillée.

- Enfin, je rencontre cette fameuse âme-sœur, sourit-il en s'approchant avant de soudainement disparaître. Je me présente : Vladimir premier du nom du Royaume d'Odoher.

L'ancienne étudiante sursaute en entendant une voix provenant de derrière. Et, dès qu'elle se retourne, sa main droite se retrouve prisonnière de celle de ce « Vladimir », agenouillé face à elle, qui baise délicatement sa main. Odoher, dit-il ? Le même que celui de Raleth. Peut-être se connaissent-ils ?

- Ne la touche pas ! grogne Chad d'une voix extrêmement menaçante qui a l'air d'avoir son effet sur le nouvel arrivant qui la relâche.

- Vous êtes aussi ravissante que le prétendent les rumeurs, assure-t-il en jetant un coup d'œil en direction de l'Alpha.

- Quelles rumeurs ? s'enquiert-elle en dévisageant l'homme.

- Eh bien, les rumeurs qui affirment que l'Alpha Suprême aurait trouvé son âme-sœur et qu'elle serait d'une beauté renversante.

- Et ces rumeurs circulent à quel niveau ? poursuit la jeune femme.

- Je crois bien que c'est interplanétaire, déclare Vladimir, songeur.

- Et comment cela se fait-il ? International ou encore interracial, d'accord, mais interplanétaire ?

- Où croyez-vous que nos Royaumes se trouvent ? ricane-t-il ; Chad ne vous en a pas parlé ?

À l'énoncé de cette question qu'on ne cesse de lui poser, Phœbé se sent profondément irritée et ne peut s'empêcher de lancer un regard en biais à Chad.

- Il ne me dit pas grand-chose même les plus importantes choses donc je dois attendre que quelqu'un ait l'amabilité de m'informer de tous ces détails, peste l'Afro-Américaine. Enfin, reprend-elle ; si vous êtes ici, ce n'est pas pour moi donc je vous laisse en sa compagnie parce que je n'en veux pas.

Sur ces mots, Phœbé se remet en marche en direction inconnue.

𝐴𝑟𝑡𝑒́𝑚𝑖𝑠 : 𝐿𝑒 𝐶𝒉𝑎𝑛𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝐿𝑜𝑢𝑝𝑠 [𝑇𝑂𝑀𝐸 𝟣]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant