Chapitre 46

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Sur les coups de quinze heures, Éléna s'octroya une promenade dans les jardins, après qu'elle se fût levée de sa sieste ; elle était très fatiguée depuis son départ de chez Kazimir et elle piquait souvent du nez, comme hier soir, pendant le dîner. Elle s'était endormie au moment où Roman avait servi le potage et Nikita lui avait administré une petite fessée en guise de punition, puis il l'avait autorisée à quitter la table pour aller se coucher. Elle ne s'était pas fait prier.

La blonde mettait la fatigue sur le compte de la situation dramatique qu'elle traversait actuellement : elle était retenue prisonnière chez un criminel fou sadique, un pervers psychopathe et elle ne pouvait s'en prendre qu'à elle-même. Si Éléna se trouvait dans ce pétrin, c'était entièrement de sa faute et celle de son entêtement. Était-ce cette amertume doublée d'un fort sentiment de culpabilité qui lui donnait la nausée ? Et que dire de ses aigreurs d'estomac qui la secouait plusieurs fois par jour, dès l'instant où elle se réveillait, jusqu'au moment où elle se couchait ? Elle n'avait jamais ressenti pareille sensation auparavant.

Il devait s'agir de la peur ; la peur de souffrir, la peur d'être torturée, la peur de mourir dans d'atroces souffrances.

Éléna inspira et expira longuement l'air frais présent autour d'elle afin de chasser les mauvaises pensées qui l'assaillaient, puis elle eut une énième pensée pour Kazimir. Que devenait-il ? Est-ce qu'il allait bien ? Pensait-il à elle ? S'inquiétait-il pour elle ? La jeune femme écrasa une larme lorsqu'elle se rendit compte que si elle n'avait pas agi bêtement, si elle n'était pas partie de chez lui, elle serait, à l'heure qu'il était, en train de prendre une collation avec lui après qu'ils eussent fait l'amour, comme bien cela avait été le cas l'après-midi.

La jeune femme ouvrit les yeux et profita un instant de ce semblant de liberté avant que le pire ne s'abattît sur elle ; elle n'avait aucun doute que cela arrivera. Bientôt. Éléna déambula, l'air hagard, dans les allées fleuries de l'immense jardin en admirant la multitude de fleurs et de plantes qui y poussaient sous étroite surveillance. Nikita avait une demeure vraiment magnifique et un jardin splendide. Quel dommage que l'homme ne fût pas à la hauteur des lieux !

Deux jardiniers s'activaient au nettoyage du parc fleuri. La fin de l'été était là et prochainement, l'automne fera son entrée et dans quelques mois, ce sera Noël. La jeune femme repensa brièvement au Noël de l'année dernière qu'elle avait passées en compagnie de ses parents, de sa grand-mère maternelle et surtout, de son fils qui grandissait en elle. Si elle avait su, à l'époque, que c'était la dernière fois qu'elle les voyait, elle ne les aurait jamais laissés partir, mais elle aurait insisté pour qu'ils dormissent chez Mark et ainsi, elle aurait encore une famille.

Qu'en sera-t-il cette année ? Vivra-t-elle assez longtemps pour assister aux festivités des fêtes de fin d'année ? Vivra-t-elle assez longtemps pour fêter sa trente-et-unième année le premier janvier ? Ou bien, croupira-t-elle au fond d'une geôle ou six pieds sous terre ?

Éléna souffla, désemparée. La jeune femme aura un an de plus d'ici quelques mois. Elle ne se voyait absolument pas vieillir entre ces quatre murs où vivait un monstre diabolique. Qui aurait cru qu'il existait des hommes qui fussent pire que Mark ? Pas elle en tout cas.

Elle déporta son attention sur un rosier sauvage très bien entretenu. De magnifiques roses rouges y poussaient. Leurs pétales étaient soyeux et les fleurs dégageaient un parfum agréable. Éléna avait toujours rêvé de s'occuper d'un jardin. C'était un peu comme faire grandir un enfant ; on plantait une graine dans de la terre soigneusement préparée et on en prenait soin, on cajolait la jeune pousse jusqu'à ce qu'elle grandît, jusqu'à l'embellissement, jusqu'à ce qu'elle devînt adulte. Malheureusement, Mark n'avait pas voulu qu'elle en eût un, car il avait jugé sa femme incapable et incompétente pour s'en occuper. Kazimir, quant à lui, avait une horde de domestiques et d'ouvriers à son service qui avaient tous l'interdiction de rentrer en contact avec elle ; aussi, la blonde n'avait pas osé lui demander la permission de s'occuper d'une parcelle de son jardin. Kazimir aurait refusé, car il n'aurait jamais accepté que sa Rose eût côtoyé des hommes, d'autant plus que ses jardiniers étaient jeunes.

Mafiosnyy OrelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant