XXXII Le Cordonnier

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La neige avait recommencé sa chute pendant la nuit. Il en fallait plus pour arrêter Richard et Catherine. Ce matin, elle semblait avoir repris un peu de couleurs après ces jours passés au bord de l'épuisement. Richard était heureux de la revoir en bonne forme. Il se doutait que la perspective de pouvoir obtenir l'arrestation du meurtrier y était pour beaucoup. Jusque-là, ils luttaient contre une personne qui semblait hors d'atteinte et se préparaient à plusieurs mois d'élaboration d'un dossier inattaquable contre lui. Maintenant que la découverte de la piste et des bottes avait écarté le magistrat, le nombre de personnes vivant à Strépy n'étant pas, de surcroît, très élevé, elle savait que la lumière serait vite faite sur cette affaire. Elle espérait trouver une certaine paix intérieure une fois que ce serait fait.

La boutique du cordonnier se situait dans le hameau de Bracquegnies, sur les flancs de la colline Sainte-Anne. Cela ne représentait pas une grande distance mais par ce temps, avec l'épaisse couche de neige, cela apparaissait long. Ils passèrent devant la taverne Les Embuscades et remarquèrent qu'elle était déjà remplie à cette heure précoce. Richard entra pour connaître la raison de cette affluence.

- Salut, Richard, que fais-tu déjà debout à cette heure-ci ?

- Eh, bien, mon cher c'est la question que je m'apprêtais à vous poser à tous.

- Nous venons tous de Bracquegnies. Avec cette neige, nous avons peur de rester bloqués chez nous, comme l'année dernière. Ici, nous aurons de quoi boire et manger jusqu'à ce que la voie soit dégagée. Espérons que ce ne sera pas aussi long que la fois passée.

Il avait fallu une semaine. Une dame, bloquée chez elle, avait mis fin à ses jours, probablement parce que la faim était devenue intolérable et que la tempête l'empêchait de sortir. Ce souvenir restait ancré dans les mémoires de tous.

- Où est le cordonnier ?

- Il a dit qu'il nous rejoindrait une fois son boulot terminé. Si c'est comme la dernière fois que je suis allé porter mes bottes, nous ne le verrons pas de sitôt.

Ils rirent tous, le cordonnier n'était en effet pas renommé pour sa rapidité. Richard sortit précipitamment, talonné par Catherine. La tempête se déchaînait mais cela ne suffisait pas à émousser sa détermination comme le découvrit Richard lorsqu'il lui proposa de rentrer encore une fois chez elle.

- Richard, écoutez-moi bien, je pense m'être déjà expliquée à ce sujet, non ? Ne vous inquiétez pas, si l'envie m'en prenait, je retournerais chez moi mais ce n'est pas le cas. Donc, par pitié, arrêtez de me poser cette stupide question !

- Compris.

Arrivés à la cordonnerie, ils virent de la lumière. Personne ne vint leur ouvrir, étant donné le temps, ils décidèrent d'entrer. Catherine fonça devant l'âtre pour se réchauffer le bout des doigts. Elle attisa le feu, il était mourant, personne n'avait dû s'en occuper depuis un petit temps. Elle commençait à ressentir ses extrémités. Dieu, que cela faisait du bien !

Richard appela le cordonnier sans résultat. Il entreprit de fouiller la maison. Catherine s'y mit également une fois qu'elle se sentit prête à quitter les abords du feu. Elle hurla quand elle découvrit ce malheureux cordonnier pendu dans sa cuisine.

- Que se passe-t-il ?

- Joseph est dans la cuisine... il est mort.

- Quoi ?

Richard fut aussi choqué mais se contint. Il demanda l'aide de Catherine pour détacher le cadavre. Ils tentèrent de vérifier son pouls mais ils savaient tous deux qu'il n'y avait pas de doute à avoir quant à son état.

Le Bûcher de la SorcièreWhere stories live. Discover now