IV La Sorcière

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Arrivée en calèche, elle avait fait sensation dès sa descente. Aucun homme ne pouvait détourner son regard de cette beauté distante, froide mais sensuelle. Son sourire était rare mais tellement irrésistible qu'il hantait les rêves coupables de tous les maris et fiancés du bourg bien plus souvent qu'ils n'auraient pu l'admettre, surtout devant leurs compagnes. Agnès Melin devait avoir la trentaine et incarnait un mélange subtil entre la jeunesse et l'assurance qui vient avec l'expérience.

Son intelligence, en revanche, paraissait déplaisante aux hommes qui ne s'étaient jamais trouvé en présence de femmes instruites. Elle observait toujours méticuleusement son interlocuteur et, avant la fin de la conversation, semblait tout savoir de lui. Les autres femmes faisaient remarquer qu'il ne fallait pas être une lumière pour lire les pensées de la gent masculine quand elle était dans la même pièce.

Personne ne savait d'où elle venait, mais tout le monde soupçonnait une ascendance noble étant donnés sa grâce et son langage châtié. Un autre mystère était ce qui l'avait poussé à s'arrêter dans ce village et cette maison banals.

En peu de temps, la demeure en question était devenue l'endroit parfait pour trouver des baumes apaisants, des potions pour la fertilité, des crèmes et autres lotions dont tout le monde avait un jour besoin. Le résultat étant toujours au rendez-vous, le succès le fut aussi assez rapidement. Les femmes s'y rendaient même si elles se contenaient pour ne pas montrer la jalousie qui les rongeait à chaque coup d'œil vers cette femme splendide.

Cependant, au-dessus de toute considération, elle semblait triste, très triste. Si personne ne savait d'où provenait une telle mélancolie, personne n'osait non plus le lui demander. Pourtant cette histoire valait assurément le détour et ne serait pas sans conséquence pour ce petit village si tranquille.

Le Bûcher de la SorcièreWhere stories live. Discover now