XXXIV La Tempête

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Ils avaient beau avancer le plus vite possible, la nuit était déjà tombée lorsqu'ils furent de retour sur la Moronie. La descente de la colline ne fut pas facile car le ciel était couvert et ils n'avaient pas de lanterne. La tempête avait repris de plus belle et la neige leur fouettait le visage. Ils étaient exténués l'un comme l'autre. Ils mettaient un pied devant l'autre sans vraiment croire qu'ils en finiraient un jour. Ils n'étaient plus capables de penser correctement. La neige était assez haute que pour leur rentrer dans les bottes à chaque pas et glacer leurs pieds et leurs orteils qu'ils sentaient à peine. Ils s'en voulaient de ne pas avoir suivi le sage conseil de Dolliet et de ne pas avoir attendu le lendemain pour revenir à Strépy. Ils ne se souciaient même plus de Delplanche. Il aurait pu les cueillir là tous les deux, la résistance aurait été insignifiante. À vrai dire, ils en venaient même à l'espérer pour en finir avec cette foutue tempête. Ils faisaient un pas après l'autre. Richard lâcha un chapelet de jurons qu'il ne serait jamais permis de prononcer en présence d'une dame s'ils n'avaient été couverts par le bruit du vent. Alors qu'ils montaient encore plus péniblement la colline Sainte-Anne, Catherine hurla :

- Richard, Richard, je n'en peux plus, faisons une pause.

- Par ce temps, si nous ne bougeons pas nous allons geler sur place.

Il la regarda, elle avait l'air frigorifiée. Il devait trouver une solution. Il savait qu'elle n'apprécierait pas mais ce fut sa seule idée :

- Venez, abritons-nous chez le cordonnier.

Si Catherine trouva l'idée repoussante, la perspective de pouvoir se reposer à l'abri du vent et de la neige l'emporta sur toute autre considération. Elle ferma la porte dès qu'ils furent à l'intérieur mais la maison était déjà passablement refroidie. Richard s'empressa d'allumer un feu. Ils restèrent une bonne demi-heure à s'y réchauffer. Leurs vêtements séchaient près de l'âtre tandis qu'ils restaient emmitouflés dans des couvertures. Quand ils furent un peu plus à l'aise, Richard demanda :

- Avez-vous faim ? Je n'ai rien mangé depuis ce matin et vous non plus. Nous avons besoin de force. Joseph devait bien avoir quelques victuailles en réserve.

- Richard, vous n'êtes pas en train de me dire que vous comptez vraiment voler la nourriture d'un mort, alors qu'il se trouve encore dans la même maison que nous ?

- Il n'en aura plus vraiment l'usage.

- Après tout... je suis affamée, alors tant pis, allons-y. Je suis sûre qu'il nous en prierait, s'il nous voyait dans cet état.

Ils se préparèrent un repas qu'ils savourèrent près de l'âtre. Ils commençaient à se sentir vraiment apaisés. Ils écoutaient le vent se déchaîner dehors et étaient, finalement, bien heureux d'avoir évité la fin du voyage.

- Au final, il y a des chances pour que Dolliet arrive avant nous à Strépy pour arrêter Delplanche, demain.

- Tout ce qui m'importe, c'est d'en finir avec tout ceci. Vous savez ce que je trouve le plus triste dans cette histoire ? Je pensais que mon père avait été tué pour une faute qu'il avait commise mais là, c'est uniquement par cupidité et cela me rend hors de moi. Comment peut-on placer l'argent, quelle que soit la somme, avant la vie de quelqu'un qui vous a toujours soutenu ?

- Je peux vous comprendre. Mais ce qui me fait plaisir, c'est qu'au final, il n'a pas eu l'occasion de vendre ces fameux documents.

- Je n'y trouve aucun réconfort, Richard. J'ai juste envie que tout cela s'arrête, je suis exténuée par toute cette violence.

- Nous avons vécu quelques jours assez horribles mais demain tout ceci sera terminé. Vous pourrez enfin faire votre deuil et, un jour, tout cela sera derrière vous.

Le Bûcher de la SorcièreKde žijí příběhy. Začni objevovat