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Le corps de Jane reposait contre celui d'Orry, le dos appuyé contre le torse du jeune homme, la tête renversée en arrière, sur son épaule. Ses yeux grands ouverts regardaient le ciel, qui avait retrouvé sa couleur normale. Orry avait entouré la taille de sa compagne avec ses bras et la serrait doucement contre lui. Son visage était enfoui dans son cou qu'il caressait tendrement de son nez.

Le soleil brillait, haut et majestueux, tout était calme et apaisé, comme les événements passés n'avaient pas eu lieu.

Le petit bateau glissait lentement dans la baie, vers le sud, et seul le son des rames frappant l'eau brisait le silence ambiant. Rob maniait les deux bouts de bois avec adresse, regardant droit devant lui, ne faisant pas attention au couple qui se câlinait derrière lui. Il ne voulait qu'une chose, retrouver sa famille qui l'attendait chez eux, dans leur communauté. Il venait de relayer son frère qui n'allait pas assez vite à son goût, pressé de serrer contre lui, sa femme et ses enfants.

Cela faisait plus de deux semaines que la rébellion avait eu lieu. Deux semaines qu'ils avaient passé à parcourir toute la ville et ses quartiers, afin de calmer la foule et d'étouffer, comme ils pouvaient, une révolution qui aurait été destructrice. Ils avaient été plus ou moins bien accueillis, mais ils n'étaient pas les seuls à porter le même message, alors de fil en aiguille, l'insurrection s'était dissipée et la reconstruction avait commencé.

Ils en avaient aussi profité pour parler de leur manière de vivre depuis deux ans. Ils avaient longuement échangé sur la création de leur communauté, sur tout ce qu'ils avaient réussi à faire, sans eau courante, sans électricité, avec les moyens du bord. Et ils espéraient avoir transmis aux gens l'envie de vivre de la même manière qu'eux, dans le respect de la nature, de la terre et, ils y croyaient encore, dans une bonne entente générale.

Ils étaient donc épuisés après ces deux semaines à marcher et à très peu dormir. Retourner chez eux allait leur faire le plus grand bien avant de repartir de nouveau. Car tout n'était pas terminé, il faudrait continuer d'informer, de partager et d'aider. Ils étaient les derniers à rentrer, tous les autres étant retournés à la communauté depuis déjà plusieurs jours et le manque commençait à se faire sentir.

Lorsque Rob aperçu enfin la pointe que formait la baie, au loin, il accéléra le rythme faisant rire son frère.

— Eh bien, tu es pressé de retrouver ta belle ? lança Orry en s'esclaffant.

— C'est bon rigole, rigole, toi tu as Jane avec toi, répondit Rob en bougonnant. Et d'ailleurs arrêtez un peu de vous bécoter là, c'est pénible.

— On ne se bécote pas, on se câline, c'est dix fois mieux tu devrais essayer, renchérit le plus jeune, toujours en riant.

Rob ne se retourna pas, mais les deux jeunes gens l'imaginaient lever les yeux au ciel comme il avait pris l'habitude de faire si souvent. Jane tapa doucement la cuisse de son compagnon pour qu'il cesse de taquiner son frère et se lova un peu plus contre lui, relevant le visage pour embrasser son menton.

— Ouais, on ne se bécote pas qu'il dit, je vous entends hein ! grogna Rob faisant éclater de rire le couple à l'arrière de l'embarcation.

Cela faisait longtemps que les jeunes gens n'avaient pas rient d'aussi bon cœur, et Rob avait beau jouer au grognon et rouler des yeux, son sourire était resplendissant. Plus la terre ferme se rapprochait plus il essayait d'aller vite. Orry se releva doucement et lui tapa sur l'épaule.

— Allez, bouge de là, je te remplace, garde un peu de force pour plus tard, dit-il un sourire en coin.

— Ha ha ha ! Tu es trop drôle. Mais qui m'a mis un frère comme ça bon sang ?

Le chant des oiseauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant