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La petite cuisine ne comportait pas énormément de meubles. En regardant bien, nous pouvions voir les vestiges d'une belle cuisine aménagée, comme il s'en faisait beaucoup il y a quelques dizaines d'années. Mais de celle-ci, il ne restait plus qu'un meuble bancal et élimé et une vieille gazinière, sans doute récupérée dans une décharge quelconque.

Une table rectangulaire était disposée au centre de la pièce entourée de six chaises dépareillées. Celle-ci faisait office de plan de travail et était témoin des nombreuses conversations qui avaient lieu durant les repas de la famille Horner.

Hanet Horner était assise en bout de table. Logiquement face à elle, aurait dû se trouver son mari, Robert Horner, mais celui-ci était décédé quelques années plus tôt. Il avait eu une vie de labeur et de fatigue à consumer sa santé au travail, à l'usine de composants électroniques, grâce à laquelle survivaient les habitants du Queens et dans laquelle travaillaient à présent ses fils et sa belle fille.

Rob, le fils aîné était assis à la droite de sa mère. Il fixait ses mains, jointes devant lui, et faisait tourner ses pouces dans un signe de stress et d'impatience. C'était un bel homme. Grand, des muscles taillés grâce au travail, des cheveux blonds coupés très courts et des yeux noisette lui mangeant une bonne partie du visage. Il ressemblait beaucoup à sa mère. Et malgré sa force physique évidente, se dégageait de lui, une grâce folle.

Orry, le fils cadet se trouvait à la gauche de sa mère. Il était assis avec nonchalance en travers de sa chaise, le dos appuyé sur le dossier, un bras passé par-dessus, les jambes légèrement écartées. Il regardait droit devant lui, la porte de la cuisine, par laquelle allait entrer la personne qu'ils attendaient. Orry avait une beauté plus brute. Il était lui aussi taillé dans le roc mais plus fin que son frère. Ses traits étaient le plus souvent durs et fermés mais lorsqu'il se laissait aller, son sourire était à se damner. Ses yeux, eux aussi noisette, étaient tels que ceux de son frère, on ne voyait qu'eux. Et dans les moments de tendresse les yeux d'Orry savaient exprimer les sentiments, mieux que les mots qui sortaient de sa bouche.

C'est lui que vit Jane en premier lorsqu'elle entra dans la cuisine, accompagnée d'Isabel. Elle se stoppa face à cet homme aux allures à la fois flegmatiques et autoritaires. Il était impressionnant. Son regard se décrocha de lui pour se poser sur Hanet qui se leva doucement et l'invita à avancer d'un signe de main. Rob fit de même et prit la main de son épouse pour qu'elle s'asseye à ses côtés, à sa place.

Jane avança timidement, prit le dossier de la chaise qui avait auparavant appartenu au chef de famille, dans ses mains, et la tira pour s'asseoir dessus. Personne ne dit rien mais Orry se redressa légèrement. Hanet posa sa main sur son bras alors que Jane reculait la chaise afin de s'éloigner de lui le plus possible, sans paraître mal polie.

C'est Rob qui brisa le silence.

- C'est agréable de te voir enfin Jane. Je suis Rob et voici mon frère Orry. Ne fais pas attention, il a sa tête des mauvais jours, mais il n'est pas méchant.

Hanet rit doucement, et Orry soupira en levant les yeux au ciel. Le regard de Jane passa d'un frère à l'autre jaugeant les regards et les réactions, essayant de les cerner.

- Comment vas-tu ? Reprit l'aîné des deux frères.

- Hum... ça va, merci. Répondit Jane d'une petite voix.

- Très bien. Donc, je ne sais pas trop comment commencer en douceur alors je vais y aller directement d'accord ?

Jane hocha la tête en se triturant les doigts et en ne lâchant pas des yeux le centre de la table, afin de ne pas croiser les regards des deux hommes qui l'intimidaient.

Le chant des oiseauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant