Difficiles à distinguer.

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Réajustant son manteau sur ses épaules, la faelienne grelotait en claquant des dents tandis qu'elle courait d'un bon trot. S'étant laissée happer par la fougue du combattant, son entrainement s'était éternisé bien plus que prévu au Bastion. La nuit était noire sur la forêt d'Eel, des flocons tombant paresseusement sur l'herbe gelée qui craquait sous ses pas. Le froid mordant était décuplé par un vent insidieux qui giflait ses joues à la moindre occasion et elle avait visiblement raté le chemin qui aurait dû la conduire jusqu'aux grandes portes.

Pestant, la demoiselle devait se contenter de la faible lueur de la lune pour s'orienter, son cristal de lumière n'éclairant pas suffisamment pour illuminer son chemin. Les arbres se succédaient sans fin, tant et si bien qu'elle fut obligée de leur demander son chemin. Les ombres nocturnes avaient toujours cet aspect effrayant lorsqu'on était seul, Marie ne tenait pas à rester plus longtemps à leur merci. Courant dans la direction qu'on lui avait indiquée, son esprit commença à s'emballer alors qu'elle avait enfin le temps de songer à cette femme morte dont elle ne connaissait rien.

Ce corps qui aurait pu être le sien si Purroros ne l'avait pas trouvée.

Refusant de penser à ça au beau milieu d'un paysage rendu sinistre par la nuit, ses jambes accélérèrent d'avantage la cadence.

Des craquements, des hululements.

Dans ce monde, la nuit ne ressemblait pas à une amie, elle était bien trop sauvage. Les bruits de la nature résonnaient bruyamment quand, enfin, le sentier grimpant vers la cité se dévoila. La jeune fille trébucha presque en l'empruntant, son soulagement à l'idée d'être si près du quartier général amplifiant son désir de s'y réfugier au plus vite.

Deux Obsidiens gardaient la porte, accompagnés d'un lionceau bleu à crinière de barbe à papa. L'œil encore bien vif malgré l'heure tardive, ils dévisagèrent leur visiteur imprévu. Détaillant la dryade d'un air critique, le plus jeune des deux, âgé d'une trentaine d'année, fit un pas dans sa direction une épée cliquetant sur son flanc.

« Le couvre feu est largement dépassé, plus personne ne rentre. »

Son ton était cassant et sec.

Marie fronça les sourcils alors qu'elle piétinait nerveusement le manteau neigeux qui ne faisait que s'épaissir sous son écorce.

« C'est la première fois que je ne rentre pas à l'heure, contesta-t-elle. Il neige, je vais quand même pas rester dehors.

- Premier oubli, première nuit dehors. Ca guérit très rapidement des loupés, surtout s'il neige.»

Malgré ses protestations, aucun des deux gardes ne sembla montrer de compassion pour sa situation.

« A quoi est-ce que vous servez postés ici, si ce n'est pas pour ouvrir cette fichue porte ?!

- On surveille tes miches quand tu dors, tu devrais nous remercier d'être aussi consciencieux. Rien ne passe quand on est là. »

Agacée, la faelienne tournait en rond, toute sensation de froid dissipée par la colère.

« Vous êtes des Obsidiens et je suis une Obsidienne. Comment est-ce que ça pourrait être une menace de me laisser passer la nuit et plus le jour ? »

Les deux gardes se dévisagèrent, soupirant ostensiblement.

« Elle a du mal avec le règlement, la petite, se désola le plus âgé en secouant la tête.

- La nuit tous les familiers sont gris. Difficile de dire ce qui est dangereux ou ce qui ne l'est pas.

- Mais je vais mourir de froid ! »

Quand les choses s'écorçent.Where stories live. Discover now