Celui qui est seul n'est pas celui qu'on croit.

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Incrédule, Marie frissonnait presque alors que son stress se diluait dans une euphorie inespérée. Chris avait ramené Ahaztu, ce qui signifiait de manière claire que le gommeur avait décidé de rejoindre leur cause. L'Oracle franchirait les portes d'Eel sans aucune opposition.

« Chris, s'était-elle écriée. Comment est-ce que tu as fait pour le ramener aussi vite ? »

Mais son sourire franc rencontra un mur d'angoisse, le lézard fixait le sol sans oser la regarder.

« Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-elle sur un ton presque fragile.

- Ce qu'il y a, s'exclama Krev en franchissant à son tour le rideau de perles, c'est que ces deux abrutis ont alerté la renarde. »

Il avait craché ses paroles en dévisageant le saurien et la chimère qui l'accompagnait d'yeux assassins.

« Krev, va donc chercher le lézard, singea-t-il d'une voix de crécelle. Tu verras, ce sera facile. Pas vrai ? s'agaça-t-il. Surtout quand tu le retrouveras en train de courir pour sa vie avec une armée collée au train. Oh, mais on t'avait dit que c'était facile, Krev !

- Une armée ? bégaya la dryade.

- Bien sûr, s'offusqua le descendant. Une tribu de gardes obsidiens qu'on a pu semer uniquement parce qu'il s'agissait de gamins. Et qu'égorger une pauvre femme sur la place à coup de dents a suffi à les détourner de nous suffisamment longtemps pour qu'on prenne la tangente. Heureusement que j'étais là, conclua-t-il d'un air satisfait en lisant l'horreur qui venait de se peindre chez le lézard.

- T-tu... tu as tué une femme pour t'enfuir ? blanchit la faelienne. »

Krev leva les yeux au ciel face à tant de mièvrerie.

« Bien sûr que non, je lui ai simplement tranché la gorge. Ces imbéciles ne se sont pas arrêtés pour rien ; une fois transportée dans une infirmerie, elle ne risquera plus rien. »

Il marqua une pause avant de commencer à ricaner sans pouvoir se contrôler.

« Et je suis repu pour une journée avec ce que j'ai avalé au passage. Tout le monde est gagnant dans l'histoire ! »

Marie grimaça alors que la goule l'écœurait comme à son habitude. Elle s'étonnait cependant du manque de réaction du gommeur, ses yeux blancs restants de marbre face à cet étalage de barbarie.

« Est-ce que vous allez bien, Ahaztu ? le questionna-t-elle. »

Il secoua lentement la tête, comme s'il se réveillait d'un mauvais songe.

« Je vais bien. Et je suis au courant pour votre cause. Nous ne devons pas tarder, il faut que nous parvenions à contraindre Miiko à se rendre ou elle aura raison de nous.

- Vous voulez dire... commença la dryade.

- Nous devons trouver un moyen de la maintenir immobilisée le temps que l'un d'entre nous soit capable d'arracher ses souvenirs et toute envie d'affrontement. Et nous n'avons pas de temps, il nous faut agir dans les prochaines heures, avant que le quartier général soit bouclé. Sa paranoïa ne fait qu'amplifier avec le temps, laissa échapper le gommeur, sa vigilance ne se laissera plus endormir jusqu'à ce qu'elle nous trouve. »

Marie se figea en entendant la gravité qui teintait les propos d'Ahaztu. La magie des arbres s'éteignait dans ses veines, le soleil avait dû entamer sa course vers le firmament et elle doutait d'avoir le temps d'attendre la nuit suivante si la renarde décidait de retourner la ville. Une sensation de malaise intense prit la jeune fille alors qu'elle commençait à se ronger les ongles en se frottant les bras. Elle n'avait aucune idée de ce qu'il fallait faire.

Quand les choses s'écorçent.Where stories live. Discover now