Sans même se rendre compte à quel point.

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Si Marie avait appris quelque chose à Eldarya, c'était qu'il fallait toujours dire oui quand on tentait de vous ordonner quelque chose. Mais pas nécessairement le faire jusqu'au bout. Sitôt que Chris avait été hors de vue, la jeune fille avait fait volteface pour retourner voir la grand-mère. Toquant à la porte, le bel ange vint lui ouvrir avec un air mécontent.

« Qui êtes-vous exactement ? s'agaça-t-il.

- J'ai l'impression que je vous gêne. »

Surpris par tant de franchise, le jeune homme rougit en tentant de démentir. Finalement, il valait mieux qu'il n'ouvre pas la bouche ; il était bien plus beau quand il ne parlait pas.

« Votre grand-mère m'expliquait quelque chose tout à l'heure et j'aurais bien aimé entendre la suite. J'ai cru comprendre que vous vous inquiétiez pour elle, sachez que si elle sort avec moi je pourrais garder un œil sur elle sans qu'elle se sente enfermée. Je pense que c'est un compromis sympathique.

- On ne vous connaît pas, je ne vois pas pourquoi on vous confierait ma grand-mère.

- Je ne vais pas l'emmener à l'autre bout du monde, juste sur un banc dans les jardins et la ramener ensuite. »

De l'encadrement de la porte, la dryade entendait la vieille femme interroger son petit-fils sur les raisons de leur discussion animée.

« C'est rien Mamie, les gars de la garde qui reviennent.

- Menteur, asséna-t-elle en apparaissant dans son dos. Ta mère et toi, vous commencez vraiment à trop en faire. Vous devriez consulter. »

Sur cette phrase, elle le contourna avant de sortir à l'air libre, son panier de pelotes sous le bras.

« Je vous le porte, grand-mère ?

- Avec joie, j'ai bien envie d'aller marcher. »

Muet, la chair de sa chair ne sut quoi dire pour l'empêcher de s'évader une nouvelle fois sous ses yeux sans se la mettre à dos. S'éloignant jusqu'à des jardins parsemés de représentations d'instruments, elles prirent place sur un banc qui faisait face à un piano fontaine. Le bruit de l'eau qui s'écoulait avait quelque chose de très apaisant.

« Pourquoi donc une jeune fille dans la fleur de l'âge cherche-t-elle la compagnie d'une vieille chose décrépie comme moi ? »

Songeant que la vieille femme était un peu dure avec elle-même, Marie prit le temps d'élaborer une réponse convaincante tandis que sa comparse s'était mise à tricoter un ouvrage de petite taille, sans doute des gants.

« A vrai dire, je ne sais pas trop si maintenant je peux le dire ouvertement ou pas.

- Que tu es la faelienne dernièrement arrivée ? Mon chou, si tu savais à quelle vitesse se propagent les rumeurs dans cette ville, tu serais effrayée de lâcher ne serait-ce qu'un rôt. Nous avons peut-être l'air d'être beaucoup au quartier général mais pas suffisamment pour garder des secrets.

- Eh bien, je suppose que ça m'enlève une épine du pied. Parfois, je me demande pourquoi on a tant cherché à me cacher si tout le monde devine qui je suis après quelques instants.

- C'est à cause d'Edvard. Vous en bavez depuis des générations à cause de lui. Il serait temps qu'on change de sérénade à ce propos, si tu veux mon avis.

- Qui est Edvard ? »

C'était un nom que Marie n'avait jamais entendu auparavant. Peut-être était-ce le nom de l'ancien roi ?

« C'était un faelien terrien, comme toi. Un crach'ombre, de la mauvaise graine dans l'âme aussi bien que dans la race de métissage. La plupart d'entre vous arrivez inoffensifs, mais pas lui.

Quand les choses s'écorçent.Where stories live. Discover now