Chapitre 36 : Le plan fou de Kai : mise à exécution

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Alors que l'on aurait pu tous s'effondrer et abandonner, le lendemain nous apporta une lueur d'espoir bienvenue. Nous étions arrivés à Nogales, ville frontière entre les États-Unis bombardés et le Mexique, membre de l'UNASUR. La liberté se trouvait derrière un haut mur grillagé, haut de six mètres environ et avec des barbelés à son sommet. Aucune tour de surveillance n'était présente près de cette portion de la frontière. Kai avait vu deux caméras de surveillance, mais José les avait anéanties avec un lance pierre. Basique, mais efficace.

Aucun drone ne s'était laissé voir, mais la plupart du temps, ils vadrouillaient de nuit. À part pour analyser les gens quand un détenu devait être recherché car il avait fini sa peine, les drones ne sortaient pas. Je déduisais que les engins n'avaient qu'une fonction limitée, ce qui était étrange.

Je regardais Kai et Derek, qui analysaient les derniers préparatifs de notre plan. Nous étions sur un rocher, en hauteur. Les autres prisonniers avaient commencé à fouiller l'ensemble des maisons abandonnées de Nogales. Kai nous pressait : lui craignait que des drones captent toutefois cet amas de prisonniers près de la frontière. Si nos puces ne semblaient pas avoir alerté de notre mouvement de population, il serait en revanche étrange de nous voir nous affairer longuement près du mur de frontière.

Kai semblait sûr de lui quant à son plan, mais plus je voyais des hommes ressortir bredouille des maisons, plus je doutais. Mais je ne disais rien, parce qu'en parfaits organisateurs que l'on était, on n'avait pas de plan B. Kai avait une certaine pression sur les épaules, mais dont il ne semblait pas se préoccuper. J'aimerais avoir son assurance. Son plan reposait sur un facteur chance immense : il comptait récupérer toutes les bouteilles de gaz abandonnées dans cette ville et les entasser près du mur. Mais trouver celles encore pleines ou qui n'avaient pas déjà explosé quand cette ville fut détruite fut compliqué. D'autant plus que nous étions tous épuisés, et plus nos recherches étaient infructueuses, plus on croyait que tout notre périple depuis le nord du pays était vain. Néanmoins, un peu d'espoir renaissait de temps en temps quand un type posait une bouteille supplémentaire au pied du grillage.

Nous laissant ici de longues heures sous la supervision de Derek, Kai était ensuite parti avec Nolan et José trouver la station-service la plus proche. Manque de chance, elle était à vide. La crainte nous gagna quand on les vit rentrer les mains vides, et finalement, quelques types se mirent à chercher du carburant sur quelques épaves de voitures stationnées. Ils remplirent à peine dix gourdes, et Kai déversa le contenu sur les bouteilles d'un air peu satisfait. Personne n'osait rien dire, mais la tension était palpable. Le plan de Kai semblait vraiment compromis. Mais en bon chef, celui-ci ne laissa rien montrer. Il tentait de conserver l'espoir qui l'avait fait nous pousser à traverser l'entièreté d'un État américain.

— Bon, ça doit faire quatre ou cinq bonnes heures que l'on a cherché tout le matériel nécessaire, décréta-t-il. Je crois qu'il est temps. On s'éloigne, au cas où ce tas de ruines finisse effectivement par s'effondrer sur nous.

Au vu de l'état des maisons à étage autour de nous, nous acquiesçâmes. On partit bien plus loin dans une rue plus large, peut-être à un demi-kilomètre du grillage. Kai nous avait donné les derniers ordres : si jamais tout s'effondrait parmi les bâtiments, il fallait que l'on fuît, au plus vite, y compris s'il fallait le laisser. On l'écoutait à contre-cœur : mais finalement, en dépit du danger, je ne pensais pas vraiment que Kai ait peur. C'était dans ses gènes, après tout. L'adrénaline était la sensation qui le rendait le plus vivant.

Je ne pouvais m'empêcher de quitter du regard la silhouette de Kai, bien plus loin dans l'avenue, qui se rétrécissait à vue d'œil. Il nous avait laissé sa jument, car si tout tournait mal, il ne voulait pas l'embarquer dans ses idées suicidaires. Pour une fois.

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