GROSSE ET ALORS ? [Tome 2]

7. Une séparation difficile

Mon enceinte diffuse ma playlist depuis mon retour du repas de famille. Je ne cesse de songer à l'arrivée brutale de James et Julia Hayes gâchant la bonne humeur de tout le monde. Il a fallu un petit moment pour que l'ambiance retrouve une certaine convivialité. Cette intervention surprise était psychologiquement lourde pour la famille Hayes; personne ne s'attendait à ce que ces fantômes du lycée ne viennent interrompre notre repas.   

La séparation avec Nathaniel était relativement difficile pour mon coeur. Je ferme les yeux, la bouche sèche en réprimant mes larmes. Je savais que cela serait difficile moralement. Il a une place importante dans mon coeur, nous avons vécu tellement de choses que je n'arrive pas à imaginer toute une année sans lui. Dunwood va paraître bien triste sans lui.

J'entends la porte de ma chambre s'ouvrir dans mon dos, mais cela ne me donne pas pour autant envie de me retourner. Un nouveau poids affaisse mon matelas, le parfum mentholé de papa chatouille mon nez.

— Comment tu te sens, ma chérie ?

— Je ne sais pas, c'est un véritable chaos dans mes émotions.

— Quand on aime quelqu'un, la chose la plus difficile est de la laisser partir. Ce n'est pas la fin de votre relation, mais le commencement d'un nouveau chapitre de vos vies respectives.

Je me retourne pour faire face à mon père, surprise par ce qu'il vient de dire. Il caresse mon visage en me souriant tristement. Je dois paraître bien pathétique pour que papa vienne me réconforter. Mes pensées sont égoïstes, j'en ai conscience. Nathaniel doit apprendre à se connaître en repartant sur de nouvelles bases même si c'est à des milliers de kilomètres de moi.

Papa attrape la télécommande de mon enceinte pour baisser le son. J'accepte le fait que le garçon dont je suis encore amoureuse quitte le pays, mais cela reste douloureux. Je serre un oreiller contre ma poitrine en fermant les yeux.

― C'est ce que tu as fait quand maman est parti ?

― J'ai eu énormément de mal à l'accepter, mais oui. Même les couples les plus solides peuvent se briser en un instant. Il faut accepter les départs des personnes que nous aimons même si cela demande du temps.

― Pourquoi maman est-elle partie ?

Je ne m'attendais pas à questionner mon père sur ce sujet, mais j'ai besoin de comprendre certaines choses. Elle a brutalement disparu de nos vies sans nous laisser le temps d'accepter ce départ. Maman est une femme inconnue à mes yeux parce qu'elle n'a jamais essayé de nous connaître. Mon père serre mon genou d'une façon affectueuse en soupirant nerveusement. Il arrive aujourd'hui à évoquer le sujet, mais ce n'était pas le cas six ans auparavant. La rencontre avec Ella est certainement la chose qui a bouleversé notre vie de façon positive. J'aurais préféré qu'elle soit ma mère plutôt que Mary.

― Il faut que tu saches que ta mère est avant tout un esprit libre, elle avait besoin de rester en mouvement et rencontrer du monde pour se sentir vivante. Dunwood était certainement bien trop petit pour une femme aussi indépendante. Je pense que notre routine l'ennuyait ce qui l'a poussé à prendre ses affaires et changer de vie.

― En abandonnant au passage ses deux filles et l'homme qu'elle aimait.

― Je ne suis pas certain qu'elle m'aimait encore.

Les souvenirs des mois succédant le départ de maman défilent dans mon esprit. Papa qui refuse de quitter son lit poussant grand-mère Price à prendre le rôle de tutrice pour un temps. Je ne pourrais jamais pardonner une femme aussi égoïste. Quand on fonde une famille, on ne peut pas tout abandonner du jour au lendemain uniquement par besoin de voyage.