Chapitre 17 {II}

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(Pour les personnes ayant une mémoire d'éléphant, le père de Mélody avait un autre prénom dans les premiers chapitres. Je l'ai modifié récemment, il s'appelle donc Philippe maintenant~ les anciens chapitres ont été modifiés en conséquence)

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 Mélody ne put retenir une grimace en voyant l'étalage de cartons qui attendait à être déballé dans la réserve. Son père avait soigneusement omis ce détail lorsqu'il lui avait demandé de passer dans l'après-midi, lors de la fermeture hebdomadaire du lundi, pour lui donner un "petit" coup de main. Il devait y en avoir au moins une vingtaine, empilés les uns sur les autres de manière bien peu équilibrée, et laissant à peine la place pour marcher. Le doigt encore posé sur l'interrupteur, Mélody ne trouvait pas le courage de commencer, son manteau sous le bras et un profond soupir au bord des lèvres. Une longue minute passée à observer l'intérieur de la réserve sans bouger se termina avant qu'elle ne se décide enfin à se mettre au travail. Elle avait été peut-être un peu trop gentille d'accepter aussi vite en pensant qu'elle était en pleine période d'examens. Son père avait trop tendance à se reposer sur elle plutôt qu'à embaucher quelqu'un. Depuis le départ de Tachi de la librairie, personne ne semblait faire l'affaire.

 La jeune femme posa son manteau et son sac à main sur l'étalage d'invendus à sa droite. Elle se dirigea ensuite vers le premier carton, juste à hauteur de sa poitrine, et tira sur le scotch pour l'ouvrir. Mélody ignorait quel livre si génial avait pu pousser son père à en commander autant en une seule fois, aussi quelle ne fut pas sa déception en découvrant le dernier ouvrage poubelle d'un commentateur télévision connu pour ses remarques sexistes et racistes. Depuis qu'il avait annoncé sa présence aux élections présidentielles, tout le monde ne parlait plus que de lui. C'était un best-seller assuré pour son père et sa boutique spécialisée dans les livres de non-fiction. Mélody comprenait sa décision mais la déception fut bien grande ; quitte à devoir travailler autant, elle aurait aimé que ce soit pour un autre genre d'œuvre.

 Si Tachi avait été là, il se serait certainement plaint aussi, rappelant à son père comment, "à l'époque", il mettait en avant des livres de philosophie et de sociologie dans sa vitrine et non des ouvrages écrits par des porte-plumes sous-payés de pseudo politiciens véreux. Mélody sourit inconsciemment à l'imaginer fulminer et ruminer, tout en continuant de travailler parce qu'il faisait tout ce que Philippe, son père, lui demandait. Ce serait bien son genre. Tachi aboyait mais ne mordait pas, ou du moins il ne mordait plus. Son ami lui avait raconté son passé dans la rue et toutes les fois où il s'était retrouvé au poste de police pour s'être encore battu avec quelqu'un. Mais cela semblait loin, désormais. Tachi était la personne la plus gentille et drôle qu'elle connaissait.

 Son sourire s'évanouit tout à coup, une lourde pression s'abattant sur son ventre. Le livre encore dans les mains et les coudes appuyés sur le bord du carton, Mélody sentit sa nuque s'affaisser. Tachi ignorait tous ses messages depuis des jours. C'était la première fois que ça arrivait. D'ordinaire, c'était plutôt Mélody qui était du genre à ne pas répondre, trop occupée par ses responsabilités. Ressentait-il la même chose dans ces moments-là ? Ce même poids désagréable sur le ventre, devenant à la fois trop lourd mais aussi étrangement vide en même temps ? Tachi était un repère dans sa vie depuis les quatre dernières années, toujours là, à n'importe quel moment du jour comme de la nuit, alors n'avoir brusquement plus de ses nouvelles - même si ce n'était que pour quelques semaines - lui faisait bizarre.

 Après leur dispute de la dernière fois, il lui avait envoyé un message d'excuses qu'elle avait fini par accepter, se disant que c'était son humour qui était juste allé trop loin. Mais, depuis, il l'ignorait complètement. Il ne lui avait même pas souhaité la bonne année alors qu'il avait téléphoné à ses parents ! Une part d'elle était un peu en colère contre lui mais une autre, bien plus grande, était seulement attristée qu'il s'éloigne d'elle de cette façon.

Fallen {Amour Sucré Campus Life}Where stories live. Discover now