CHAPITRE QUATORZE

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Les commérages d'Apolline

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— Cassie !

A l'entente de mon prénom, je me retourne vivement pour tomber nez à nez avec une Apolline à bout de souffle qui court – enfin plutôt se rue – dans ma direction. Ses cheveux bruns et frisés se balancent sur ses épaules et leur obscurité ne fait que d'autant plus ressortir la rougeur de ses joues, certainement due à l'effort inhabituel que sa course constitue. Si je ne la connaissais pas mieux, je pourrais penser qu'elle court vers moi pour me torturer ou me tuer tellement elle met d'engouement dans ses gestes. Mais je suis certaine qu'elle m'appelle pour attiser sa curiosité sur les événements des derniers jours. Bon, je ne garantis pas qu'elle n'aura pas envie d'abréger ma vie en entendant toutes les choses qui me sont arrivées, mais ce n'est pas sa motivation première. Elle est juste relayée au second plan, ce qui n'est pas beaucoup mieux réflexion faite.

Je salue poliment la fille de mon cours de biologie avec qui je parlais après la fin de la leçon et range à la dérobée ma feuille de TP tout en marchant vers Apolline pour réduire la distance qu'il lui reste à parcourir. Peut-être que si j'affiche un sourire éclatant, calqué sur les habituels rictus qu'elle me sert, tout se passera bien. Avec un petit peu de chance, elle oubliera même ses questions... Mais je n'y crois pas trop. L'impossible ne se réalise jamais, surtout quand il concerne Apolline.

— TOI ! hurle-t-elle entre deux inspirations saccadées. Il faut qu'on parle !

J'ai l'impression que c'est ce à quoi nous passons le plus clair que notre temps toutes les deux. En fait, ce n'est pas qu'une impression, c'est réellement à ça que nous passons nos journées de libres ou nos pauses déjeuner. Il se passe des choses dans ma vie et je les confie à ma meilleure amie qui m'engueule, me conseille ou souvent fait les deux. Une vraie psy. Bon, une psy casse-pieds et très impliquée dans mon quotidien, mais une bonne psy. Un jour, il faudrait que je lui conseille d'en faire sa carrière professionnelle.

— De ? je demande innocemment dans un pincement de lèvres. Tu veux parler de moi ? Des cours ? Des résultats ? De Carter ? De mon anniversaire qui approche ? Ou, non, encore mieux, de Harry Potter ?

— De tes parents, espèce d'idiote ! me hurle-t-elle presque à la figure. Pourquoi je suis toujours la dernière au courant de tout ?

— Peut-être parce que tu es la seule personne de mon entourage qui ne consulte pas internet tous les matins au réveil et préfère s'enfiler un chapitre d'Harry Potter une tasse de café à la main en tant que petit déjeuner.

— Chocolat chaud, me rectifie-t-elle. Avec une tasse de chocolat chaud pleine de marshmallows à la main, je hais le café ! Et techniquement j'ai aussi une tranche de pain avec de la confiture de figue...

Après avoir lâché un long soupir, je lève les yeux au ciel. Apolline accorde tellement d'importance aux détails futiles, c'est affreux. Elle est le genre de personne à dire qu'elle s'est levée à sept heures une pile, à avoir mis huit minutes trente-cinq à prendre sa douche, à avoir fait couler vingt-huit centilitres de chocolat chaud dans sa tasse énorme en forme d'Hedwige, et j'en passe. Une frustration ambulante pour les gens comme moi qui font tout l'inverse, à vue d'oeil.

Pour une fois pourtant, elle ne part pas dans l'interminable explication des grammes de confiture qu'elle a étalés sur sa tranche de pain, ni du nombre de marshmallows qu'elle a faits tremper dans son chocolat. Elle est trop intéressée par mes futures explications.

— Mais bref, reprend-elle après une courte pause en se rendant compte qu'elle s'éloigne du sujet. On parlera de mes habitudes alimentaires après si tu y tiens tant que ça. Pour l'heure, dis-moi tout, qu'est-ce que j'ai loupé ? Rosalyn était en panique quand elle m'a dit de te dire de ne pas regarder les News l'autre jour. Et puis je n'ai pas croisé Andrew une seule fois sur le campus alors qu'il passe son temps à courir à l'heure de midi !

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant