CHAPITRE TRENTE-ET-UN

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La lettre de Carter

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PDV DE CARTER

H-28 avant mon rendez-vous avec Cassandra.

Je crois bien que j'ai rarement été aussi angoissé de ma vie. Pourtant j'en ai eu des occasions entre ma famille et les études. Mais non, c'est une simple fille que je connais depuis maintenant un peu plus de trois ans qui me met dans tous mes états. Ma conscience continue de me souffler que je suis pathétique de me mettre dans un tel état pour elle mais c'est plus fort que moi.

Je voudrais tellement me rattraper pour tout le temps que l'on a perdu inutilement tous les deux. Si j'avais été moins buté et écouté Cédric qui me répétait de rappeler Cassandra, si j'avais été moins aveugle, j'aurais pu comprendre que la lettre ne venait pas d'elle. Maintenant qu'elle m'a juré n'avoir rien répondu à mon mot, un poids s'est soulevé de ma cage thoracique. Un poids qui, même si je ne m'en rendais pas compte, m'empêchait de respirer pleinement.

Elle doit me trouver bipolaire à cause de mon comportement. Moi-même je commence à m'interroger sur mon état mental. Parfois je me trouve un semblant lunatique. Bien que je me remémore de façon floue la personne que j'étais à Barrows avec Cassandra, je me souviens que j'étais assez protecteur et presque gentil une fois que je m'ouvrais aux autres. Avant et après elle, je me suis refermé sur moi-même jusqu'à inspirer la crainte et le mystère. Et maintenant, plus les jours passent et plus mon masque de froideur se fissure. Il est à deux doigts de se casser entièrement, et ne plus avoir de protection, ça, ça m'effraie.

— Cart' ? Tu viens m'aider avec les poids ? m'appelle Jayden sous sa barre d'haltères.

Je grogne un « j'arrive » et écrase ma cigarette dans la coupelle posée sur une des étagères de la salle de sport. J'ai également connu plusieurs phases niveau cigarettes. Si à Barrows, je fumais à outrance avec Jérémy, je me suis calmé lorsque je suis sorti avec Cassandra, cette dernière ne supportant pas son odeur. Quand Aaron est décédé, j'ai repris, trois fois plus jusqu'à en tousser toute la journée. Après un court séjour à l'hôpital, j'ai arrêté un temps, n'en achetant qu'occasionnellement. J'ai repris au début de l'année, quand Cassandra est revenue dans ma vie. Certes, je ne suis pas autant addict que Jérémy à la nicotine, mais lorsque je suis stressé ou que je traverse une période difficile, ça m'aide. En l'occurrence, je m'en suis enfilé trois rien que dans l'après-midi. Je n'imagine que trop bien la réaction de Cédric et entendre ses remontrances dans mon cerveau me fait culpabiliser. Mais pas arrêter.

— Cart' ? T'es parti où ? reprend Jayden en se redressant. Si j'avais su que tu serais autant à l'ouest, j'aurais demandé à Andrew de venir. Ou Matt.

— Andrew est toujours cloué au lit et Matt n'arriverait même pas à soulever ta bouteille d'eau sans la lâcher au passage, je lui fais remarquer en réajustant mes gants de protection sur mes poignets.

— C'est pas faux, admet-il finalement. Mais ça ne t'empêche pas de venir m'aider au lieu de penser à je ne sais quel beau cul de Berkeley.

Je lève les yeux au ciel en me positionnant de façon à pouvoir l'aider dans son soulevé de barre s'il lâche. Jayden est un chouette type, mais il peut parfois se montrer lourd, très lourd. Pas lourd dans le sens amusant comme Matt, plutôt lourd dans le sens agaçant du terme. J'ai beau le connaître depuis l'année précédente, il reste un mystère pour moi. Ce n'est pas comme si j'étais le genre à avoir de longues discussions pour en apprendre plus sur les autres, mais lui, il ne se livre jamais. Tout ce que je sais c'est qu'il a redoublé sa première année et qu'il a dû fréquenter des types pas nets au lycée. J'évite de juger sans connaître, mais ses nombreux tatouages, son air de dealer hispanique et ses muscles imposants ne m'inspirent pas une totale confiance. Surtout quand il m'a parlé d'Aaron.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant