CHAPITRE VINGT-CINQ

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Règlements de compte

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Pendant toute la soirée je suis parvenue à me maîtriser. Lorsque mon « père » m'a ordonné de m'approcher du fils de leurs concurrents, je me suis tue et j'ai obéis. Lorsque j'ai découvert qu'il s'agissait de Carter, j'ai gardé le silence. Lorsqu'il m'a invitée à danser et s'est collé contre moi, j'ai réussi à garder mes moyens. Lorsque mes sentiments pour lui sont remontés, je les ai étouffés. Lorsque mes grands-parents se sont mis à nous épier, j'ai laissé Carter les tuer de son regard de braise. Mais après que Scarlett ait fait son annonce, je ne peux plus prendre sur moi : la bombe qu'ils ont déclenchée en moi explose.

Pourtant, tout s'engageait au mieux : la joie de Scarlett me comblait de bonheur. Jusqu'à ce que je croise le regard insistant de mon grand-père, le puissant Julian Tanner. De là où je me tiens, je peux y lire les menaces sourdes qu'il m'adresse. Je peux presque l'entendre me dire : « Rapproche-toi de ce garçon, peu importe ce que ton esprit et ton cœur te disent parce que si tu ne récoltes pas les informations que je t'ai réclamées, tu peux dire adieu à ton argent, à ton nom et au futur prometteur de ton cousin. »

C'en est trop pour moi : j'éclate. Je leur aurais bien lancé leur foutue dinde à la figure mais elle est trop loin de moi pour que je puisse l'atteindre. J'opte donc pour une solution alternative. Tout en gardant mon regard azur ancré dans celui de mon grand-père qui me menace à distance, je porte mes mains à mon cou et à mes oreilles et j'en ôte les bijoux qui ornent ma tenue pour les lancer à travers la pièce dans sa direction. Je réitère mon mouvement en faisant glisser les anneaux qui entourent mes poignets jusqu'à mes paumes. Le cliquetis de l'or heurtant le sol marbré provoque un petit bruit, presque aussi aigu et délicat que le tintement de verre de Scarlett. Le son léger alerte les invités dont les plus proches se retournent vers moi, leurs yeux avides convergeant vers ma personne. Tout le monde a l'air ébahi par mon comportement, ma famille et Carter compris.

Carter qui chuchote mon prénom depuis le premier de mes bijoux opté pour me ramener à la raison. Je l'ignore, aveuglée par la rage et le dégoût qui m'animent. Je dois avoir l'air pathétique, mentalement atteinte pour avoir une telle réaction, mais je m'en contrefiche. J'en ai assez de passer pour la petite fille polie, parfaite et soumise. J'ai assez joué au jeu de ma famille. Il est temps que je leur montre la réelle moi et ce que cette véritable Cassandra pense de toute cette mascarade, de cette perfection omniprésence qui m'étouffe. J'ai besoin de m'en aller, de m'échapper de cette salle avant d'y laisser une partie de moi.

J'achève ma petite mise en scène en dénouant le ruban qui retient mes mèches de devant et le laisse tomber sur le sol en signe d'abandon. Aussitôt, les mèches de mes cheveux qui étaient plaquées derrière mes oreilles retombent en cascade devant mon visage, cachant à moitié mes yeux, que je découvre d'un mouvement de tête qui pourrait sembler hautain de l'extérieur mais qui s'apparente plutôt à du dédain.

J'adresse un dernier regard à mes grands-parents, réunis à quelques pas de moi et le sourire cinglant qui étire mes lèvres en dit long sur mes pensées. J'aurais pu leur montrer la beauté de mon majeur dénué de bague dorée, mais ils ne méritent même pas de l'admirer.

En me retournant pour prendre la direction de la porte de sortie, une dernière idée provocatrice germe dans mon esprit. Je vais passer pour une adolescente mal polie, effrontée et impulsive mais c'est l'effet escompté. Devant le regard toujours choqué des convives, je saisis les bouts de ma robe immaculée et je me penche en avant, dans une ultime révérence insolente et j'offre ma main à Carter, qui, aussi ébahi que le reste des invités, n'a d'autre choix que de m'emboîter le pas.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant