CHAPITRE QUINZE

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Virée entre filles

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Je suis en train d'enfiler mon pull fin gris lorsque la sonnerie de mon téléphone retentit, arrêtant la musique que j'étais en train d'écouter en terminant de me préparer. Il ne m'en faut pas davantage pour que je m'élance en avant et décroche sans même regarder le prénom qui s'y inscrit.

— Cassie, vous arrivez quand ? crie Kate pour couvrir le bruit des voitures qui passent dans la rue. On vous attend devant la résidence !

— On arrive, laisse-moi juste deux minutes et on sera en bas, je réponds à mon amie en me contorsionnant pour enfiler mes baskets avec une seule main.

Je l'entends grogner de l'autre côté du téléphone et je profite de son silence pour regarder l'heure sur mon réveil. Je constate sans surprise que nous sommes en retard. Si Apolline m'avait écoutée quand je lui ai dit de me réveiller à neuf heures au lieu de me laisser récupérer mes heures de sommeil jusqu'à onze heures, je serais déjà prête à l'heure actuelle.

— Dépêchez-vous, soupire Kate avec dédain. Le bus passe dans dix minutes et on doit encore marcher jusqu'à l'arrêt.

— Promis, on se dépêche, lancé-je rapidement en raccrochant.

Je vérifie une dernière fois que j'ai tout dans mon sac à main – argent, mouchoirs, déodorant, pochette de sécurité et téléphone sur mode vibreur – et je sors de ma chambre en veillant bien à fermer la porte à clé. On ne sait jamais si Carter ou quelqu'un d'autre décide d'aller faire un tour, il vaut mieux être prévoyant.

Guidée par la voix portante d'Apolline qui s'élève du salon, je traverse le couloir pour la retrouver. Pour son dernier jour des vacances de la Toussaint à Berkeley, nous voulions faire une activité ou une sortie entre-nous pour faire le plein de souvenirs heureux auxquels nous rattacher jusqu'à notre prochaine rencontre. Nous avions penser à une après-midi dans la nature, sur un point culminant de San Francisco où nous aurions une vue parfaite sur le Golden Gates, pont emblématique de la ville, mais quand Kate et Joy nous ont proposé de les accompagner au centre-ville, nous avons accepté. Plus on est de fous, plus on rit après tout.

Même si je ne connais pas le planning de la journée en détail, je suis certaine qu'elle va être superbe. Et puis je pourrai en profiter pour m'approvisionner en livres. Ma bibliothèque à Berkeley est encore trop vide, comme Apolline s'est faite un plaisir à me le faire remarquer. Je manque de classiques de la littérature anglaise – et surtout de la saga Harry Potter que je n'ai pas apportée avec moi par soucis de place dans mes valises. Se rendre avec elle dans une librairie est une vraie aventure. Entre moi qui m'arrête tous les cinq livres pour humer l'odeur des pages et elle qui lit tous les résumés et remplit ses bras jusqu'à ne plus y voir clair, Kate et Joy risquent d'être effrayées. Tant pis car après tout c'est notre grain de folie qui fait notre charme.

Une fois devant la porte à moitié close du salon, j'hésite à entrer, freinée dans mon avancée par la voix coupante de ma meilleure amie. Je pense que je suis d'abord surprise par son ton dénué de chaleur, elle qui d'habitude parle avec joie et passion et que c'est à ça qu'est due mon hésitation.

— Sérieusement, Carter, tu ne peux pas sortir de ton mutisme cinq secondes pour nous expliquer pourquoi tu es comme ça ?

Sa voix bien que calme et posée – trop à mon goût si son destinataire est Carter – est tranchante et lourde de rancune et de colère. Un marmonnement sourd dont je suis incapable de discerner un seul mot lui répond. Poussée par la curiosité, je ne frappe pas et m'approche de la porte pour y coller mon oreille droite. Peut-être qu'Apolline aura plus de chance pour obtenir des explications avec Carter que je n'en ai eues.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant