CHAPITRE 24

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Seona

Ce baiser est interdit et assoiffé. Le bruit des vagues accompagne nos souffles irréguliers et cette mélodie est trop douce pour mes oreilles. Ses doigts viennent se poser délicatement sur ma joue, frissonnant à son passage. Puis sans faire attention, nous basculons sur le sable. Je suis désormais allongée et il est au dessus de moi. Son torse vient s'appuyer sur mes seins, ce qui me donne le vertige. Je n'ai jamais autant eu envie de quelqu'un. Sa barbe me pique un peu mais c'est étrangement bon. Sensuel. Ce baiser en veut plus.

Il caresse la courbe de mes formes, pendant que je dessine avec mon index la peau de son ventre. Je rentre discrètement sous son tee-shirt, et la sensation de ma peau nu contre la sienne m'excite au plus au point. De l'autre main, je descend jusqu'à ses fesses en les empoignant doucement, quand il se retire de moi soudainement. Je reprend un peu mes esprits, et me relève sans rien dire.

Je ne comprend pas trop ce que j'ai fais de mal, alors autant rester silencieuse.

J'ai l'impression que nous sommes deux âmes complètement contradictoires qui n'arrivent pas à s'apprivoiser. Lui c'est le blanc, et moi le noir. Il est la glace et je suis le feu. Rien ne nous lie, mais la connexion est là.
Elle est inévitable.

- Pardon, chuchoté-je en remettant une mèche de cheveux derrière mon oreille.

- Ne t'excuses plus jamais, me répond t-il.

J'aime qu'il me dise ça à chaque fois que je m'excuse. J'aime qu'il soit si mystérieux, si froid. J'aime qu'il me laisse être qui je veux. J'aime qu'il ne me juge pas.

- Raconte moi, dit-il d'un coup.

- Te raconter quoi ?

- La mort de ton père.

Je m'attendais à tout, sauf à cette question. Jamais je n'ai raconté à qui que ce soit ce qu'il s'était passé le jour de sa mort, pas même à Adam. Ça a toujours été trop douloureux. Mais aujourd'hui, je me sens prête à en parler. Enfin, je crois.

- C'était il y a un peu plus de deux ans, commencé-je. Ce soir là, mes parents avaient préparé le dîner tout les deux, ce qui m'avait particulièrement étonné d'ailleurs, étant donné leur relation.

Je marque une petite pause pour rire ironiquement, puis reprends :

- Pendant le repas, je sentais que quelque chose clochait. Ils avaient bu. Trop bu.

Il me scrute avec insistance, donc je pose mes yeux vers l'horizon.

- Mes parents ont commencés à s'engueuler. J'étais entre les deux, je ne savais pas quoi faire. Alors j'ai hurlé sur ma mère pour qu'elle se taise. Je me suis prise une gifle, puis mon père a...

Je marque une courte pause, puis reviens :

- Il a tenté de me défendre.

Je ravale mes larmes, bien que je sois étonnée de réussir à le faire sachant que j'en parle pour la première fois.
- Et ensuite ? Demande t-il.

- Et ensuite, mon père a pris ses clés de voiture, et c'est la dernière fois que je l'ai vu. Après lui, ma mère s'est barrée aussi. Je ne sais même pas où, mais elle est partie. J'ai passé le reste de la soirée à tout ranger et nettoyer, attendant qu'ils rentrent tout les deux. Ma mère est réapparue dans la nuit, mais pas mon père.

- Comment tu as su, alors ?

Je soupire.

- Le lendemain matin, vers 6h, ma mère est descendu à toute vitesse dans le salon où j'avais passé ma nuit. Elle pleurait, le téléphone à son oreille. Je ne saurais pas l'expliquer, mais à ce moment là, j'ai compris.

- Je suis désolé, prononce t-il.

Je sens que je suis au bord de la crise de larmes, tandis qu'il prend mon menton avec ses doigts pour m'obliger à le regarder.

- Sincèrement, rajoute t-il.

Des larmes s'échappent contre ma volonté et il les rattrape en plein vol. Ce geste me fais fermer les yeux pour ressentir le moment au plus profond de moi. C'est donc ça, l'amour ?

Gabriel attend un peu avant de me donner la main, et nous partons ensemble jusqu'à la maison.

Il est temps de rentrer.

*****

«  Je vous laisse encore tranquille ce soir. Je dors chez Simon. Faites attention à vous, je vous aime tout les deux. Sauf toi Gabriel quand tu me laisse un tas de vaisselle.

Bisous les amoureux. »

Le mot que mon cousin nous as laissé sur la table du salon nous fait lâcher un petit rictus.

- Je vais me laver moi, me préviens Gabriel en enlevant ses chaussures. Je suis plein de sable.

Sa dernière réflexion me ramène à notre baiser, qui me donne un goût d'inachevé.

Je l'observe s'avancer jusqu'à la salle de bain, me faire un clin d'œil et refermer la porte derrière lui.

Une fois que j'entends l'eau de la douche se déverser, je prend mon courage à deux mains pour aller le rejoindre. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive à prendre autant d'initiatives le concernant, mais je crois vraiment que la soirée que j'ai passé hier m'a ouvert les yeux : je suis la maîtresse de ma propre vie.

Je marche à tâtons dans le couloir, et arrivée devant la porte, je presse la poignée. Je suis rassurée de voir que Gabriel n'a pas fermé à clé.
J'entre dans la pièce pleine de buée, et referme délicatement derrière moi. Il ne me voit pas, puisque la douche est tout au fond, après le lavabo. Alors je commence à me déshabiller sans faire de bruit, m'imaginant sa réaction quand il va me voir l'accompagner alors que je suis nue, me demandant également ce à quoi il doit ressembler. Je m'active pour insérer mes affaires sales dans la panière à linge quand quelque chose derrière le bac me stoppe immédiatement.

Tout dans ma tête se relie, tout fait sens. Les crèmes protectrices dans la douche, le fait qu'il ne porte que des joggings même sous une chaleur incroyable, sa façon de nous arrêter tout à l'heure sur la plage car je descendais trop bas sur son corps.
Je ne sais pas comment je n'ai pas pu le remarquer plus tôt, alors que je passe mes journées à le mater. Et je ne comprend pas pourquoi il ne m'en a pas parlé aussi.

Je rebrousse chemin sans me faire remarquer, me rhabille en vitesse et l'attend dans le canapé.

Sa prothèse de jambe à la main.

À la nuit tombée Where stories live. Discover now