CHAPITRE 57

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Gabriel

Je ne sais même pas depuis combien de temps nous nous trouvons ici, à attendre patiemment que la mère de Seona aille se coucher. Les courbatures dans mes cuisses et mon mal au ventre m'appuient un peu trop depuis que nous sommes allongés sous ce lit, à plat ventre. Mais ces douleurs ne valent pas l'angoisse qui nous envahit, Seona et moi, depuis le début de cette visite surprise. Ce n'est même pas réellement une visite surprise, en fait, puisque c'est nous qui ne devrions pas être là.

Je caresse le cou de Seona depuis, je pense, une bonne dizaine de minutes, car ses larmes n'arrêtent pas de couler et je ne sais pas quoi faire de plus pour la soulager, ou la rassurer.

Sa mère n'est pas une seule fois venue dans cette chambre, à tel point que je me demande si nous ne ferions pas mieux de se cacher ailleurs qu'ici, sous ce lit rempli de poussières. C'est bête, mais je n'ose pas la froisser. Je préfère alors ne pas sortir un mot, me contentant de poser mon menton sur mon bras que je peine à mettre devant moi.

Le silence règne entre nous depuis que des pas se sont fait entendre dans le couloir, alors j'ai pu examiner le sol de cette chambre.

Elle est presque plongée dans le noir, m'indiquant que la nuit ne va pas tarder et que par conséquent, Karaba la sorcière va enfin aller au lit. Malgré la nuit qui pointe le bout de son nez, je distingue à côté de la porte un dressing, pas énorme, mais ouvert. Il y a des sacs tout en bas, enfin du moins, c'est tout ce que j'arrive à voir, ainsi qu'une table de chevet en bois repeinte en blanc, juste derrière les pieds de Seona. De mon côté, un miroir aux contours noirs est adossé sur le mur et la fenêtre le sépare d'un meuble en bois. Je me souviens qu'en entrant, j'ai vu des affiches de films recouvrir le mur. Alors bien sûr, je ne les vois pas de là où je me trouve, mais je sais que je les ai vu.

- Tu zieutes ma chambre ? Me murmure Seona vraiment très bas.

- Ouais, dis-je sur le même ton en remarquant qu'elle vient de sécher ses dernières larmes.

Elle tente de se caler sur le côté afin de me faire face, mais son crâne heurte contre le sommier :

- Aïe, lâche t-elle.

Même quand elle a mal, elle chuchote.

- Ça va ? M'inquiète-je immédiatement en touchant sa blessure.

Elle hoche la tête pour me rassurer et je repose la mienne que j'avais levé par pur instinct.

Nos yeux rentrent en contact, et il m'est impossible de les enlever d'elle.

Nous sommes tout les deux là, couchés l'un face à l'autre, sur le côté, chacun avec une main tenant sa tête pour qu'elle soit légèrement surélevée. D'un coup, je souris :

- Qu'est ce qu'on fout là, putain..

Pour la première fois depuis qu'on est là dessous, et malgré le fait que je commence à plus très bien la voir, elle me sourit en retour.

D'un mouvement, je prend mon courage à deux mains et me rapproche vivement de son visage. Je ne devrais pas, ce n'est pas du tout le moment, mais son expression semble changer au moment où mon nez touche presque le sien. Comment quelque chose de si simple peut faire autant de bien ?

Quand je la vois fermer les yeux, je ne peux pas m'en empêcher.

Ma bouche se pose alors très délicatement sur la sienne, et je goûte à ses lèvres qui me semblaient interdites la nuit dernière. Notre baiser est doux, lent, simple. Aussi réconfortant que plaisant. C'est comme déguster une bonne glace en pleine chaleur, et j'en dégouline de soulagement. Mon souffle s'accompagne à nos lèvres qui s'apprivoisent et le sien fait de même. Ce que je ressens contre ma poitrine est bien plus fort que n'importe quoi d'autre. Je me sens en entier, et c'est une étrange sensation.

À la nuit tombée Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin