Awake

Chapitre 37

[The sweet dream has broken, I closed my eyes. This is the real you and this is the real me.]

J'ai fermé les yeux, pur réflexe à cause de la peur et pourtant, les pas de Yoongi se sont arrêtés net et je me suis retrouvé dans ses bras. Il a enfoui sa tête contre mon torse tout en me serrant avec plus de force que je ne l'en croyais capable. J'ai répondu à son étreinte, une larme roulant sur ma joue, heureux de le retrouver, enfin. Car à ce moment-là j'ai su. J'ai su que ces retrouvailles étaient enfin les bonnes. Que tout était réel et qu'il était bien là, devant moi. Quand il s'est enfin écarté, il a essuyé ses propres larmes et s'est passé une main dans les cheveux, comme gêné par cette accolade.

Pas de doute, c'est bien Yoongi. Et tandis que nous nous observons de la tête aux pieds depuis plusieurs minutes pour nous assurer que tout ceci est bien réel, je ne peux m'empêcher de sourire. C'est le premier sur les six mais c'est déjà une grande victoire. Victoire que je ne peux pas expliquer pour le moment. C'est d'ailleurs curieux que je lui demande :

— Quel est cet endroit ? Où sont les autres ?

Aussitôt son visage s'obscurcit et il se tourne vers les six portes du couloir. Le soupir qu'il lâche est douloureux. Mon cœur s'accélère.

— Viens. Tu ferais mieux de t'asseoir, lâche-t-il en se dirigeant vers la seule porte qui est ouverte.

Je le suis, observant toutes les autres, intrigué. Sur chacune d'elles, des noms. Jungkook, Namjoon, Jimin, Taehyung, Hoseok et pour finir, celle de Yoongi qui me laisse apercevoir un piano. J'entre dans ce qui semble être une boutique d'instruments et mon cerveau met un moment avant de se souvenir de cet endroit.

— C'est la boutique où tu adores aller ! Je m'exclame en me dirigeant déjà vers une guitare fixée au mur.

Je le vois hocher la tête et s'asseoir sur un petit tabouret, attendant vraisemblablement que j'en fasse de même. Je décide de m'installer sur le banc en face du piano et me tourne vers lui.

— Comment se fait-il que tout ça soit là ? Je demande sans pouvoir y croire.

Il claque sa langue contre son palet, tique avec lequel nous aimions le charrier au sein du groupe, puis me montre le piano.

— Je me suis réveillé là, sur le banc où tu es assis. Je crois que ça fait plusieurs jours que j'attends, je ne sais pas, j'ai perdu la notion du temps.

— Tu attends quoi ?

— Que vous vous réveillez. Tous.

Je fronce les sourcils tandis qu'il m'explique que je suis le premier à le rejoindre et que tous les autres sont encore dans leurs pièces.

— Il va falloir que tu sois plus précis Yoongi, je lâche avec un rire nerveux. Quelles sont ces pièces et cet endroit ?

— J'allais y venir hyung, laisse-moi le temps d'abréger tu veux ? Me dit-il en levant les yeux au ciel. (Il soupire puis se lève, fourrant les mains dans les poches de sa veste tout en venant s'appuyer contre le piano.) Tu étais dans une pièce toi aussi, à quoi ressemblait-elle ?

— C'était ma chambre.

-- Et est-ce que c'est un endroit que tu as souvent vu ces derniers temps ? Que ce soit sous sa forme originale ou sous une autre forme ?

Je hoche la tête tandis qu'il semble réfléchir. Il fixe le sol un moment et je lui laisse le temps de revenir à la réalité.

— C'est bien ce que je pensais, dit-il en m'observant de nouveau. Moi c'était cette pièce à laquelle j'étais ancrée. Parfois je la voyais brûler, d'autres fois elle explosait ou bien ça m'est arrivé qu'au lieu du magasin ce soit la pièce de l'école mais à chaque fois il y avait ce piano. Celui de ma mère... (Ses yeux se mettent à briller et je le vois déglutir difficilement. Mais il poursuit :) J'ai cru que je nageais en plein délire, que j'avais trop bu, trop fumé. Mais tout a semblé aller mieux quand j'ai commencé à vous voir. Après ça, ça a été l'enfer. J'ai vite compris que vous n'étiez pas vraiment là et que vous finissiez toujours dans des situations horribles ou carrément par mourir. J'imagine que ça a été à peu près la même chose pour toi ? (J'acquiesce et il acquiesce à son tour.) Ouais, c'était logique. Je crois que j'ai eu un déclic en me souvenant de quelques détails sur ma mort et ensuite je me suis réveillé ici. J'ai essayé d'entrer dans vos pièces pour vous réveiller mais c'est impossible. Je crois qu'on doit tous accepter la vérité pour pouvoir sortir de ce cauchemar.

Je mets un moment à assimiler ce qu'il vient de m'apprendre. Alors comme ça il a vécu la même chose que moi ? Dans cette pièce ? Cela veut-il dire que les autres vivent actuellement tout ça ? Qu'ils se battent pour survivre et pour nous sauver ? Je n'y crois pas, c'est inimaginable. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que nous vivons cela ? Comment ai-je fait pour me réveiller ? Et quelle est cette vérité dont Yoongi a parlé ? Celle qui peut mettre fin à tout ?

Déboussolé, je me lève et commence à faire les cent pas.

— Je ne comprends pas... (Je fais des allers-retours avant de me stopper devant mon frère, bien décidé à avoir le fin mot de l'histoire.) Yoongi, c'est quoi la vérité ?

Il détourne le regard et retourne s'asseoir sur son tabouret, l'air triste. Je le rejoins, restant debout en attendant patiemment qu'il me réponde. Peu importe ce qu'il va me dire, je veux simplement comprendre pourquoi nous avons subi cela et dans quel but. Pourtant lorsque Yoongi se met à parler, je chancelle et me tient au mur, choqué.

— On est tous morts hyung, m'a-t-il révélé dans un murmure. Tous.