Chapitre 50 - Partie 1/2

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­Sa rééducation se passait à merveille. Elle faisait même assidûment ses exercices à l'appartement, chose que je n'avais jamais fait. Ma jambe me le faisait déjà payer par moment alors sans vouloir la harceler, je l'encourageais régulièrement à pratiquer ses étirements devant la télé ou en attendant que le repas soit prêt. Et à ses réactions toujours conciliantes, je ne pouvais que m'estimer heureux qu'elle n'ait pas le même comportement que moi. Je rentrais du boulot à des heures assez raisonnables pour pouvoir passer du temps avec elle le soir. Je savais que ses journées étaient longues en mon absence, sans travail et qu'elle tournait vite en rond. Alors je prenais des pauses régulières pour échanger des messages avec elle et tenter de la distraire un tant soit peu. Je m'étais mis aux fourneaux pour mais elle avait vite voulu reprendre la main parce que ça l'occupait. Et je devais reconnaître qu'il y avait quelque chose d'agréable à n'avoir pas besoin de cuisinier ni le midi ni le soir. Pour autant, il y avait une contrepartie à ses talents de cuisinière : j'étais en charge de la totalité du ménage. Il aurait été barbare de lui demander de le faire ou même de m'aider alors qu'elle était blessée. Sa plaie était bien sûr cicatrisée depuis le temps mais son os avait tardé à se reconsolider et sa jambe avait par conséquent perdu en mouvements et en souplesse. La nuit elle ne dormait qu'à peine et quand elle y parvenait, son sommeil était très agité. Souvent, quand je me levais le matin, relativement tôt, elle était déjà dans le salon, parfois rendormie sur le canapé. Et même si je la voyais faire des efforts pour manger, il n'était pas difficile de comprendre qu'elle n'avait pas d'appétit. Et je ne voulais pas la brusquer, alors je la laissais manger à sa piètre faim.

Une nouvelle fois mon père décida de se joindre à nous, le temps d'une soirée, afin de s'enquérir de l'état de santé d'Aly et de l'avancée de notre situation. Je le sentais excessivement perturbé et inquiet quant à tout ce qu'il s'était passé ces derniers mois, mais qui ne l'aurait pas été face à cette situation. Nous étions sortis nous promener pour les premiers beaux jours de l'année, sous un soleil à peine chaud mais un ciel bien bleu qui faisait du bien au moral. Aly n'utilisait plus qu'une seule béquille en temps normal mais avait fait le choix de sortir sans pour notre promenade, malgré sa faiblesse apparente. Après tout, nous nous promenions au bas de l'immeuble, tout près de l'appartement. Si elle avait trop mal, j'étais en mesure de la porter pour rentrer et puis mon père était présent également. Nous marchions à son rythme, ralentis par ses petits pas. Machinalement et comme pour lui apporter tout le soutien dont j'étais capable en cet instant, je lui attrapai la main pour marcher à ses côtés. Je vis mon père sourire à cette image, avant qu'il ne fronce les sourcils en regardant Aly.

— Tu te sens bien Aly ? s'enquit-il.

Sans attendre je jetai un coup d'œil à Aly, étrangement pâle. Elle acquiesça simplement, le regard pourtant au loin. A l'instant où elle hocha la tête, je vis un liquide teinté de rouge s'échapper de l'une de ses narines. Je n'eus pas le temps de réagir que mon père intervint :

— Fais la s'asseoir.

Pourtant, avant même que je n'aie eu le temps d'esquisser un mouvement, ses jambes se dérobèrent sous son corps. Alors que mon père se jetait vers nous, je la rattrapai avant qu'elle ne tombe au sol pour l'accompagner dans sa chute et la déposer au sol. Il me sembla que mon père me disait quelque chose mais mes yeux étaient rivés sur son visage pâle et son corps inanimé. A bien écouter, il l'appelait pour tenter de la faire réagir. Puis il vint mettre des petites tapes sur ses joues. Au bout de quelques secondes, qui me parurent interminables, elle rouvrit faiblement les yeux. Le soulagement s'empara de moi et le « porte la, on rentre » de mon père me parvint malgré tout aux oreilles. Sans attendre, je la saisis en faisant attention à sa jambe. Elle passa ses bras autour de mon cou mais avec une telle force que si j'étais amenée à la lâcher, elle tomberait immédiatement. Mon père fit une halte à sa voiture et attrapa un sac en bandoulière avant de récupérer mes clés dans ma poche pour pouvoir ouvrir les portes à mesure que j'arrivais. Je grimpai les marches sans ménagement jusqu'à la déposer sur le lit après qu'il eut ouvert la porte. Il commença à lui poser quelques questions pour tester son niveau de conscience. Ses réponses étaient bonnes à chaque fois, mais sa voix semblait faible. Je vis passer un stéthoscope, un thermomètre, puis il lui prit la tension, grimaçant sans se cacher.

Souviens toi !Where stories live. Discover now