Souviens toi !

Chapitre 20

            — Il faudra que j'aille récupérer mes affaires, finit-elle par me dire en jetant les boites en carton à la poubelle.

— Oh, j'irai ce soir, comme ça je passerai voir mon père en même temps.

— Je viens avec toi, m'informa-t-elle.

Merde. Le plan n'était pas réellement d'aller voir mon père mais de me rendre au RockUp pour régler cette situation. Je secouai la tête, de manière nonchalante.

— Tu ferais mieux de rester ici pour te reposer.

La grimace sur son visage me fit comprendre que j'allais perdre cette manche.

— Je préfère pas... rester ici toute seule.

— Ah... Eh bien j'ai juste à passer voir un ami dans un bar avant de rentrer, t'auras qu'à m'attendre dans la voiture, tentai-je.

— Quel ami ? s'enquit-elle.

Il était vrai qu'elle les connaissait tous, mieux que moi, parce que je ne me souvenais même pas de mes propres amis.

— Un ami de mon père, glissai-je.

Et elle se contenta de soupirer à mes mots. Je doutais du fait qu'elle ait pu me croire avec cette pathétique prestation, mais au moins elle ne poserait plus de question. Je fis le choix de conduire et elle ne protesta pas, me laissant me rendre jusqu'à chez Julia avec l'aide du GPS. Celle-ci n'était visiblement pas là et Aly se contenta d'entrer pour récupérer ses affaires vraisemblablement pas éparpillées partout. Cela montrait à quel point elle avait espéré que cette situation soit temporaire et de courte durée. Après qu'elle eusse attrapé deux sacs, je la regardai, surpris :

— Tu n'as que deux sacs ?

— Oui, j'avais beaucoup d'affaires chez toi et le reste était resté chez ma mère.

Je me contentai de cette réponse, récupérant l'un des sacs au passage avant de regagner la voiture. Elle se chargea de mettre la clé de Julia dans sa boîte aux lettres et je réalisai qu'elle tournait cette page pour venir s'installer chez moi. Il n'était donc pas question que je la remette dehors ou que je change d'avis comme j'avais eu tendance à le faire ces derniers temps. Puis je démarrai, rentrant le RockUp dans le GPS sans dire un mot de plus. Il était un peu plus éloigné du centre ville que je ne l'avais pensé mais elle n'en pensa rien, ou du moins, ne m'en fit pas part. La fréquentation devant le bar n'avait pas l'air des plus fréquentables. Moi qui avait compté lui demander de rester dans la voiture, je me sentais finalement plus à même de la protéger si elle venait avec moi dans l'établissement.

— Je t'attends là ? me demanda-t-elle.

Clairement, elle voulait savoir si j'en aurais pour longtemps. Or, j'étais incapable de lui fournir une réponse à ce propos.

— Non, viens avec moi, je préfère.

Elle se contenta d'acquiescer et de sortir de la voiture pour me rejoindre. En même temps, elle était toujours habillée comme hier, tout de noir vêtue avec son petit décolleté et son maquillage semblait n'avoir pas bougé, ni avec le sommeil, ni avec ses larmes nocturnes. Et à en juger par les regards sur notre passage, la faire venir avec moi n'était peut-être pas non plus la meilleure des initiatives.

La musique à l'intérieur du bar n'était pas très forte et il était moins plein qu'il n'y paraissait depuis la rue. Pour autant, ce n'était pas un bar que les jeunes femmes choisissaient pour venir boire un coup entre amies, cela ressemblait plus à un repère de gangs qu'autre chose. Je m'approchai du comptoir en n'ayant en tête que le nom que m'avait fourni Luc. Si même je m'adressais à cette personne, je n'en aurais rien su. Me penchant par-dessus le comptoir, Aly non loin de moi, je me contentai de le demander :