Souviens toi !

Chapitre 18 - partie 2/2

Mes yeux étaient rivés sur Aly qui recrachait la fumée de sa cigarette comme si c'était un geste parfaitement naturel. Peut-être l'était-ce... Elle leva les yeux et se chargea de répondre.

- C'est un mec qui a voulu jouer les chevaliers servants et a cru qu'il savait mieux ce qui était bon pour moi. Ça ne se reproduira plus, répondit-elle.

Même cette voix, je ne la lui reconnaissais pas, cette assurance, cette façon de s'exprimer.

­- Tu cherches un travail ? me demanda-t-elle alors.

Surpris j'entrouvris les lèvres et alors qu'Aly clamait un « Non » magistral, un « Oui » passait mes lèvres. Elle nous observa l'un puis l'autre.

- Oui ou non ?

- Oui, répondis-je en toisant Aly du regard. A une condition.

La femme parut surprise et secoua la tête, finalement amusée.

- T'es pas encore embauché mon beau, mais ça me plait, j'écoute.

- Que je remplace Aly. Et je suis prêt à faire plus d'extra.

- Non, répondit Aly. Je dois continuer...

Si sa patronne ne l'avait pas interrompu, je l'aurais très certainement fait.

- Oh allez Aly, tu sais très bien que ça n'est pas bon pour toi. Je le vois pour ton poignet. Alors même si tes beaux yeux et ton sourire sont très convaincants et plaisent, ton ami pourra sans aucun doute faire de l'effet aussi. A la différence qu'il a très visiblement besoin de moins de sommeil que toi. Tu finis ton service et à partir de là je ne veux plus te revoir avant d'avoir une attestation d'un médecin qui me certifie que tu es totalement apte à faire du service. En attendant,...

Elle m'observa, attendant très certainement que je lui indique mon prénom, ce que je fis devant la mine déconfite d'Aly.

- Matthieu.

- En attendant Matthieu se chargera de prendre tes shifts. T'as de l'expérience ? me demanda-t-elle.

- Extras depuis 6 ans à l'Austra, répondis-je.

Un sourire satisfait éclaira son visage alors que celui d'Aly apparaissait soudainement surpris.

- Demain 19h, ici, me lança-t-elle. Repose toi bien Aly.

Sans attendre une réponse de sa part elle disparut et j'observai Aly, satisfait et plus encore fier de ma victoire. Pourtant, cet air déconfit ne la quittait pas.

- Qu'est-ce qui a ? demandai-je.

- Tu te souviens de l'Austra ?

Je m'apprêtais à lui répondre « oui » de manière évidente pourtant, je réalisai que ce n'était pas nécessairement quelque chose dont je me souvenais avant cela. J'entrouvris les lèvres et un sourire prit place sur mes lèvres, reprenant une bouffée de fumée en même temps qu'elle, dans une sorte de sentiment de libération.

- Tu te rends compte que tu viens de me faire perdre un emploi ? s'énerva-t-elle.

- Tu te rends compte que je viens de sauver ton poignet ? répondis-je.

- Oh c'est bon, ne joue pas les anges gardiens ou je ne sais quoi, tu n'avais aucun droit de faire ça. Tu n'avais pas le droit de venir ici, ni de faire mon travail à ma place contre mon gré, et encore moins de demander à ma patronne de prendre ma place.