30 - Rachel - Premières larmes

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Dany était endormi, emmitouflé sous la couette. Dans la pénombre, son teint était pâle comme celui d'un mort et les cernes sous ses yeux clos étaient comme des poches d'obscurité qui lui mangeaient le visage. Sa mèche châtain tombait piteusement sur son front et le blanc de l'oreiller.

Son rêve d'apparence agité faisait bouger ses globes oculaires sous ses paupières pâles et siffler sa respiration.

- Chut... murmurai-je en avançant ma main pour écarter ses cheveux raides de son front trempé de sueur.

Il grommela dans son sommeil sans ouvrir les yeux et s'apaisa un peu.

Il semblait si faible, si vulnérable, qu'on aurait cru un enfant malade. Pas un fou qui se plaisait à tuer. Il paraissait juste... innocent.

Et il était beau. Pas à la façon classique de Newt, mais d'une manière presque sauvage. Comme si même son physique reflétait sa volonté de ne pas suivre les règles de la Cité, où tout le monde devait rentrer dans un moule. Hautaine ou sage, voilà les deux possibilités dont la beauté d'un adolescent normal pouvait être. Mais Dany n'entrait dans aucune catégorie quel que soit le critère.

Je continuai à lui caresser doucement la joue, comme ma mère me le faisait quand j'étais petite et que je n'arrivais pas à dormir. Le rythme de sa respiration se calma un peu.

- Noémie... marmonna-t-il.

- Chut...

- Noémie... Je n'arriverai pas la sauver.

Il me fallut cet instant pour me rendre compte qu'il était réveillé, mais le temps que je comprenne qu'il valait mieux que je retire ma main de sa joue, il avait posé la sienne dessus, m'indiquant de la laisser là.

- Ne dis pas ça...

Ses paupières s'entrouvrirent, laissant apparaître ses magnifiques yeux verts entre ses cils. Je frissonnai de notre proximité malgré la couette qui nous séparait, étant allongée moi-même sur le dessus-de-lit.

- Tu sais que j'ai raison... soupira-t-il d'une voix rocailleuse avant d'être pris d'une petite quinte de toux. Même si je survivais suffisamment longtemps pour la retrouver... comment pourrais-je assurer sa sécurité ? Quand les types de la Société comprendront que je ne suis plus un danger, elle sera sûrement acceptée parmi eux, et qui sait ? Peut-être y sera-t-elle heureuse. Elle ne l'a jamais été avec moi...

Je regardai avec compassion une larme s'écouler de son œil et tomber sur l'oreiller.

- Ce n'est pas de ta faute... chuchotai-je.

- Bien sûr que si. On ne peut pas forcer quelqu'un à aimer... Je le vois maintenant.

Comme il n'y avait rien à répondre je ne dis rien, et me contentai de le fixer.

- Mais il faut quand même que je trouve un portail...

- Dany, soupirai-je, tu n'es pas en forme pour...

- Je ne peux pas te laisser seule... gémit-il en fermant les yeux à nouveau, sans doute sous la douleur.

Je me tus pendant de longues secondes, sentant mon cœur se broyer lentement dans ma poitrine. Pourquoi était-il soudain gentil avec moi, alors que j'avais déjà de plus en plus de mal à le détester ? Alors qu'il allait... mourir ?

- Ça ne se voit peut-être pas comme ça, articulai-je avec difficulté, mais je peux être débrouillarde. Je trouverai moi-même, tu n'es pas en état de chercher.

MarquésWhere stories live. Discover now