22 - Newt - Liana

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J'interceptai Ella alors qu'elle sortait de l'hôpital. Elle se tenait droite comme toujours, mais les cernes sous ses yeux perdus dans le vague témoignaient de son réel état d'esprit. Son air devait refléter le mien. Elle posa son regard sur moi pour le détourner aussitôt, puis passa devant moi et se mit à marcher à grand pas dans le couloir carrelé, si bien que je dus presque courir pour la rattraper.

- Ella... Il faut qu'on parle.

- Je n'ai pas envie de discuter avec toi, me coupa-t-elle sèchement.

- Est-ce que... Alex va bien ?

- À ton avis, imbécile ?

À la vitesse où elle avançait, nous étions déjà presque sortis du bâtiment.

- Je suis vraiment désolée, Ella...

- Non, tu ne l'es pas. Tu ne comprends pas.

- Ma mère a été arrêtée quand j'avais huit ans, insistai-je. Je sais ce que ça fait de perdre un proche.

Nous étions dehors, fouettés par les feuilles mortes emportées dans le vent, quand Ella s'arrêta brusquement et me poussa vers le bâtiment. Je me retrouvai plaqué contre le lierre avant même d'avoir le temps d'être surpris. À croire que ça devenait une habitude.

- Tu ne comprends pas, répéta-t-elle en me fixant de ses yeux noirs trop près des miens, une main appuyé contre mon torse. Arrête de me parler, notre... alliance, ou peu importe ce que c'était, est finie.

Sur ce elle me laissa planté là comme un abruti et s'enfuit entre les arbres. J'hésitai pendant une seconde à la suivre puis renonçai : premièrement car elle m'avait l'air beaucoup trop remontée pour tenir une conversation civilisée, deuxièmement parce qu'elle devait connaître les environs un petit milliard de fois mieux que moi, vu qu'elle vivait ici. Je ne parviendrais jamais à la rattraper.

Je choisis également de laisser Alex tranquille. Avec le choc qu'il avait dû subir dès son réveil, lui qui n'était déjà pas très ouvert à la discussion, il valait sans doute mieux lui laisser un peu de temps pour digérer.

Je me dirigeai donc de nouveau vers le bâtiment appelé école. Heureusement, le chemin pour y accéder n'était pas très compliqué, puisqu'il suffisait de suivre la route. J'arrivai avant la sonnerie, et puisque je n'avais absolument pas envie de retourner en cours de Mathématiques affronter déjà les regards, j'allai m'asseoir sur un banc près de la porte d'entrée.

Je ne sais pas trop combien de temps je restai assis là, perdu dans mes pensées qui ne menaient à rien, le visage entre les mains. Ella, Alex. Rachel, ma mère, ma tante, même Kale, mon ami de l'Académie. Et puis Alice. Surtout Alice.

Quand je relevai le visage, mes yeux tombèrent sur celui d'une jeune fille. La surprise me fit sursauter. Elle sourit et me dit bonjour. Je répondis dans un murmure, et elle s'assit à côté de moi.

Elle était jolie, d'une manière très différente de Rachel ou Ella. La première était ravissante dans sa timidité, sa légère maladresse et sa naïveté adorable. La seconde l'était d'une manière hautaine et froide, universelle. Elle était belle parce que c'était comme ça et personne ne pourrait jamais le contredire.

La nouvelle-venue paraissait magnifique par la gentillesse qui émanait de chaque centimètre-carré de son corps telle une aura. Son sourire était si communicatif que pendant un instant j'en oubliai les évènements horribles de la veille.

Elle n'était pas très grande, sans doute une petite tête de moins que moi. Ses yeux étaient marron irisés d'or, et ses cheveux blonds, qui voletaient autour de son visage tels une auréole, captaient les rayons du soleil. Une paire de lunettes à monture fine était posée sur son nez parsemé de petites tâches de rousseurs. Sa peau était mordorée, pour une raison inconnue puisque cela faisait longtemps que le soleil s'était caché.

MarquésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant