Chapitre 17

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Je n'aimais pas les vides dans les discussions, ceux qui angoissent, qui font se sentir seul.
Et... je n'aimais pas les yeux bleus glaciers, ils étaient trop perçants, trop scrutateurs.

Voilà à quoi je pensais pendant que j'étais dans la réserve en compagnie de monsieur Liber, qui lui me fixait de ses deux lacs gelés.

J'avais battu mon record du plus long silence dans une discussion qui était de 16 minutes et 05 secondes.
Désormais il était de 17 minutes et 11 secondes.

Après que Camilla Ambitio ait quitté mon lieux de travail, le bibliothécaire m'avait demandé. J'étais donc là, entouré d'archives et de paperasses en face de l'homme qui tenait ma vie entre ses mains.

«Pourquoi?»

Je relevai la tête, je devais être ridicule à le fixer ainsi, les yeux grand ouvert, la mâchoire tombante.
Lui redevant un certain respect pour le poste qu'il m'avait donné, je répondis
«Pourquoi, quoi?»

Monsieur Liber prit un air lasse comme si le simple fait de parler était une torture pour lui et dit d'un ton fatigué
«Pourquoi n'as tu pas dit où je me trouvais?»

Pour un homme qui n'aimait pas parler, il ne faisait vraiment pas en sorte d'économiser sa parole, je bafouillai
« Je... je vous suis reconnaissante pour le travail que vous m'avez confié et pour ne pas m'avoir dénoncé aux vérificateurs alors que vous auriez pu être récompensé.»

Mon supérieur pencha sa tête sur le côté d'un air pensif comme si ma réponse méritait d'être étudiée, puis il soupira, un sourire nostalgique apparut sur son visage.
Il prononça en un lointain murmure
«Tu lui ressembles, un peu trop peut-être. Aurais tu toi aussi une vengeance à accomplir?»

Sur cette question qui n'attendait pas de réponse, il quitta la pièce me laissant seule avec pour seule compagnie les écrits du passé.

Avais je une vengeance?

J'avais assisté à la mort d'un jeune homme, il y a trois ans de cela.

J'avais fait la résolution de ne plus voir les personnes qui me sont chères avant longtemps.

J'avais quitté tous mes repères, jusqu'à changer d'identité.

J'avais faillit me faire tuer par un homme devenu fou à cause de la guerre.

Et enfin, j'avais reçu une menace de la part de Camilla Ambitio.

Pourtant, je n'avais aucune envie de me venger, j'en voulais certes à Viggo 1er et à son système politique mais je ne ressentais pas particulièrement l'envie de leur faire payer ce qu'il m'était arrivée.
Je voulais juste vivre tranquillement cette nouvelle vie qui avait mal commencée.

En quittant la salle des archives, une petite voix au fond de moi me souffla

«Qu'à cela ne tienne

comme si les échos du passé souhaitaient me ramener à la réalité.

La révolte du soleil Where stories live. Discover now