(69) Retour

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Elle était seule. Certes, Julia ne s'attendait pas à un comité d'accueil qui lui aurait préparé une fête pour l'occasion, mais elle ne pensait pas que la maison serait vide pour autant.
N'avait-elle pas prévenu Tonio de son potentiel retour?
Ils avaient préféré déserter les lieux...elle se ressaisit et décida d'aller faire un tour dehors.
Elle ne devait pas trop s'éloigner, il fallait qu'elle se tienne prête à accueillir les enfants et Fabia, mais elle ne pouvait s'empêcher de vouloir constater des changements d'ambiance.
Elle ne remarqua rien de différent sur son trajet habituel, alors elle décida de louvoyer un peu avant de rentrer.
La différence doit être plus flagrante à Rome, se répéta-t-elle, tant pour se rassurer de l'utilité de sa démarche que pour s'en convaincre.

ll n'y avait pas grand monde dans les environs, excepté quelques marchands juchés fièrement sur leurs charrettes. Ils avaient l'air paisible, mais difficile de déterminer si c'était grâce à Julia ou non. Elle se résigna à attendre l'arrivée de Fabia et celle de son époux.
Pour se distraire, elle rouvrit le livre confié par Marcus et y trouva les mots suivants "tout changement, qu'il soit important ou non, demande du temps pour être pleinement adopté".
Elle avait l'impression que tous les mots qu'elle lisait se mettaient au diapason de ses pensées, qu'ils prenaient un sens différents de celui que l'auteur avait voulu leur donner, simplement parce qu'elle ne parvenait pas à se vider la tête.
Ce qu'elle avait vécu était tout bonnement...incroyable.
Elle ne chercherait pas à convaincre quiconque qu'elle avait eu un rôle dans le retour de la paix. Elle se contenterait de conserver ce secret dans le fond de son coeur, en l'écrivant malgré tout pour ses petits-enfants.
A défaut de parvenir à comprendre correctement les assemblages de mots imposés par d'autres, elle se décida à tracer les siens.
Elle fit le récit exhaustif de ses péripéties et elle y mettait le point final lorsque l'on toqua à la porte. Fabia ou Pompée?

Pompée.
Il n'était pas tellement surpris de la voir.

"Alors, es-tu parvenue à tes fins?
-Nous avons sauvé les enfants oui, bredouilla-t-elle comme si elle en était une elle-même. Où étais-tu?
-A Rome, pour...disons pour régler une petite affaire de longue date.
-Ah bon."

Un silence désagréable s'instaura. Julia s'inquiétait de la réaction de Pompée lorsqu'il verrait Fabia. Elle était même terriblement angoissée.

"Et Tonio?
-Il arrivera sous peu, il tenait à passer voir Crassus pour s'assurer que sa soeur ne soit pas allée chez lui en premier lieu."

Cette nouvelle arracha un sourire à Julia. Il y en aurait au moins un qui tirerait de gros bénéfices de cette aventure. Il en était même l'investigateur.

"Les familles dont les enfants avaient disparus commençaient-elles à s'énerver?
-Plus que tu ne peux l'imaginer, la tension à Rome était telle qu'il était difficile de respirer sans risquer une explosion à tout instant.
-Et dans tout l'empire Romain?
-Les troupes commençaient à se diviser, les familles à se déchirer.
-J'espère que la tendance s'est inversée..."

Il acquiesça avant de désigner les feuilles restées sur la table.

"Qu'est-ce?
-Le récit de tout ce qu'il s'est produit.
-Puis-je?"

Je l'autorisais à lire, preuve d'une grande confiance.
Je me rongeais les sangs et tentait de décrypter son ressenti en fonction de son expression lorsque des coups furent à nouveau frappés.
Je m'empressai d'ouvrir. C'était Fabia. Je la pris dans mes bras puisque je pouvais enfin le faire. Elle était accompagnée de cinq enfants, ceux qui n'avaient pas de familles dans lesquelles retourner. Dont Lucia.

"Qui est-ce?"
La voix de Pompée émanait de la pièce adjacente.
Je ne pouvais pas lui dissimuler quoi que soit alors je pris Fabia par la main.

"C'est Fabia."
Autant il n'avait pas été si surpris de me voir, autant il ouvrit des yeux énormes lorsqu'il vit Fabia. Je présume qu'il n'avait pas assez avancé dans sa lecture pour que la chose soit attendue. Après les explications, il demanda simplement si elle comptait rester.
Elle répondit qu'elle n'avait pas d'autre endroit où aller.
Sa présence allait troubler Pompée, je le sentais, mais il ne pouvait décemment pas la mettre à la porte.
Puis ce fut au tour de Tonio d'arriver et il fut chaleureusement accueilli par Lucia.
Je demandais à Pompée si nous pouvions tous rester ici quelques temps, puis retourner à Rome pour s'enquérir de la situation.
La maison était pleine de vie et il ne nous manquait plus que cela.

Julia Caesaris Wo Geschichten leben. Entdecke jetzt