Julia Caesaris

(25) Départ de Rome

Ce coup-ci, c'était à Pompée d'être furibond. Décidément, Julia avait le don de faire sortir de leurs gonds les hommes de sa fréquentation...
Il la poussa sans ménagement dans la charrette qui leur servirait de moyen de locomotion entre Rome et Anzio avant de prendre la parole.

"Quelle mouche t'a piqué? T'enfuir en pleine nuit alors que nous devions partir au plus vite !
Et pour aller chez Crassus? Décidément Julia, j'ai toute la peine du monde à comprendre comment tu fonctionnes !"

Il s'était réellement fait un sang d'encre. Julia se sentit toute penaude, presque coupable de ne lui avoir rien dit. Mais si elle l'avait fait il lui aurait mis des bâtons dans les roues...et pas dans celles de cette charrette !

Cette dernière cahotait d'ailleurs très régulièrement sur la route. Les voies de transport terrestre n'étaient pas encore au point, mais c'était un luxe d'avoir quelques endroits dallés !
La pluparts n'étaient que de petits chemins de terre, comme celui que Pompée et Julia empruntaient au moment même, plus discret.

Les deux occupants du véhicule se jetèrent un regard mauvais, empli de fiel, avant de se repentir mutuellement comme mû par un besoin diplomatique. Julia fit le premier pas.

"Peut-être que si je t'en avais parlé au préalable, tu m'aurais écouté?

Chacun avait pu remarquer, Julia la première, et avec surprise, que le vouvoiement entre eux avait cédé la place à un tutoiement des plus cordial.

-Je te dois des explications Pompée, le plus tôt sera le mieux, es-tu disposé à m'écouter?"

Ce dernier dut ravaler ses propres excuses et les ajourner afin de se mettre dans de bonnes dispositions pour être pleinement attentif.
Julia lui fit un récit exhaustif des événements, des apparitions matrimoniales à ces plus récentes découvertes sur la philosophie de la guerre chez Crassus, en omettant volontairement les mises en garde de sa mère contre son époux.

Il n'eut pas l'air aussi déboussolé qu'elle l'avait escompté.

"Ton altercation avec mon père t'aurait-elle déjà appris ce que je viens de t'avouer à l'instant? S'est-elle bien déroulée?

Pompée eut l'air chagriné qu'elle posa une telle question, qui retarderait encore ses propres déclamations et l'obligeait à s'épancher sur son passé à nouveau.
Il masqua sa gêne sous un masque de déférence et répondit en souriant.

-Je ne vais pas te cacher que notre échange fut plutôt houleux...il est loin d'avoir apprécié ma décision mais a été contraint de s'y résoudre en vertu de mon pouvoir juridique sur toi. Détrompe-toi cependant, ce n'est pas ton père qui m'a appris tout ce que tu viens de me dire sur les guerres ectoplasmiques et j'en passe. Je l'ai appris avec lui, mais cela remonte à un temps si lointain que ma mémoire découvre ses propres limites..."

C'est ainsi qu'il lui narra leur rencontre avec la vieille femme au forum, cette prédicatrice de malheur qui leur avait insufflé une sacrée terreur mais dont les allégations n'étaient pas dépourvues de fondement. Manifestement.

Julia en demeura sans voix. Elle était bien loin de connaître le lien d'amitié qui unissait son père et son époux, mais elle pensait qu'il devait s'être détérioré à cause d'elle...

"Enfin, à mon tour d'admettre que je n'aurais jamais du t'obliger à quitter ta ville comme je l'ai fait. C'était égoiste de ma part de ne pas te consulter, mais sache que j'ai mes raisons."

Quelle erreur de finir sur ce mystère...Julia n'aurait de cesse de chercher ce qui avait poussé Pompée à quitter Rome à compter de ce jour.

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Bon, il fallait bien qu'ils se rapprochent un peu au bout d'un moment ces deux-là...
Quoi de mieux qu'un lieu clos comme une charrette pour cela? 😉