Chapitre 18 - Premier combat (Partie 3)

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Si la suggestion de Flore sidéra Roni, il demeura sans voix juste quelques secondes avant de s'esclaffer avec son groupe, comme s'il venait d'entendre la meilleure plaisanterie de la soirée. La tête haute, elle rejoignit l'armoire, d'où elle extirpa deux armes en bois, puis en tendit une à son adversaire, dont le rire mourut. Tous la scrutèrent, abasourdis.

Je ne suis pas folle. Il est temps de vous démontrer la valeur d'une femme.

— Flore, tu n'y songes pas ! s'exclama Yeldo en se plaçant face à elle.

— Pousse-toi ! siffla le tourmenteur. Je viens de recevoir une invitation. Je me dois de l'honorer.

— Tu sais très bien que tu gagneras ! objecta son ami, se tournant vers lui.

— Recule s'il te plaît, lui intima-t-elle. Je confirme avoir défié Roni.

Yeldo questionna Kishor du regard, qui lui signala de s'écarter et, quoique stupéfaite, Linlin n'intervint pas. Toutefois, un des garçons du groupe adverse interpella son chef :

— Si les Imlayas découvrent ce duel, tu seras expulsé ! Elle n'en vaut pas la peine.

— Personne ne l'apprendra, puisque nous sommes tous d'accord, éructa celui-ci. Je ne vais pas gâcher ce moment de prouver la faiblesse de cette femme et la faire chasser ! Je désire intégrer la tribu des combattants à la suite d'un accident provoqué par des incapables, dans lequel j'ai failli périr ; ce n'est pas pour vivre aux côtés d'une autre.

Voilà pourquoi il me tourmente, analysa Flore.

Si elle et ses amis l'avaient su plus tôt, ils auraient tenté de s'expliquer avec lui. Maintenant, il n'accepterait plus, tant il était persuadé d'avoir raison, et elle ne parviendrait pas à lui pardonner.

Après s'être débarrassée de sa cape, et un rapide salut de l'épée, imitée par Roni, elle prit une position de défense. Le garçon hautain se fendit tranquillement en direction de son torse, dans un assaut simpliste qu'elle repoussa de sa lame avant de riposter, aussi vive que la foudre. La novice trouva le flanc et la pointe de son arme perça la tunique d'apparat de l'adversaire. Qui s'éloigna du danger, les yeux plissés. 

Tu ne t'attendais pas à cela, pensa-t-elle, sarcastique. Crois-moi, tu n'es pas au bout de tes peines !

Dans un silence que le bruit des épées brisait, sous le regard ahuri des spectateurs improvisés, Flore enchaîna ses attaques, à l'instar d'un initié aguerri, et para sans souci. Son chignon n'y résista pas et les fleurs printanières tombèrent au sol, où elles furent piétinées. Quand elle accéléra peu à peu ses déplacements autour de son ennemi, le touchant dès que possible, un petit sourire étira ses lèvres. Sa mobilité gênait le garçon, dont les feintes se terminaient souvent dans le vide.

Le reflet rouge des cheveux du tourmenteur flamboya de colère, engendrée par ses échecs successifs, et ses gestes devinrent plus violents. Du coin de l'œil, la novice aperçut Kishor se raidir, mais il n'interrompit pas le duel.

Ce serait déclarer ma défaite !

Elle refusa de céder du terrain, déterminée à abattre l'ennemi qu'elle égalait. Alors que celui-ci reculait de plus en plus, une de ses défenses frappa la plaie au bras de Flore. Hélas, son visage grimaça tant sous la douleur, qu'elle indiqua à Roni son point faible ! Il s'engouffra dans la brèche et réussit à asséner un coup brutal.

Le choc fut tel qu'elle poussa un cri de souffrance et lâcha son épée. Titubante, le souffle haché, elle posa une main sur la manche, où le sang apparut avant de couler entre ses doigts. Un éclair de joie traversa les prunelles de son adversaire.

Aurora T1 : Les Perles de Vie / Watty 2020Où les histoires vivent. Découvrez maintenant