Chapitre 71.

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Tout compte fait, nous sommes restés manger là bas, Inès et moi.

Ma journée avait été complexe.
Un pote voulait me voir :  il m'a proposé de gérer la création d'une application ensemble. Mon rêve de toujours. Sa confiance en moi me touche : il sait que c'est mon domaine. Cela nécessitera une année de boulot environ et sur Bordeaux.

Voilà la raison de mon stress. Et Inès, là dedans ?

Il n'est pas question qu'elle se retrouve seule. Et même s'il était possible de l'emmener avec moi, je sais qu'elle ne me suivrait pas. A cause de Lilou. Fais chier.

Oliv me fait signe de le suivre. Son regard scrutateur a dû repérer mon malaise..

— Ça va , mec ? me demande-t-il sans attendre.

— Oui.

— Et en version sans mensonges ça donne quoi ?

— Rien de grave, Oliv, je t'assure.

— Ah ! Ta tête fumait presque tout à l'heure. A partir du moment où cela ne concerne pas Inès, je m'en moque, me précise-t-il.

— Oh, bordel, soupiré-je.

— Amène-toi, petit. On va discuter cinq minutes, dit-il tout en sortant son portable. Matt ? Tu peux gérer Inès, je dois discuter avec Damien.

— Tu es toujours aussi autoritaire ? lui demandé-je surpris de cet appel.

— J'ai juste demandé un service à Matt. On se connaît depuis très longtemps.

— Je comprends mieux tout cela, fais-je en montrant les gars positionnés plus loin.

— Il faut que je te fasse quoi pour que tu racontes ?  reprend-il.  Des baffes ?

— Pas la peine, répliqué-je en souriant de ses manières brusques. On m'a proposé un boulot. Gérer la création, l'installation et la gestion d'une application.

— Ton rêve, quoi. Et ?

— Exact, depuis que je suis gamin !  Mais je peux pas lâcher Inès !

— Qui te demande de le faire ? Elle ? Je suis sûre que tu ne lui en as pas parlé,  je me trompe ?

— Elle a besoin de temps, pour se retrouver. Je lui ai proposé de l'aider. Je peux pas l'abandonner.

— Peut-être que tu pourrais commencer par lui dire ce que tu ressens pour elle.

— Je ne pense pas qu'elle soit prête pour cela. Je ne veux pas qu'elle prenne la fuite.

— Si tu ne lui dis rien, tu ne peux pas savoir, lâche-t-il.  De toute façon, elle ne sera pas seule. On aime tous cette petite femme. Avec sa douceur, son sourire. Elle est tellement importante pour Lilou.

— Elle ne voudra jamais rester chez moi, seule. Pas son style, elle parle déjà de chercher du boulot. Elle ne retournera pas chez Marc.

— On trouvera une solution, gamin.  Parle lui. A toi de te confier à elle. Ne laisse pas passer ta chance.

— Si je dois la perdre, je préfère perdre ce boulot.

— Et tu t'en voudras et tu lui reprocheras un jour. Elle est ta chance dans ta vie. Ce boulot est un coup professionnel qui peut tout changer. Vous devez en parler pour trouver un moyen de concilier tout cela.

— Oui, j'en suis conscient. Toutes mes galères peuvent aboutir enfin. Mais je dois lui parler de mon passé. Tu es bien placé pour savoir qu'il n'est pas très glorieux, chuchoté-je.

— Pas si monstrueux que cela. Mais je ne crois pas qu'elle te reproche celui-ci. Lâche- tout gamin ! Et si je peux parler à Inès du Damien que je connais, tu le dis.

— Merci Oliv, dis-je en repartant à l'intérieur.

***
(Oliv)

Je le regarde  rejoindre Inès. J'espère de tout mon cœur qu'il va arriver à lui parler. Et à la convaincre.
Ce petit fait partie de mes protégés. Il revient de loin. La première fois que je l'ai vu, il était complètement défoncé. Il hurlait sur le toit d'un immeuble.  Moi, j'étais là pour un repérage pour un casse, donc mon objectif était qu'il dégage vite et sans faire de grabuge.  Mais dans son état, impossible de le gérer. Pour aller plus vite, je l'ai assommé et embarqué chez moi.
Après sevrage, il s'est avéré que ce mec sorti de la rue, était un génie de l'informatique. Il m'a aidé sur plein de trucs, en échange, il a arrêté la came.
Depuis deux ans, il est installé dans la cité. Il aide les gens et crée des applis qu'il vend. Pour son loft, je lui ai prêté le pognon. Il m'a tout remboursé. Il est clean et je sais qu'il aide des jeunes en galère.

— Tu fais quoi là, mec ? demande Franck.

Ce mec a l'œil, il repère tout à la vitesse de l'éclair.

— Rien, Franck. Je crois que je vais me faire chier. Putain ! J'ai adoré être avec vous. Vous êtes des gens bien, m'époumonné-je. Tous. Je vous interdis de nous oublier !

-— Oliv ! Sérieux ? Tu crois que je peux faire un truc pareil ! Sans vous tous  et ces flics de folie, ils seraient encore dehors, prêts à recommencer !

— J'adore tabasser des fumiers ! m'excusé-je pour relativiser ma réaction un peu excessive.

Il rigole un grand coup et nous nous installons pour discuter tranquillement.

***
(Matt)

Nous allons visiter la maison aujourd'hui. Tous les trois.
Déjà, point très positif, elle se trouve à 500 mètres de chez Nicolas et Amy.
Lilou, à qui nous avons juste dit qu'on allait voir une maison sans autre précision, est très calme. Signe de stress chez elle. Pour la rassurer, je  la prends directement dans les bras en la sortant de la voiture.
L'agent immobilier nous attend devant un portail en bois.

— Bonjour. Comment allez-vous ?

— Bonjour. Bien merci, répond Tom.

— Parfait. Ce bien est particulier, mais quelque chose me dit qu'il va vous plaire.

Derrière le portail, nous découvrons la maison. Un joli terrain délicieusement arboré, une terrasse. Nous nous regardons Tom et moi, la même émotion dans le regard. Nous n'avons pas encore vu l'intérieur et pourtant nous nous imaginons déjà assis sur cette terrasse.

— C'est beau ! chuchote une petite voix apparemment conquise aussi.

— Tu as raison, p'ticoeur.

Nous entrons dans la maison directement dans une grande pièce de vie. Très lumineuse grâce aux deux grandes fenêtres donnant sur la terrasse, mais surtout à cause de la véranda.

— La pièce de vie fait 50 m2, avec un poêle à granulés. Cuisine ouverte équipée.
La première chambre est à ce niveau, avec salle de bain attenante.
La deuxième chambre, plus petite est à l'étage. Ainsi qu'une autre salle de bain.
Mais la particularité de cette maison est derrière cette porte.
Je vous laisse découvrir.

Un genre de patio très lumineux grâce à un puits de lumière, et trois portes. Deux pièces de bonne taille et derrière la troisième porte, une surprise. Un truc de fou : un grand studio style industriel avec une entrée indépendante.
Matt se rapproche de moi, m'enlace et me chuchote.

— C'est chez nous !

— Oui !

— Le loyer était un peu élevé. Les anciens propriétaires, inquiets de ne pas pouvoir louer et ne voulant pas vendre, ont décidé de baisser le prix. Mais ils ont une exigence : Rencontrer les futurs locataires. Autant dire mon ressenti sur vous, il est fort. Les anciens propriétaires sont gays.
Voulez-vous que je les appelle ??

Petite Ellie. Where stories live. Discover now