Chapitre 8 .

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Le jour se lève à peine et déjà j'entends du bruit à côté. Matt dort très peu, cinq heures de sommeil suffisent à le remettre en forme.

Veinard.

J'arrive dans la cuisine en baillant. Matt et Peter discutent attablés sirotant leur café.

- Ça vous dérange si certaines personnes ont besoin de dormir plus de cinq heures par nuit ? grogné-je, les deux mains appuyées sur la table.

- Bonjour bébé ! C'est Peter qui fait du bruit, réplique immédiatement mon copain.

- C'est pas vrai ! C'est Matt ! riposte en rigolant mon collègue.

- Deux gamins ! Y en a pas un pour rattraper l'autre ! dis-je en secouant la tête.

J'ai très mal dormi. Des images de ce que cette gamine a dû vivre m'ont donné des cauchemars. Je ne veux pas l'appeler Ellie.

- Quoi ? Qu'est-ce que tu dis ? demande Matt.

- J'ai pensé tout haut ? Je ne veux pas l'appeler Ellie,  reprends-je Ce prénom lui a été donné par quelqu'un de foncièrement mauvais. Je ne VEUX pas qu'elle entende ce prénom sous mon toit.

Matt me regarde, les yeux brillants. Il me prend la main et la porte à ses lèvres.

- Je suis d'accord à cent pour cent avec toi. On lui expliquera.

- Vous savez tous les deux, intervient Peter. Si ça se trouve il n'a jamais utilisé ce prénom devant elle. Elle ne l'a peut-être même jamais entendu. Et puis il est formé de cinq initiales. Une de ces femmes est sans doute sa mère.

- Tu as raison, Peter. Pour l'instant je l'appellerai "la puce".

- J'ai contacté une amie qui a des filles de cet âge, continue mon collègue. Elle va faire le tri et me mettre ça de côté. Je lui ai dit que c'était plutôt urgent.

- Merci, Peter.

- Je vais rentrer, prendre vite fait une douche et me changer.

Son téléphone sonne.

- Non, je suis chez Bisson. Je suis chez moi dans une demi- heure... Je t'attends alors.
C'est Laval, précise-t-il en fronçant les sourcils. Il est là dans
dix minutes. Il avait l'air agité.

- Tant que c'est pas Mariani ! grogne Matt. Je vous laisse, va y avoir un peu trop de flics pour moi dans cette baraque !

- Toujours aussi drôle ton mec, Tom !

- Tu sais quelque chose ?  demandé-je.

- Non. Rien.

- Vu que je ne suis pas sur l'affaire, il serait préférable que tu prennes le temps de discuter seul avec lui. Dans la cour.

- Tu as raison. Et je te redis que pour moi, tu es sur l'affaire.

Tandis que Peter rejoint Laval dehors, je vais dans la salle. Matt est au téléphone avec Marc, son éditeur.

- Je suis sur ce passage depuis dix jours et je n'y arrive tout simplement pas. C'est la première fois que cela m'arrive. Et tu me connais, plus je me focalise sur un truc, plus ça coince. Donne moi des traductions à faire, ça me changera un peu les idées et je suis sûr que ça va revenir. Allez Marc, sois sympa, je n'arrête pas d'envoyer chier Tom. Il m'appelle Mr Grognon ! Si je te jure ! Cool, mec tu me sauves la vie, là. Merci.

Il raccroche, vient vers moi en souriant. Il m'entoure la taille de ses bras, m'embrasse dans le cou. J'aime ces moments de douceur. Je ne m'en lasserai jamais je crois.

- Marc me laisse du temps. Et il va me confier des traductions. J'aimerais que tu te détendes un peu. Ta nuque est toute raide. Tu leur as abandonné la cuisine ?

- J'ai conseillé à Peter de discuter avec Laval dehors. S'il estime que je peux être au courant, ils rentreront. Si j'ai la nuque raide c'est parce que j'ai mal dormi, c'est tout.

- Veux-tu un petit massage ?

- Non, pas maintenant. Il faudrait virer du merdier dans la pièce du fond, si on veut l'y installer. Tu es sûr qu'on peut y arriver ? On n'a pas forcément de l'expérience avec les enfants tous les deux.

- Sûr ? Non, comment pourrais-je l'être ? Mais je sais qu'on peut lui donner de l'affection et, si elle en veut, de l'amour. Crois-tu que le fait qu'on soit homo puisse être un handicap pour elle ?

- Matt ! Tout le monde ne pense pas cela. Nous  devrons  lui expliquer que tous les couples ne sont pas comme nous. Mais pourquoi ça l'handicaperait ?

- Tu le sais bien. Pour plein de gens, les homos sont des parias, je ne veux pas que cela la mette à mal, c'est tout.

- Tu t'inquiètes pour rien. Elle adorera être là !

****

(Peter)

Tom a raison, on ne peut pas prendre le risque d'un vice de procédure. Il est préférable que je discute avec Laval dehors. Tom n'est pas sur l'enquête, mais c'est un de mes meilleurs hommes. Le fait que Matt soit intervenu ne change rien à l'histoire. Par contre le fait que la petite pourrait vivre chez eux peut être une complication.

- Tu as vraiment une sale tête, déclare Laval en me voyant.

- Merci, ça fait toujours plaisir ! Je suis venu leur expliquer les dernières découvertes. Ça n'a été facile pour personne.

- J'imagine. Ils ont décidé de l'accueillir ?

- Ouais. Elle a confiance en Matt. Ils s'occuperont bien d'elle, j'en suis sûr. Bon, si tu me racontais ce qui se passe, hein ?

- Cela n'arrêtait pas de me travailler. On a fouillé partout. Ce mec, le fric il a pu le dépenser. Mais ce genre de type, je les connais, les vidéos, c'est sûr, il les a gardées.
Donc hier -tu vas être en pétard- j'y suis retourné.

- Tout seul ? Tu te fous de moi, là ? Tu veux que je t'enlève l'affaire ?

- Laisse-moi finir. Tu prendras ta décision après, d'accord ? J'assume tous mes actes.

-  Raconte.

- Le bâtiment, on l'a fait. Le chenil, à part la niche y a rien.
Donc il restait  la maison. J'ai sondé tous les murs. Rien. Le sol. Rien. Et puis j'ai eu une idée lumineuse. Le mec a installé une baignoire ! C'est con, c'est plus facile de filmer une nana sous la douche que dans une baignoire, non ? Et j'avais raison !

- Tu as trouvé quelque chose et tu m'as pas appelé ?

- Tu me laisses continuer ? J'ai trouvé son magot et y a plein d'autres paquets.

- Laval ! Bordel ! Ce sont des preuves de ce qui s'est passé. Et toi, tu as tout compromis !

- J'ai pris toutes les précautions. Y a aucune trace, pas d'empreinte rien. Peter ! le mec est mort, la seule qui reste c'est la petite. Si Tom et Matt ne s'en occupent pas, elle n'a plus rien. Le fric c'est pour elle. Elle en aura besoin.

- Mais je rêve,  bordel ! T'es con ou tu en fais exprès ? Si le fric et les vidéos sont cachés ensemble. Tu fais comment pour expliquer la disparition du fric ?

- Le fric était dans un sac sur le dessus. Je pense que le reste ce sont les vidéos, j'ai pas regardé, dit il d'une voix piteuse.

- Tu viens de me dire quoi là ? Tu as trouvé les vidéos et tu m'as pas appelé ?

- Si je t'ai appelé. Y a une demi-heure. J'ai fouillé toute la nuit. Je voulais mettre le fric à l'abri. Je sais qu'ils l'utiliseront pour elle. Ce sont des mecs bien.

- Je te laisse l'expliquer à Tom. J'espère que tu cours vite, mon gars.

- En fait, cela passerait mieux si tu leur expliques, toi !

- Alors là tu rêves ! Tu as dit que tu assumais tes actes. Alors à toi de jouer, ducon ! lui dis-je en le poussant vers la porte.

Petite Ellie. Where stories live. Discover now