Malédictions

II. - Chapitre Trois

Enchantia

Le côté positif d'être le roi du Royaume de Cœur, c'était le Royaume de Cœur. L'agréable chaleur, l'été qui se prolonge, les paysages époustouflants, l'architecture grandiose, sans oublier la nourriture. Nolan était bien plus à l'aise dans son nouvel habit de roi confectionné sur-mesure. C'était un vêtement léger, rose, avec un col très ouvert mettant en valeur le Collier de Cœur. Le costume était assez ample, mais resserré à la taille avec une ceinture dorée. Des soldats et domestiques, parmi lesquels se trouvait Alphonse, escortaient leur roi jusqu'à la salle de l'Assemblée pour discuter de la composition de la cour de Nolan. En effet, aujourd'hui, il devait nommer les membres qui devaient le conseiller et le représenter durant son règne, même si rien n'était définitif.

Devant l'entrée de la salle, Joséphine, debout, attendait seule, Nolan.

- Votre Majesté, avant de commencer, j'aimerais vous parler de quelque chose.

Elle fit signe à l'escorte de les laisser. Alphonse ferma la marche et le petit-fils et sa grand-mère se retrouvèrent seuls.

- Tout d'abord, je tenais à m'excuser pour ce qui vous arrive, commença-t-elle. Régner n'est déjà pas une mince affaire, alors sans y être préparé, dans un royaume et une famille que vous ne connaissez pas... Vous devez vous sentir perdu.

- Je suis perdu depuis mon enfance, vous savez, répondit Nolan. Je n'ai jamais eu de repère, pas de famille, pas de véritables amis. Du moins pas toujours. Je me suis forgé mes propres repères pendant près de vingt ans, je devrais m'en sortir.

Joséphine ne savait pas quoi ajouter. Elle sentait bien qu'être une vraie famille pour lui prendrait beaucoup plus de temps qu'elle ne l'avait espéré. C'était trop difficile pour elle de voir ses espoirs lui échapper. Elle était âgée et s'en voulait terriblement de tout ce qu'elle avait fait. De tous ces petits actes qu'elle aurait pu, qu'elle aurait dû rectifier pour éviter cette vie-là à Nolan. La culpabilité la rongeait et elle avait besoin de s'éloigner de la cour, de la couronne, de la Cité de Cœur.

- On a dû vous mettre au courant, Votre Majesté, que votre grand-père et moi rentrons au Palais d'Été plus tôt que prévu.

- Oui, je suis au courant.

- Bien... dit-elle tristement. Avant de partir, je me devais de vous révéler un secret qui se transmet de monarque à monarque, à propos du Collier de Cœur.

- Je vous écoute.

- Les colliers ne sont pas de simples bijoux précieux, ils renferment chacun un pouvoir qui va au-delà des limites de la magie. Et pour chaque collier, un esprit est le gardien de cette puissante magie divine. Et ses esprits ont tendance à entrer en contact avec le porteur du collier sans que personne d'autre ne puisse ni le voir ni l'entendre.

- Je me présente, dit soudain une voix, P'tit Cœur pour te servir !

La voix aiguë venait d'une petite créature flottante dans les airs en forme de cœur rouge avec de grands yeux brillants. Même si la chose était très mignonne, Nolan fut terrifié par son arrivée si soudaine.

- Qu'est-ce que c'est que ça !

- Il faut que je continue à travailler mes entrées on dirait, dit la petite chose.

- P'tit Cœur a dû entrer en contact avec vous, je suppose, sourit Joséphine.

- C'est quoi un « P'tit Cœur » ? demanda le roi intrigué en observant la créature.

- C'est moi, c'est mon nom ! Je m'appelle P'tit Cœur !

- Vous aurez le temps de vous présenter, dit la grand-mère, ne vous en fait pas, Votre Majesté. Pour l'heure, vous feriez mieux d'entrer dans la salle. Et rappelez-vous que personne d'autre, y compris moi, ne voit P'tit Cœur, il est comme une voix dans votre tête.