Chapitre 47

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Ereshkigal, la reine obscure...

Il n'existe pas de plus grand délice que de contempler l'agonie de ses ennemies. Hormis peut-être le bonheur d'être rassasiée par les multiples étreintes d'un magnifique amant.

J'hésite... mais l'un et l'autre de ces bienfaits vont combler une journée exceptionnelle.

Parfois, je me sens presque vieille, usée jusqu'à la corde au fur et à mesure des siècles, des longs millénaires. Heureusement, les caresses adroites de Nergal me rassurent, me confirment que ma beauté demeure aussi parfaite et envoûtante. Le plaisir charnel que nous partageons ensemble m'est d'un grand réconfort.

J'ai détesté qu'il ait autrefois osé mettre fin à nos ébats et même refusé de devenir mon époux, un honneur sans pareil que j'avais décidé de lui octroyer.

J'ai bien failli le faire écarteler devant une telle offense.

Mais cela aurait été si dommage...

Je me lève de notre couche et prends le temps de me déplacer avec grâce, consciente du regard de mon amant qui s'attarde sur mes formes somptueuses.

— Où vas-tu ? demande-t-il d'un trait. Nous n'avons pas terminé...

Ses yeux clairs sont chargés d'un sensuel appétit.

— Tu ne devines pas ? dis-je d'un ton aussi cruel que badin.

— L'élue doit-être morte, répond-il en haussant les épaules. Alastor est un expert avec son feu de Vulcain, personne n'y réchappe. Tu joueras avec le cadavre de cette fille plus tard...

Je proteste en attrapant de quoi me vêtir.

— Tu as raison ! Mais j'ai ordonné au bourreau qu'il laisse à la condamnée un soupçon de vie. Je veux que cette garce entende à quel point je la hais ! Ensuite, ce brave Alastor lui tordra définitivement le cou. Tu souhaites m'accompagner ?

Son visage parfait arbore une mine franchement dégoûtée.

— Aucun intérêt... mais reviens vite, ma reine !

C'est avec une joie enfantine que je dévale les couloirs et m'enfonce dans les entrailles de mon palais, là où se trouvent mes cachots les plus inhospitaliers.

Le spectacle est à la hauteur des plus belles espérances... dommage que Nergal n'en profite pas. Alastor s'incline avec déférence, tandis que je scrute avidement la petite créature ensanglantée qui git sur le sol glacé.

— C'est parfait ! Je vois que tu n'as pas épargné son visage... comme je te l'avais recommandé.

— J'ai suivi les instructions à la lettre, Votre Majesté, confirme fièrement Alastor.

Je jette un œil appuyé sur l'amas de chairs informes qui fut la descendante de cette maudite engeance Wyllt.

— J'ai un doute ! Tu es certain qu'elle respire encore...

— Bien sûr, Votre Majesté ! Je suis un professionnel ! clame Alastor. La condamnée a hurlé comme un animal pendant toute la durée du supplice, puis elle a fini par se taire ! Je crois qu'elle s'est résignée à une punition largement méritée. Le trépas constituera une délivrance pour cette pauvre chose qui a osé vous défier.

L'une des oreilles de mon ennemie a été tranchée par le feu de Vulcain. Mon fidèle Alastor n'y a pas été de main morte, comme à son habitude. L'autre oreille est bien là, par contre.

— Est-ce que tu m'entends, petite ?

Un faible gémissement m'indique que c'est le cas. Elle entrouvre avec difficulté ses paupières gonflées, partiellement brûlées par le feu de Vulcain.

— Vous voyez ! glousse Alastor. Vivante... mais pas pour longtemps !

Les pupilles bleutées de l'élue ont un insupportable éclat de fierté, de courage peut-être. Malgré cela, je décide de me montrer clémente...

— Je ne suis pas un monstre ! Je vais t'accorder une mort rapide, sans douleur... par étranglement.

Déjà agonisante, la malheureuse fille ne réagit pas et je me tourne vers Alastor en soupirant.

— Tu as largement accompli ton œuvre, bourreau ! Tu peux te reposer ! Je vais charger Kobal d'achever la condamnée puis de lui trancher la tête ! J'aimerais garder un souvenir d'elle.

— Mais... Votre Majesté ! s'offusque Alastor. C'est à moi de terminer ce travail !

Ce gros crétin se montre souvent aussi lourd qu'une planète.

— Il suffit, bourreau ! C'est Kobal qui va prendre la relève.

Une expression craintive plisse ses traits si laids et épais, il n'ignore pas que je déteste l'insubordination.

— Puisque c'est votre volonté, ma reine ! reconnaît-il humblement.

J'accorde un dernier regard à la progéniture Wyllt... sa tête desséchée fera un très beau cadeau pour Nergal.

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L'Élue (Evangeline)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant