Like A Boss

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Tout d'abord, je tiens à expliquer que si cette publication a un jour de retard, c'est parce que je voulais attendre mes résultats.

Et je les ai eus.

Sans plus attendre, je vous annonce donc la nouvelle principale : j'ai validé mon premier stage avec une note totale de 14,5/20 !!!!

Like A Boss !!!

Et pourtant, Dieu sait que c'était mal parti, pas vrai ? Mon évaluation s'est finalement jouée sur les deux dernières semaines, où j'ai dû cravacher, quelque chose de bien. Mais les aides-soignantes ont été indulgentes, elles ont bien pris en compte mes progrès. A la fin, je me suis même retrouvée avec des résultats assez inespérés.

Tout d'abord, comment est évalué un stage d'aide-soignante ?
Avant votre départ en stage, l'institut de formation vous remet une grille d'évaluation à remettre au cadre de votre stage et qui servira à vous noter. Cette grille est divisée en huit compétences correspondant aux huit modules de la formation, avec différentes sous-compétences. Ces sous-compétences peuvent être notées de 0 à 3, sachant que ces notes correspondent à un niveau d'acquisition : 0 est "non acquis", 1 est "en cours d'acquisition", 2 est "acquis", 3 est "maitrisé". Le cadre, à la fin, coche simplement la case correspondant au niveau d'acquisition, et c'est la note que vous obtenez pour cette sous-compétence. Il n'y a plus qu'à faire le calcul pour obtenir la note sur 20, sachant que pour valider son stage, il faut avoir une note au moins égale à la moyenne.

Dans quoi j'ai cartonné avec des "3" ? La communication, la transmission d'informations (fille de commerçants, tu m'étonnes que j'ai la tchatche !), les techniques de nettoyage et de désinfection (j'ai passé plus de temps à désinfecter des chambres de patients qu'à faire leur toilette, après tout), respect du secret professionnel (merci la caisse centrale !).
Dans quoi j'ai moins cartonné avec des "1" ? la manutention et le transfert de patients (pas souvent fait ça), le repérage des situations d'urgence (pas souvent fait non plus), et la maîtrise de soi. Bon, pour le dernier, je m'arroge quand même des excuses. Ce n'est pas évident de garder son calme quand on fait un travail pour la première fois et que tout ne se passe pas comme prévu.
En revanche, une ribambelle de "2", et pas un seul "0". Oui, pas un seul "0". 

Je vous l'avoue, j'ai sué à grosses gouttes, le dernier jour. Et pour diverses raisons.

D'abord, il y a eu Mr M., 75 ans. Ce patient nous avait été envoyé par le service de réanimation, et aujourd'hui encore, je n'arrive pas à comprendre pourquoi. 
Mr M. était un patient dit "en fin de vie".
En clair, il pouvait calancher d'un moment à l'autre. Et la réanimation nous l'envoyait, on ne savait pas trop pourquoi. En plus, il avait ses directives : refus de soins, refus d'être renvoyé en réanimation en cas d'urgence. Si le pire devait arriver, rien ne devait être fait pour le ranimer ou le maintenir en vie. Mr M., tout simplement, voulait se laisser mourir. Il avait une tendance inouïe à "désaturer". La saturation, c'est le taux d'oxygène dans le sang, sachant que 100% est parfait, et qu'en dessous de 90%, on surveille. On la calcule en vous clipsant ce truc au bout de l'index. Quand le taux d'oxygène baisse, on dit qu'on "désature". Une fois, ses constantes se sont affolées, je me suis ruée dans la chambre : Mr M. désaturait à 50%. Le tuyau à oxygène s'était simplement détaché de son masque respiratoire... D'autres fois, il retirait simplement son masque. Il était d'ailleur très doué pour ça.
Et pourtant, pour un patient en fin de vie, il avait de sacrées réserves, le bonhomme. En général, quand on dit "patient en fin de vie", on pense "patient inconscient ou presque, intubé et/ou ventilé, peu mobile et peu cohérent". Un brouillon de cadavre, en quelque sorte. Sauf que Mr M. était bien conscient, et bien râleur. Il fallait l'entendre rouspéter pendant les toilettes. On lui touchait quelque chose, il poussait un cri. Ah, c'est sûr, Mr M. n'était pas quand on lui faisait la toilette. A mon dernier jour plus que d'habitude, d'ailleurs. On a fini par écourter la toilette, on n'a même pas pu faire l'hygiène dentaire. Mais quand un patient n'a pas envie, vous apprenez vite à laisser tomber.
Je semble avoir une tendance assez étonnante à choisir des toilettes au lit assez compliquées, vous ne trouvez pas ? Il y a d'abord eu Mme K. avec ses 112 kilos et son sale caractère, puis Mme L. avec son prolapsus rectal, puis enfin Mr M. avec son sale caractère. J'ai l'art de les choisir, non ?
On a fini par contacter les hôpitaux à la ronde pour une place en soins palliatifs. Il n'y avait rien qu'on puisse faire pour lui, il prenait une chambre inutilement. Aux dernières nouvelles, il devait quitter le service le lundi suivant.

Puis il y a eu la patiente de la chambre 24. La pauvre, elle n'a rien fait de mal, c'est le problème qui lui est tombé dessus alors que l'infirmière était avec elle.
La sonnette sonne en chambre 24, j'y vais, je retrouve l'infirmière en train de contenir comme elle pouvait une hemorragie au poignet de la patiente.
Cette patiente avait subi, dans la journée, une coronarographie. Une coronarographie, c'est une radio des artères coronaires (celles qui irriguent le muscle cardiaque). On l'obtient en injectant un produit de contraste dans l'artère radiale du poignet.
C'était tout simplement le point d'injection qui s'était brusquement ouvert, et laissez-moi vous dire que j'ai compris, ce jour-là, ce qu'était la pression artérielle. A un moment, le sang a quand même giclé sur presque un mètre. La pauvre infirmière a fait un premier pansement de compression, ça coulait toujours. Elle l'a changé, ça a fini par se remettre à couler. Elle en a remis encore un autre par-dessus. Elle a tellement serré la bande adhésive que la main de la patiente était lie-de-vin. Mais, au moins, ça ne coulait plus. Et, croyez-moi, ça coulait pas mal.

Puis il y a eu l'évaluation proprement dite. Les aides-soignantes ont été partiales, et j'étais plutôt d'accord avec leurs notations. Il y en a juste une qui m'a mis des "3" presque partout, je ne sais pas pourquoi. C'est flatteur, c'est sûr, mais j'étais quand même très loin d'avoir ce niveau. A la fin, je n'ai même pas joint son évaluation aux autres, elle était inexploitable.
Sauf que, au moment de remettre les différentes évaluations des aides-soignantes à l'infirmière en chef pour remplir ma feuille d'évaluation définitive, on se rend compte qu'elle était déjà partie...
Le gag.
Impossible de faire remplir ma feuille, la chef n'était plus là.
Quoi faire ? Eh bien, laisser ma feuille sur place pour qu'elle la remplisse le lendemain, pendant que je serai à l'institut de formation à subir six heures de cours sur l'assistance sociale, et ramener mes fesses le samedi pour la récupérer. C'est sûr que c'est agréable de faire tout le déplacement un samedi pour ça...

Mais vous savez quoi ? Ca n'a plus d'importance. Pourquoi ? Parce que j'ai mon sésame dans la poche.

Gare à tes fesses, formation, j'arrive !

Like A Boss.

Journal D'une Elève Aide-Soignante [TERMINÉ]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora