XXIII

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_Non merci, je ne bois pas, répéta une énième fois Alison.
Le garçon qui lui tendait un gobelet haussa les épaules et s’éloigna avec une moue boudeuse. La jeune fille poussa un soupir et se passa une main nerveuse dans les cheveux.
Il était presque vingt et une heure et depuis l’arrivée des invités elle avait déjà repoussé six avances masculines et subit une dizaine de regards moqueurs féminins.
La musique battait son plein et Alison était à deux doigts de monter dans sa chambre, mais elle croisa le regard de Mathias, assis sur le sofa, qui en disait long. Il ne lui avait pas adressé la parole depuis le début de la soirée et était constamment entouré de trois ou quatre filles qui s’épanchaient autour de lui. Le jeune homme riait et faisait comme s’il ne voyait rien.
Son comportement agaçait plus que nécessaire la jeune fille, qui leva les yeux au ciel.
_Salut toi !
Une vois grave coupa court à ses pensées et Alison se tourna vers son origine. Un garçon brun lui tendait un gobelet, souriant.
La jeune fille s’apprêta à le repousser, mais referma la bouche au dernier moment. Elle savait que Mathias avait les yeux rivés sur elle. Et si... Et si elle essayait de le rendre jaloux ?
_Salut ! Fit-elle en souriant à son tour.
Elle se força à prendre le gobelet que le garçon lui tendait.
C’est absurde, pensa Alison. Pourquoi le serait-il ? Je vais simplement lui montrer que moi aussi je profite de la soirée.
_Moi c’est Ethan, t’es nouvelle dans le coin ? Je ne t’ai jamais vu et une beauté comme toi ne m’échappe pas.
Il lui fit un clin d’œil et se rapprocha d’elle. Alison eut un mouvement de recul mais elle se reprit vite en se rappelant que Mathias devait continuer de l’observer. Elle se força à émettre un petit rire.
_Je suis arrivée aujourd’hui même ! Je m’appelle Alison.
Pour aller plus loin dans son jeu, elle porta le gobelet à sa bouche et fit semblant de boire plusieurs gorgées. Elle sentit le liquide entrer en contact avec ses lèvres, mais fit attention à ce qu’aucune goutte ne franchisse cette dernière rempart.
_Tu es de la famille de Lucas ? Demanda Ethan en la regardant de haut en bas.
Gênée par son regard appuyé, Alison croisa les bras en signe de pudeur.
_Non, juste une amie de son frère.
_Tu es de quelle famille, alors ?
Pendant un instant Alison ne comprit pas le sens de sa question, puis son regard se posa vers un petit insigne gravé sur sa veste. C’était un P enflammé.
_Oh ! Se reprit-elle. Je suis une Cooper, et toi tu es un Pierce je suppose ?
Ethan lui fit un petit sourire en coin.
_Une Cooper ? Il n’y en a pas beaucoup à San Francisco... Tu t’apercevras rapidement qu’ici c’est les Pierce qui dominent.
Son ton était plein de sous-entendus et Alison y décela une pointe de supériorité. Elle perdit son sourire et fronça les sourcils. Ethan s’appuya sur le mur et se rapprocha davantage.
_Tu n’as pas l’air d’être au courant de beaucoup de choses, je me trompe ?
Il se pencha encore et Alison put sentir son haleine déjà pleine d’alcool. Elle recula doucement et déposa son gobelet sur la table basse. Ce garçon ne lui inspirait pas du tout confiance.
_C’est vrai que je ne connais rien sur cette ville et ses habitants, dit-elle en faisant mine de partir.
Ethan se redressa en éclatant de rire.
_Je ne parle pas de ça ! Je te parle du conflit qui opposent les Cooper et les quatre autres familles.
Alison s’arrêta, dubitative. De quoi parlait-il ?
Ethan se départit rapidement de son sourire en voyant qu’elle était réellement surprise.
_Attends, tu ne sais vraiment rien ? Mais c’est l’affaire du siècle !
La jeune fille resta muette quelques instants, l’esprit en ébullition, se demandant s’il se moquait d’elle ou pas. Finalement, la curiosité l’emporta.
_Tu peux me raconter ? Dit-elle en battant des cils.
Ethan fit un mouvement de sourcil grotesque et retrouva son sourire en coin.
_D’accord, mais tu me devras quelque chose en échange.
_Comme tu veux, mais je veux tous les détails.
_Marché conclu ! Allons dehors.
Alison suivit Ethan jusqu’à la baie vitrée et ils sortirent sur la terrasse. La jeune fille se retourna au dernier moment pour voir Mathias, mais celui-ci s’était levé du canapé et avait disparu de son champ de vision. Une pointe de déception la piqua lorsqu’elle se rendit compte qu’il devait s’amuser autre part et qu’il se fichait bien de ce qu’elle faisait.
Résignée, elle détourna les yeux du salon bondé et sortit dans l’air froid de la nuit. Ce soir le ciel était découvert et Alison put admirer la beauté de la lune et des étoiles. Elle fut prise d’un sentiment de légèreté et dut se contenir pour ne pas s’envoler au gré du vent.
_Tu viens ? L’appela Ethan à quelques mètres d’elle.
La jeune fille reprit ses esprits et le rejoignit d’un pas hâtif en zigzagant entre les fumeurs. La terrasse était elle aussi pleine et la jeune fille tourna la tête pour voir s’il y avait des gens dans la piscine. À priori personne n’avait fait encore fait le grand saut, mais elle ne doutait pas que dans une heure elle serait pleine à ras bord.
_Où allons-nous ? Demanda-t-elle.
Ethan la faisait traverser la foule pour descendre les marches en bois de la terrasse.
_Vers la plage, répondit-il sans se retourner. Si tu veux qu’on discute du conflit, il vaut mieux qu’on soit dans un endroit tranquille.
_Pourquoi ?
_Eh bien, tout le monde a une opinion différente là-dessus. Certains sont d’accord avec les Cooper, et certains Cooper tournent le dos à leur famille. J’ai déjà assisté à plusieurs bagarres à cause de ça, il y a même eu des attentats aux quatre coins du monde.
Alison tressaillit. Elle avait bien vu qu’il y avait eu une série d’attentat cette année, mais aucun ne lui avait semblé surnaturel.
_Les normaux ne se rendent compte de rien, expliqua Ethan. Au moindre événement magique, ils trouvent des explications scientifiques aussi  abracadabrantes les unes que les autres.
Au fur et à mesure qu’ils s’éloignaient de la villa, Alison sentait l’air se rafraîchir. Le bruit des vagues emplit ses oreilles et l’odeur marine remplit ses narines. Malgré le froid, la jeune fille gonfla ses poumons de l’air frais environnant. Elle n’avait que son sweat à capuche et elle rabattit cette dernière sur sa tête.
Je suis une Pierce ! Pensa tout d’un coup Alison. Je peux contrôler ma chaleur corporelle comme le fait Mathias !
Revigorée, elle talonna Ethan en se concentrant intérieurement. Après tout, il lui suffisait simplement d’imaginer son corps se réchauffer, non ?
À son grand bonheur, le Feu répondit à son appel et elle sentit une chaleur naître eu creux de sa poitrine pour se répandre petit à petit dans tout son corps jusqu’à ses doigts de pieds. La jeune fille soupira d’aise et un sourire de fierté étira ses lèvres.
C’est à ce moment qu’Ethan choisit de se retourner pour voir si elle le suivait.
_Pourquoi tu souris ? Demanda-t-il, perplexe.
_Pour rien, s’empressa-t-elle de répondre. Et sinon, tu as d’autres Éléments que le Feu ?
Sa tentative de changement de sujet porta ses fruits car Ethan eut un petit sourire satisfait.
_L’Eau et l’Air m’obéissent aussi bien que le Feu le fait !
Alison ne laissa pas transparaître sa surprise.
_Je suis issu d’une famille de Pierce et d’une famille de Oloway, continua Ethan, mais à la surprise de tous l’Air m’a aussi choisi à la naissance.
Rapidement, il commença à raconter les différentes réactions de sa famille et Alison se désintéressa aussitôt de ce qu’il disait. Elle le suivait dans l’unique but d’en savoir plus sur le conflit dont sa famille en était le centre.
Ils quittèrent le sentier herbeux pour s’engager sur un chemin sableux, toujours sous les paroles incessante d’Ethan. Ce dernier ne se rendait pas compte qu’il était ennuyeux à mourir puisqu’il ne s’arrêta pas avant qu’ils ne s’assoient sur le sable froid, pas très loin des vagues.
_Dis-moi tout, le pressa Alison une fois qu’ils furent installés.
_Doucement, ma jolie ! Laisse-moi nous éclairer un peu.
Sans crier gare, deux flammes apparurent dans chacune de ses paumes. Elle n’étaient pas suffisamment intense pour éclairer leur entourage, mais au moins ils pouvaient se voir.
Ethan se racla la gorge.
_Tout a commencé il y a plus d’un an, lorsque le Chef des Cooper est décédé. Sa femme et sa fille ayant disparu des années auparavant, c’est son frère qui a prit la relève. Il s’appelle Tyler et c’est un véritable tyran. À l’instant où il a été proclamé Chef, il a juré de dominer les cinq familles en faisant revivre une ancienne tradition qui avait été abolie après des centaines d’années de guerre.
_Quelle était cette tradition ? Le coupa Alison.
Ethan ne releva pas son ignorance et lui expliqua :
_Avant, une famille était comme reine de toutes les autres, un peu comme une monarchie absolue, et c’était les Cooper les plus souvent dominants.
_Ce qui explique pourquoi Tyler veut faire revivre ce système, comprit la jeune fille.
_Oui, il se vante de posséder quatre Éléments, ce qui le rend plus puissant que n’importe qui. Il promet gloire et fortune à ceux qui le suivront, mais bon nombre de ses semblables savent qu’il ne veut qu’une chose : Dominer. Il prétend qu’il n’a aucun élément dominant et qu’il les contrôle tous à la perfection. Certains le croient et le rejoignent alors qu’ils ne sont même pas des Cooper, mais ce sont des personnes aveuglées par la puissance de Tyler et de ce qu’il peut accomplir.
_C’est beaucoup plus grave que je ne le pensais, s’horrifia Alison.
Ethan haussa les épaules.
_Pour l’instant Tyler ne peux pas faire grand chose, il a le conseil des cinq contre lui. Tant qu’il n’aura pas plus de partisans, ses paroles ne sont que des menaces.
_C’est quoi, le conseil des cinq ?
_Bon sang, tu te fiches de moi ! S’écria Ethan. Mais d’où tu sors ?
Il commençait à se poser de plus en plus de questions et Alison simula un éclat de rire pour éviter qu’il n’en pose.
_C’est une blague !
Les épaules d’Ethan se relâchèrent.
_J’y ai vraiment cru, tu devrais faire carrière dans le cinéma. Bref, pour le moment Tyler n’a aucun pouvoir sauf sur les Cooper puisqu’il en est le Chef, mais beaucoup d’entre vous déserte la famille et se font une fausse identité en cachant leur Esprit dominant pour échapper à sa tyrannie.
Le volume de sa voix baissa et Alison dut se pencher pour l’entendre chuchoter.
_On raconte qu’il cherche à briser le sort des Stone qui empêche les hommes d’avoir l’Élément Terre. Il veut s’emparer de cet élément pour devenir un Five.
_Mais comment veut-il s’en emparer s’il n’a pas de sang Stone ? Chuchota aussi la jeune fille.
_Aucune idée. Katelyn, la Chef des Stone, a disparu depuis qu’il a été nommé Chef des Cooper. Apparemment, elle était au courant de ses intentions bien avant et avait tout planifié. Tyler a lancé la Traque et en quelques semaines, elle et toutes les Stone sont devenues introuvable. Des gens pensent que Tyler les a déjà toutes faites prisonnières, mais moi je pense qu’elles ont des faux-papiers et qu’elles se cachent du mieux qu’elles peuvent.
Alison respirait de plus en plus vite.
_En clair, Tyler est un psychopathe assoiffé de pouvoir qui cherche à en avoir toujours plus alors qu’il est déjà l’homme le plus puissant de toutes les familles ?
_T’as tout compris !
Ethan lui fit quelques applaudissements avant de reprendre.
_Pour l’instant Tyler n’a pas encore utilisé la manière forte pour arriver à ses fin, mais sois sûre que ce jour viendra et d’ici là nous devons être prêts à nous battre. Je ne laisserais pas un fou furieux me dominer.
_Moi non plus, se rebiffa la jeune fille. Je ne le reconnaîtrais jamais comme mon Chef.
_Bien dit !
Un détail avait retint l’attention d’Alison et elle devait l’éclaircir.
_Que sont devenues la belle sœur et la nièce de Tyler ?
_D’après ce que je sais, elles ont disparu il y a une dizaine d’années. Tyler s’est aussi mis à leur recherche, mais après tant d’années il n’a aucune chance de les retrouver.
La jeune fille pencha la tête sur le côté, perplexe.
_Je ne comprends pas, soupira-t-elle. Elles ont été enlevées ? Tuées ?
Ethan soupira à son tour.
_Personne ne sait vraiment. Un jour, Édouard a déclaré qu’elles avaient disparu. Personne n’a jamais pu lui soutirer une quelconque information sur elles.
_C’est vraiment étrange... Édouard était bien le Chef des Cooper avant Tyler ?
_C’est ça.
Alison prit quelques instants pour emmagasiner ce flot d’informations, puis elle prit une grande inspiration.
_Merci de m’avoir raconté tout ça, Ethan.
Elle jeta un coup d’œil à sa montre.
_Il faut que j’aille dormir, le décalage horaire m’épuise.
Une demi-heure était déjà passée depuis sa rencontre avec Ethan et la jeune fille ne voulait plus qu’une chose : aller dans son lit.
_Comme tu veux ! Fit-il en se relevant.
Il l’aida à faire de même et ils marchèrent en silence jusqu’à la villa.
Ethan lui jetait de fréquents coup d’œil, mais Alison faisait mine de ne pas s’en apercevoir et restait plongée dans ses pensées.
Au moment où ils s’apprêtaient à grimper les marches de la terrasse, Ethan lui prit le bras et l’attira d’un coup sec contre lui.
_Tu me dois quelque chose, lui susurra-t-il à l’oreille.
Son haleine empestait toujours autant l’alcool et Alison grimaça avant de le repousser violemment, comprenant ses intentions.
_Tu es dingue ? S’écria-t-elle. T’approche pas de moi !
Elle commença à monter les marches, mais Ethan lui prit à nouveau le bras et la serra plus fort contre lui.
_Juste un bisous, tu me dois bien ça !
_Hors de question !
Elle se débattit et tenta même de s’élever dans les airs, mais l’emprise d’Ethan était beaucoup trop forte et il la clouait sur place. Elle ne pouvait pas faire appel au Feu puisqu’il était un Pierce, et l’Esprit ne pouvait lui être d’une quelconque utilité dans cette situation... À moins qu’elle ne tente de le manipuler. Si l’Esprit était bien son Élément dominant, alors elle pouvait persuader Ethan de la lâcher.
Tentant de recouvrer son calme alors que les lèvres du garçon se rapprochaient dangereusement des siennes, Alison le regarda droit dans les yeux et parla d’une voix aussi autoritaire que possible :
_Lâche-moi.
Ces deux mots eurent pour seul effet d’agrandir le sourire d’Ethan, qui continua de rapprocher  sa bouche de la sienne. Dans un dernier espoir, Alison essaya d’utiliser la vitesse mais elle se rendit vite compte qu’il était beaucoup plus agile qu’elle.
_Laisse-là ! Hurla soudainement une voix depuis le haut des marches.
Alison la reconnut avec bonheur. Sa poitrine se relâcha à ce son, mais Ethan ne fit pas de même et garda son emprise sur elle.
_T’es le frère de Lucas, non ? Fit-il sans grand intérêt.
Mathias descendit les escaliers avec rapidité.
_Oui, et je te conseille de la laisser tranquille avant que je ne te casse la gueule.
Les yeux d’Alison s’agrandirent comme des soucoupes. Mathias avait parlé lentement, mais on pouvait sentir la colère frémir dans chacun de ses mots.
_Elle me doit un baiser, se défendit Ethan en raffermissant sa prise.
_C’est faux ! S’écria Alison, outrée.
Il n’avait jamais été question de cela et la jeune fille en était écœurée rien qu’en l’imaginant.
Aussi rapide que l’éclair, Mathias décocha un coup de poing à Ethan, en pleine figure. Dès qu’elle sentit que sa prise s’était affaiblie, Alison se dégagea d’un coup sec avant de lui administrer une gifle phénoménale.
Sonné à cause du choc amplifié par l’alcool, Ethan tomba à genoux et s’étala aux pieds de la jeune fille.
Mathias lui prit la main et l’entraîna à l’intérieur sans un mot. La musique était beaucoup plus forte qu’avant et il y avait plus de monde dans le salon. Alison pouvait sentir sa colère rien qu’en tenant sa main moite dans la sienne et elle frissonna.
Ils montèrent au premier étage et se retrouvèrent devant sa chambre en quelques secondes. Mathias tourna la poignée à la hâte et poussa un soupir de soulagement en voyant que la chambre était vide.
Alison entra et Mathias ferma à clé derrière elle avant de s’adosser contre la porte, la mâchoire contractée et le regard qui tue.
Ils se toisèrent un instant, puis Mathias explosa.
_Pourquoi tu as suivi ce mec ? Cria-t-il.
Alison ne sut quoi répondre devant tant de haine.
_Il ne voulait qu’une chose ! Continua Mathias. T’avoir dans son lit ! Pourquoi tu l’as suivi ?
_Arrête de me crier dessus, s’il te plaît ! Rétorqua enfin la jeune fille. Je suis désolé, je ne pensais pas qu’il me demanderait quelque chose comme ça en contrepartie !
_En contrepartie de quoi ? Si je ne serais pas intervenu, je n’ose même pas imaginer ce qu’il se serait passé !
Il se prit la tête dans les mains avant de respirer un grand coup.
_Ne refais plus jamais ça. De partir avec un inconnu pervers sous mes yeux.
Alison fronça les sourcils. Sous ses yeux ? Ça voulait dire qu’il avait continué de la surveiller ? La jeune fille croisa les bras.
_Je ne savais pas que c’était pervers.
Ou du moins pas autant.
_Peu importe ! Soupira Mathias en s’approchant d’elle.
_D’accord ! Je te le promet.
Soulagée, il la prit dans ses bras.
_Merci d’avoir été là, murmura la jeune fille en lui rendant son étreinte.
Ils restèrent ainsi quelques secondes, puis elle se détacha de lui à contre cœur.
_Est-ce que tu es au courant pour Tyler ?
Mathias haussa un sourcil.
_Tyler Cooper ? Le frère d’Édouard, le Chef des Cooper ?
La poitrine d’Alison se serra. Tout comme elle avant ce soir, il ne savait rien.
_Asseyons-nous, j’ai beaucoup de choses à te dire.
Elle le guida jusqu’à son lit et ils s’assirent en tailleur. Alison lui répéta mot pour mot tout ce qu’Ethan lui avait dit et l’expression de Mathias changea du tout au tout pendant toute la durée de ses explications, mais il ne l’interrompit pas une seule fois.
_C’est complètement dingue, commenta Mathias une fois qu’elle eut terminé. C’est pour ça que t’as suivi ce mec ? Par curiosité ?
Alison hocha la tête.
_Oui.
_Tu es irrécupérable.
_Et toi dont.
Ils se sourirent. Mathias ouvrit la bouche, mais il fut interrompu par la sonnerie de son portable.
_C’est Lucas, soupira-t-il. Il faut que je descende.
_D’accord, fit Alison, déçue.
_Je reviens dans dix minutes.
Il s’en alla, la laissant seule dans l’immense chambre. La musique faisait presque vibrer les murs, ce qui commença à énerver la jeune fille qui souhaitait un instant de calme.
Épuisée, elle n’avait plus la force d’attendre Mathias ou même de se lever pour se changer, alors elle s’enroula dans ses couvertures et ferma les yeux.
Alors qu’elle allait sombrer dans un profond sommeil, un courant d’air vain lui effleurer la joue, la faisant frissonner. Alison ne réagit pas tout de suite, l’esprit ensommeillé, mais  se redressa d’un coup lorsqu’elle se souvint qu’elle n’avait pas ouvert la baie vitrée.
Son regard inspecta minutieusement la chambre, et la jeune fille plissa les yeux pour mieux discerner la pièce dans la pénombre. Ils se posèrent enfin sur la baie vitrée, à moitié ouverte.
Bizarre, pensa-t-elle.
Elle se leva avec précaution pour aller la fermer et balança ses jambes à l’extérieur du lit. Ses pieds effleurèrent le sol froid et elle frissonna à nouveau.
Un étrange sentiment lui serra la poitrine. La jeune fille fit quelques pas en direction du courant d’air, mais sentit quelque chose lui frôler le bras à toute vitesse. Ou plutôt quelqu’un venait de lui effleurer le bras.
Elle sentait que cette personne était juste derrière elle. Peut-être n’était-elle pas seule.
Sans réfléchir, Alison courut vers le balcon. Elle eut à peine le temps de mettre un pieds dehors qu’une main lui saisit la taille et qu’une autre lui couvrit la bouche pour étouffer son cri. La jeune fille tenta de mordre son agresseur, mais il lui mit un coup de poing et elle fut sonnée par la puissance de l’impact.
Alison sentit sa mâchoire exploser sous la douleur et les larmes lui montèrent aux yeux. Qui étaient-ils ? Des sbires de Chantal venus se venger ?
Déterminée à ne pas se laisser faire, la jeune fille planta ses ongles dans les bras qui la tenaient, pencha la tête en avant et administra un coup de boule à toute vitesse à son assaillant qui poussa un cri de douleur. Profitant de ce moment de faiblesse, elle se dégagea de l’étau dans lequel elle se trouvait et se retourna pour voir à qui elle avait à faire.
Un colosse de presque deux mètres se dressait devant elle. Il était entièrement habillé en noir et se tenait le nez des deux mains en grognant sauvagement. Son crâne ne montrait aucune pilosité et son visage était totalement inconnu à Alison, qui ne perdit pas plus de temps et fit chauffer ses paumes.
Alors qu’elle s’apprêtait à lâcher un éclair surpuissant, quelqu’un d’autre la frappa par derrière et la jeune fille tomba à genoux, pliée en deux.
_Sale petite peste ! Siffla l’homme qu’elle avait frappé.
Il se releva, tenant toujours son nez ensanglanté d’une main, et de l’autre il la gifla violemment. Un goût métallique envahit aussitôt la bouche de la jeune fille qui cracha de dégoût.
_Ne l’amoche pas trop, le prévint l’homme qui se tenait derrière elle.
_Elle m’a cassé le nez ! Vociféra l’autre.
Encore à moitié sonnée par la gifle, Alison tenta de se relever mais des mains se posèrent sur ses épaules, la clouant au sol.
_Qu’est-ce que vous voulez ?! Hurla-t-elle pleine de rage.
Sa joue brûlait, sa bouche saignait, sa mâchoire et sa tête étaient sur le point d’exploser. La jeune jeune fille avait envie de pleurer. Pour ne pas flancher, elle releva la tête et planta son regard plein de haine dans les yeux de son agresseur.
_Que tu la ferme ! Aboya-t-il en sortant un mouchoir de sa poche.
Sans qu’elle n’ait le temps de réagir, l’homme le colla à son visage et elle ne put que respirer l’odeur âcre qui s’échappait du tissu. Alison tenta de se débattre, mais celui qui la tenait s’appuya sur elle de tout son poids.
Ses yeux se révulsèrent, ses muscles se relâchèrent, la douleur commença à paraître  lointaine et la jeune fille devint sourde d’une oreille.
_Allons-nous en !
Alison sentit quelqu’un la prendre et la jeter sur son épaule, tel un sac. Celui qui la portait se dirigea sur le balcon, puis il fléchit les genoux et sauta dans le vide. Il s’éleva dans les airs pour aller survoler l’océan et la jeune fille eut tout juste le temps d’entrouvrir les yeux pour voir la villa s’éloigner peu à peu.
_Mathias... Sanglota-t-elle.
Les larmes finirent par couler le long de ses joues. L’air était glacé et elle n’avait plus la force de se réchauffer à cause du tranquillisant, alors la jeune fille ferma les yeux et pria pour que tout ceci ne soit qu’un cauchemar.

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