Gabriel (Chapitre 2)

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Je m'approche alors d'Ysaïne qui relève la tête vers moi avec un joli sourire. Une ombre inquiète passe pourtant sur ses traits et elle fronce le nez pour me demander pensivement :

-Tu n'aimes pas les cheveux bleus ?

Je la prends dans mes bras en sentant une nouvelle fois l'amour que j'ai pour elle me dilater le cœur.

-Oh si, je les adore, surtout quand ils rendent ma fille aussi jolie et merveilleuse !...

Elle éclate de rire et Azylis me rejoint. Elle pose pensivement la tête sur mon épaule, son regard plongé dans celui d'Ysaïne avant de laisser échapper quelques mots.

-Si seulement ils ne nous causaient pas tant d'inquiétude...

Je repose notre fille à terre et me tourne vers Azylis.

-Tes examens, tu n'en as plus maintenant ?

-Si, dont un très important en fin de semaine...

-Alors laisse-moi prendre rendez-vous chez le médecin et y aller, concentre-toi plutôt sur tes révisions...

Elle hésite un instant puis finit par hausser pensivement les épaules.

-Je pense effectivement que ma présence n'est pas nécessaire à ce fichu rendez-vous... Tu me raconteras.

J'acquiesce et me dirige vers la porte du salon pour passer dans la petite cage d'escalier. Je continue tout droit et arrive dans notre chaleureuse cuisine encombrée actuellement de sacs de course non rangés et d'un bocal avec deux poissons rouges à l'extrême bord d'une étagère.

Je repousse le bocal de quelques centimètres pour éviter qu'il ne tombe au prochain passage de notre adorable petite furie et jette un coup d'œil à la pile de livres de cuisine à côté.

Comme prévu, mon portable trône en dangereux équilibre lui aussi au dessus de la pile. Je le prends d'une main et allume rapidement l'écran tout en songeant avec une pointe d'amusement que c'est un miracle que je ne l'ai pas encore perdu.

Mes doigts appuient rapidement sur les touches et je ne tarde pas à appuyer sur la touche "appel". La secrétaire de notre médecin ne devrait pas tarder à décrocher...

-Oui, allo ? Bonjour, ici le cabinet médical du docteur Voy... Que désirez-vous ?

-Bonjour, ici le... Ici Gabriel Astra. Je voudrais prendre rendez-vous dans la semaine pour ma fille pour des examens généraux... Elle nous inquiète un peu.

-Pouvez-vous précisez la nature de vos inquiétudes ?

Je me retourne vers l'entrée de la cuisine en entendant un léger bruit de pas. Azylis vient de me rejoindre et s'appuie tranquillement à l'encadrement de la porte en me dévisageant avec son éternel petit regard moqueur. Mais au fond aujourd'hui trop sérieux et inquiet.

Je réponds d'une voix le plus neutre possible au téléphone.

-Une anomalie étrange... Les cheveux de notre fille sont bleus...

-Pardon ? Bleus ?

Je hausse les épaules et mes pieds jouent un instant avec les rainures des carreaux au sol.

-Oui, c'est ça. J'avoue que nous ne comprenons pas...

-Bien, je prends en note. Un rendez-vous après-demain, c'est à dire mercredi à quatre heures trente, cela vous va ?

-C'est parfait, merci beaucoup.

J'entends le léger bruit m'annonçant que l'on raccroche et je fais de même, reposant le téléphone que j'avais en main près de l'aquarium des poissons rouges. Azylis grimace un sourire.

-Avoue que quand tu t'es présenté tu as faillis dire "le prince"... Ça te manque tant que cela ?

J'éprouve un léger pincement au cœur et repense aux paroles de ma sœur. Elle m'avait prédit que je ne pourrais pas résister à l'envie de retourner dans mon époque. Mais c'est faux... Je suis heureux aujourd'hui, et je veux le prouver. Je hausse les épaules une nouvelle fois puis explique rapidement le fond de ma pensée.

-Ça ne me manque pas grâce à vous deux... Je cherche juste encore ma place exacte ici.

Elle reste un instant silencieuse avant de froncer de nouveau légèrement les sourcils et de brutalement changer de sujet.

-Ne penses-tu pas que nous devrions dès le début expliquer nos craintes réelles ? La maladie possible ?

Elle garde les bras croisés sur sa poitrine et me dévisage longuement, attendant une réponse que je ne peux que formuler sur la défensive.

-Disons que je ne vois pas trop comment expliquer nos connaissances... De toute façon, si elle est réellement malade, les médecins d'aujourd'hui sauront tout aussi bien que ceux du futur détecter la maladie...

-Mais pas la guérir ! Et c'est ça qui me fait peur maintenant... Et si l'unique solution consistait à repartir, que ferions nous ?

Je ferme un instant les yeux et m'assois sur une chaise juste derrière moi après en avoir auparavant ôté les sacs qui l'encombraient. Azylis se détache du mur pour me regarder carrément en face tandis que je laisse pleinement cette idée m'envahir. Être obligé de repartir... Je tente de retenir la joie déplacée qui me traverse à cette simple idée et relève des yeux parfaitement calmes vers Azylis.

-Alors... Nous y retournerions bien sûr...

-Certainement pas ! Tu crois que je n'ai pas vu la joie dans tes yeux Gabriel ? On ne peut, on ne doit pas faire une chose pareille...!

Je suis surpris par la brutalité de sa réponse et je recule dans mon siège sous l'effet de la surprise. Les mots sortent de ma bouche sans que je réfléchisse, avec fougue mais sans colère.

-Mais alors que proposes-tu Azylis ? On ne pourra quand même pas rester là, bras croisés, à attendre !

Elle s'approche d'un pas de moi et laisse échapper sa crainte dans sa réponse, une nouvelle fois assez violente.

-Justement, je vais te dire moi ce que nous allons faire... Je ne veux pas tenter de sauver Ysaïne pour te mettre toi en danger Gabriel ! Alors, voilà ce que je voulais te proposer, non, te dire car ce n'est absolument pas une proposition. J'irai seule dans le futur si nous devons y aller.

-Je refuse ! Tu me laisserais ici, à me faire un sang d'encre en vous attendant ? Oublies-tu que tu es toi aussi en danger ?

-Peut être, mais je suis bien moins repérable que toi...

-Tu as gagné la loterie... C'est un fait suffisant pour que ton visage soit mondialement connu.

Je me calme lentement et me relève pour poser l'une de mes mains sur son épaule.

-Tu ne parles pas sérieusement si ?

Elle redresse le menton et me dévisage avec une lueur de défi au fond des yeux pour cacher son inquiétude.

-Si. Je ne te laisserai pas bêtement tenter le sort. S'il le faut, j'irai avec Ysaïne là-bas... Mais sans toi.

Intemporel T3 & 4Dove le storie prendono vita. Scoprilo ora