Chapitre 11

Depuis le début
                                    

— Mon petit père ! m'exclamé-je en le prenant dans mes bras, le câlinant avec force. Qu'est-ce que...

Quelque chose attire mon attention. Son collier bleu, habituellement accroché à son cou, a disparu.

— Où as-tu encore traîné ? le questionné-je.

Pour seule réponse, j'ai droit à un long miaulement dont la signification ne m'échappe pas. La boule de poils est affamée.

Je relève la tête en direction de la route. D'un pas hésitant, je m'avance jusqu'au trottoir pour tenter de retrouver la silhouette qu'il m'a semblé apercevoir. Je crois la repérer. Elle s'évapore comme une ombre fuyante lorsque les éclairages de la façade de la maison devant laquelle elle se trouvait s'allument. Ne détectant plus de mouvements, ils s'éteignent.

J'en suis persuadée, ce n'était pas la même silhouette que celle que j'ai observée précédemment et qui m'a donné l'impression d'être une sorte de poupée désarticulée.

Bizarre.

Mes yeux scrutent l'obscurité, cherchant en vain une trace de l'énigmatique figure qui a captivé mon attention. Mais rien. Excepté le murmure inquiétant de la nuit.

Mue par un mauvais pressentiment, je décide de rebrousser chemin, laissant derrière moi la rue déserte que des voisins épient planqués depuis leurs fenêtres. Ils se pensent discrets, mais ne le sont pas. L'air est lourd d'un mystère qui s'amplifie au fil des secondes. Un cri qui s'élève à nouveau fait monter mon anxiété à un niveau presque insupportable. Je m'apprête à ouvrir la porte de la maison de ma grand-mère quand le cri se répète, strident et perçant.

Terrifié, Pudding s'échappe. Les clés glissent de ma main tremblante. Je me penche pour les ramasser, tenaillée par l'angoisse. Soudain, une femme émerge d'entre les maisons d'en face. Elle boîte. L'une de ses jambes est tordue. Elle ressemble à une damnée avec ses cheveux en bataille, son teint cadavérique et ses vêtements déchirés. Elle est agitée et regarde frénétiquement autour d'elle comme si elle fuyait quelqu'un.

— Aidez-moi ! gémit-elle une main plaquée sur le ventre.

Mon souffle se bloque dans ma gorge alors que la femme, le regard rempli de terreur, s'égosille d'une voix qui finit par casser. Elle tombe sur la chaussée et y rampe avant de parvenir à se relever avec difficulté. Paniquée, je recule instinctivement, mais elle progresse dans ma direction avec une détermination effrayante. Mes yeux s'écarquillent d'horreur. Je me sens moins seule quand certains voisins sortent de chez eux, alertés par ses cris tragiques.

Au même instant, grand-mère ouvre la porte de sa maison.

Une voiture de police arrive au coin de la rue, les gyrophares tournoyants déchirant la nuit. La femme tend son bras vers moi en me demandant de l'aider. Choquée par cette scène irréelle, je reste figée. Quand l'inconnue s'écroule sur l'asphalte, j'ai comme un déclic. C'est une question de vie ou de mort !

Sans réfléchir, je me précipite vers elle. La femme est étendue sur le sol. Elle gémit douloureusement avant de tenter de s'exprimer. Ce qu'elle raconte est incohérent.

— La tête de mort me guette. Le diable rôde... Il me regarde ! Là ! Là ! bafouille-t-elle en pointant le ciel du doigt.

— Ne bougez pas, lui dis-je en caressant son front humide pour tenter de la calmer.

Elle est en nage, au bord de la folie.

Tandis que j'essaie de la maintenir par les épaules pour qu'elle ne se relève pas, mon regard se fixe sur une plaie béante au milieu de son ventre. Une vision terrible qui me vole une plainte.

— Une ambulance arrive, m'apprend un policier qui s'accroupit à mes côtés pendant que je plaque ma main sur sa blessure pour éviter qu'elle ne se vide de son sang.

Concentrée sur la jeune femme, je ne fais plus attention à ce qui se passe autour de moi. Les sons et les lumières me paraissent lointains.

— La lune, les étoiles et la tête de mort a surgi dans la...

Elle ne termine pas sa phrase et manque de s'étouffer avec le sang qu'elle crache.

Prise de convulsions, l'inconnue perd connaissance.

— Il n'y a plus de pouls, entends-je.

Je m'écarte pour que les policiers effectuent un massage cardiaque.

Grand-mère qui a assisté à la scène, démunie, me prend dans ses bras. C'est en l'étreignant que je suis frappée par mes mains ensanglantées. Je les plaque dans son dos pour ne plus les voir.

Les événements échappent à tout contrôle et les larmes aux yeux, je me demande si je ne suis pas un oiseau de mauvais augure...

***

N'hésitez pas à voter ;)

Savage loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant