Chapitre 9

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10 octobre

       Assise à mon bureau dans l'arrière-boutique, je saisie le chiffre des recettes du jour dans le logiciel comptable de la fleuristerie. La symphonie des clics de ma calculatrice accompagne mes pensées. Chaque transaction, chaque bouquet vendu est inscrit avec soin dans le fichier. La journée a été prospère. Le flot constant de clients a ravi ma grand-mère. Pendant que je me consacre à la gestion de l'entreprise, Colm, fidèle et dévoué, balaie consciencieusement la boutique. L'atmosphère calme est brisée par le tintement du carillon de la porte d'entrée.

— Qu'est-ce que...

Je m'immobilise sur mon siège en tendant l'oreille.

— Colm ? Tu n'as pas fermé la porte.

— Si, si ! répond-il vaguement.

— Tu as besoin d'aide ?

— Non, ça va aller.

J'éteins l'ordinateur en savourant le sentiment de devoir accompli.

Alors que je m'enfonce dans mon siège, le murmure de voix provenant de la boutique attire mon attention.

— Colm, Colm, Colm, soufflé-je en jetant un coup d'œil à l'horloge qui affiche 19h30. Il a encore dû ouvrir à un retardataire...

Je me questionne sur l'identité de ce visiteur en cette fin de journée. Colm semble engagé dans une conversation animée.

Je me lève et m'approche de la verrière à travers laquelle j'aperçois mon collègue, mais pas la personne avec qui il s'entretient. Mon regard interrogateur croise celui de Colm. Je décide de le rejoindre.

Il se décale et quelle n'est pas ma surprise de découvrir que c'est Andrew qui se tient devant lui. Immédiatement, je sens la chaleur me monter aux joues. Je m'attendais à tout sauf ça ! Stupéfaite, je recule d'un pas.

— Bonjour Juliette, dit-il en esquissant un charmant sourire qui me désarme.

J'essaie de maintenir la connexion visuelle, mais ce n'est pas simple. Ses grands yeux verts et rieurs me troublent à tel point que je balbutie une phrase à peine audible.

Andrew incline la tête en s'approchant.

— Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît ? demande-t-il.

Sentant ma gêne, Colm intervient.

— Aujourd'hui, Juliette a tellement bavardé avec les clients qu'à présent, elle a dû mal à articuler.

Sa boutade amuse notre interlocuteur.

— Je suis le client de trop ? nous interroge Andrew en tournant sur lui-même pour admirer les lieux.

— Non ! N'est-ce pas, Juliette ? s'exclame Colm.

Je n'ai aucune réaction. Je reste figée à ses côtés, les mains liées dans le dos. Je me contente d'observer Andrew. Son charme délicat me perturbe. Le souvenir de samedi soir, quand il a posé sa veste sur mes épaules, revient éblouir mes pensées. Je mentirais en disant que la scène n'a pas défilé en boucle dans mon esprit ces derniers jours.

Colm m'assène un discret coup de coude en répétant « N'est-ce pas, Juliette ? ».

— Non... Non, voyons, assuré-je en secouant la tête pour reprendre contenance.

Chacun de ses regards et de ses sourires réveille une timidité que je ne me connaissais pas. Je sens bien que cette fois, nos échanges sont loin d'être liés au cadre professionnel.

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