Les Terres Reculées - I - Le monolithe noir [Terminé]

Chapitre 9 - 1

La fuite avait été chaotique et l'épuisement de Oul s'était vite fait sentir. Dans les sous-bois, la sorcière s'était accroupie au-dessus de son guide. L'un comme l'autre n'avait pas fière allure. Allongé à terre Klam peinait à reprendre conscience. Les inquiétudes commençaient à poindre. Oul faisait quelques soins de base, mais avec le bras en écharpe cela lui était pénible. L'issue du combat leur avait été favorable, pourtant on lisait dans les yeux dorés de la traqueuse une tristesse et une angoisse.

La fatigue lui avait pris le peu de sérénité qu'il lui restait. Elle se grattait la tête à la recherche d'une idée. Elle ne pouvait que constater sa déroute. Elle avait dû abandonner le matériel, les plans tranquilles du citéen. Elle se retrouvait là, amoindrie, sans piste, sans destination.

Elle s'assit à côté de la tête de son camarade. Elle respira à fond et expira. Elle regarda à nouveau le visage immobile du grand brun. Elle effleura une mèche de ces cheveux sombres, il avait l'air paisible. Sa main se posa sur le front de l'absent pour vérifier s'il n'était pas fiévreux. Le doute dissipé, Oul repensa à l'action de son guide et admit qu'il avait bien combattu. Elle retira avec délicatesse sa paume. Les traits crispés, elle s'en voulait. Les pensées qui l'assaillaient peu à peu la renvoyaient à des images désagréables. Oul n'acceptait pas l'évidence, elle n'avait pas été assez forte. Elle avait dû compter sur le sens du sacrifice de cet homme. Et ça l'ennuyait profondemment.

Toutes ces années à risquer sa vie et toute son expérience comme inutiles. Même si les exigences de ne tuer personne avaient pesé, elle aurait dû s'en sortir mieux que ça. Elle se demanda si elle pouvait en vouloir à cette gamine, à cette contre-attaque ratée ? La petite têtue les avait mis dedans. Pourtant la sorcière culpabilisait toujours plus. Elle s'était jetée sur cette enfant pour en faire une apprentie. Son choix aurait dû être de rester impassible. A force de côtoyer Klam, elle perdait ses réflexes et ses habitudes d'affrontement. Elle savait faire seule. Alors que la conclusion l'amenait à renier les méthodes de son guide. L'unique pensée qui la hantait c'était celle de sa mère. Elle, elle aurait pu gagner.

Une petite tête pointa derrière les branches.

- Oul, j'ai fait du feu. Tu amènes Klam. J'ai pensé qu'avec la nuit, un peu de chaleur nous ferait du bien.

- Merci, Gamine. Tu peux m'aider avec Aklameon, je n'ai pas envie de le transporter comme un vieux sac sur l'épaule. Prends-le sous les épaules.

Elles pausaient l'homme près de l'âtre et restaient en silence à ses côtés. Après un petit temps Delili se risqua à une question face au visage fermée de la jeune femme.

- Tu penses que ça va aller ... pour Klam ?

- Parce que maintenant c'est important pour toi ? Je croyais qu'il était un humain servile.

- Non, je dis ça parce que je vois que tu es inquiète.

- Si tu n'as rien d'autre à dire, alors tu devrais te taire.

- Mais tu disais qu'il avait morflé. Tu ne fais rien de plus ? Quelques bandages, de l'eau fraiche et c'est tout.

- Tu me cherches, si je savais faire des sorts de soin je les aurais utilisés bien avant ? Comme quand tu lui avais cramé les bras. Réfléchis un peu !

- Ne t'énerve pas. Je voulais juste savoir, certaines choses m'échappent quand il s'agit de ta magie et de tes actions.

- Beaucoup de choses ont l'air de t'échapper effectivement.

- Écoutes, je sais que tu es plus forte que moi et que tu en sais plus. Ça pourrait faire partie d'un de tes plans ou d'une de tes façons de faire.