Chapitre 8 - 5

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La journée en finissait et les rayons du couchant caressait le corps épuisé de l'esprit allongé face contre terre. Une forte respiration chevrotante s'échappait de la bouche de la petite. Elle releva la tête comme bardée de crampes, elle eut un rictus de douleur. Elle se décolla du sol. Toujours au milieu du cercle de flux. Oul mangeait une pomme assise dos contre le tronc d'un arbre à quelques mètres de là. La sorcière se releva quand elle vit disparaitre la lueur bleue des yeux de l'exténuée. Elle s'accroupit devant cette dernière.

- Alors déesse-chat, on n'en peut plus ?

- T'es nulle comme professeur ? J'ai même pas réussi à faire une barrière.

- Première leçon petite ! Tout le monde est un ennemi potentiel, chaque ennemi peut mentir et la leçon n'est pas que dans la leçon.

- Donc, il n'y avait rien à apprendre ! Tu m'as juste envoyé des sorts parce que tu es mon ennemi ?

- C'est qu'une partie de la leçon ça ! L'important c'est, quel sort et comment j'ai fait. Aujourd'hui tu as eu sous les yeux, un sort de piège et un sort d'attaque. Une barrière n'est efficace que si on comprend de quoi on se protège. Donc tu as vu dans le flux tous les constituants nécessaires.

- Y avait plus simple, non ?

- Y avait qu'à pas blesser mon guide, non ? un instant de silence. Tu comprends comme ça que je ne fais pas que parler dans le vide. Et encore, je suis sympa. Allez va manger, notre citéen peu rancunier a fait la bouffe.

Delili s'installa sur d'une pierre près du feu les pupilles dans le vague. Elle n'avait plus la force de faire autre chose. Elle sentait juste la chaleur de la flamme. Une assiette tapa doucement le dos de sa main. C'était un ragout de viande aux légumes et aux champignons. L'appétit faisant, elle saisit l'assiette et agrippa la cuillère. Elle la tourna lentement au milieu de la sauce. Puis approcha péniblement la cuillère pleine à sa bouche.

Le plat était savoureux. La faim et la fatigue le rendait encore meilleur. Elle n'aimait pourtant pas trop les champignons, mais là c'était différent. Elle daigna alors regarder à sa droite.

Klam s'était assis là, sans la fixer. Il n'avait pas l'air d'attendre qu'on lui fasse la conversation. Mais après deux ou trois bouchées, la petite eut envie d'un peu de discussion.

- Je crois que je comprendrais demain ce qu'elle voulait dire.

- En même temps c'est pas simple.

- Klam, pourquoi tu cherches à être tout le temps sympa, alors que tu déteste les esprit-chats ?

- Parce que je vis un peu trop dans mes souvenirs.

- J'ai pas la force de chercher de quoi tu me parle. Si tu pouvais faire simple.

- Tu me rappelle quelqu'un et même si je crains les esprit-chats, je ne vois que cette partie humaine pour lequel j'ai de l'affection.

- Pareil pour moi, je ne vois que ta partie humaine. Et c'est cette partie que je ne supporte pas. Annonça dans un calme d'épuisement la petite.

Klam gloussa.

- En gros, tu me déteste dans toute mon entièreté.

La petite releva le cou.

- Les humains, ça ne vaut pas grand-chose. Vous êtes trop faibles. Mais au moins t'es conscient de ta faiblesse, ça te rend un peu moins méprisable.

La sorcière s'approcha d'un pas discret et entra dans la conversation.
- Tu devrais te méfier de cette impression de faiblesse. Comme Klam beaucoup ont un cerveau dont ils savent faire l'usage. J'ai croisé des tas d'êtres intelligents et dangereux, il ne faut pas se fier aux simples apparences. Mon guide est bien plus résistant qu'on ne pourrait le croire. C'est plus subtil que de la simple résistance physique.

- Je ne vois pas de quoi tu parles. Poussa l'homme brun.

- Tu vois Delili, des fois des gens ont des capacités et des traits de caractère qu'ils ne se connaissent pas. Ou dont ils ne voient ni la portée, ni la valeur.

- Et chez Klam c'est quoi cette formidable puissance ? ironisa la petite.

- Il a quelque chose, mais je ne saurais pas l'expliquer. En tout cas, cela fait partie des éléments pour lesquels il est mon guide.

La femme se servit en ragout pendant que les petites oreilles tournaient alternativement chaque interlocuteur. La demie-esprit pensa à une blague, mais personne ne se mettait à rire. Elle toisa le cuisinier, il avait l'air gêné. Et Oul arborait un air sérieux.

Delili se demanda à quels secrets la sorcière faisait allusion, mais elle s'en désintéressa. A côté du voyage qu'elle avait accompli, les aptitudes d'un humain ne l'enthousiasmaient guère.

La soirée se termina dans le silence.

Les jours qui suivirent, donnèrent l'occasion à Klam de se rétablir de ses blessures et à Delili celui d'en apprendre plus sur la magie selon la sorcière. Les cours furent assez violents. L'homme pesta, mais l'esprit ne voulait pas lâché cette opportunité. Après son périple dans le plan du flux, elle sentait son lien avec la magie s'affiner.

Quand Oul jugea l'état des mains et avant-bras de Klam satisfaisant, ils reprirent la route. Après quelques jours de marches, ils retrouvèrent la lisière des bois. Ils avaient contourné le Royaume d'Avernorne et étaient maintenant hors de portée des cavaliers qu'Aklameon redoutait. Un nouveau pays s'offrait à eux, où d'après le guide il pourrait séjourner avec l'utilisation du même stratagème qu'en Avernorne.

Les Terres Reculées - I - Le monolithe noir [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant