Les Terres Reculées - I - Le monolithe noir [Terminé]

Chapitre 7 - 3

L'homme entra, embrassa ses trois enfants puis leur demanda de jouer dans une autre pièce ou de sortir un peu pour s'entretenir avec les travailleurs d'Arkovir.

Il s'attabla et ses invités firent de même. Une douce jeune femme aux cheveux long et roux se glissa dans la bâtisse, déposa un baisé rapide sur le front de son mari, récupéra un outil et s'en retourna à l'extérieur. L'hôte servit un verre d'eau et plaça une corbeille remplie de fruits au milieu de la table.

Oul inspecta sans attendre le contenant pour y trouver un met à son goût. Après une légère déception, elle choisit une grosse pomme un peu terne et croqua allègrement dedans. Le maître des lieux se racla un peu la gorge avant de commencer.

- Mes amis, comme vous le savez nous devons agir vite et libérer cette jeune fille. Le village a une grande attente, il vous confie cette enfant et ses espoirs de jours meilleurs. Ce n'est pas une longue mission mais vous prenez des risques, tout comme ceux qui vous aiderons. Même s'il y a une somme d'argent à la clef nous vous sommes très reconnaissants. J'entrerai dans les détails juste après, mais je voulais être un peu solennel. Nous ne pouvons pas nous permettre de grandes fêtes et d'effusions de joies. Les autorités risqueraient de faire le lien, alors nous garderons la tête basse. Mais vous serez toujours dans nos cœurs et les bienvenus à Tris-et-Fand.

- Nous comprenons, la situation est périlleuse et nous ne voulons pas en rajouter davantage. Nous traversons actuellement le pays en faisant des actes de bonne foi. La nature de cette mission sera problématique.

- Pas d'inquiétude, nous validerons votre acte de bonne foi. Nous changerons juste la mission, chasse aux monstres ou protection du village, on est au bord du monde alors les problèmes ne manquent pas.

Un croc bruyant dans la pomme attira l'attention. Oul avait opté pour une position décontractée, jambes écartées, le coude gauche posé sur la cuisse, dos voutée, tête en avant, pomme dans la main droite. Elle n'aimait pas les séances de politesse et de remerciements mutuels et un léger regard de défiance accentuait le tout.

Aklameon fronça les sourcils et afficha un mécontentement sévère. La sorcière roula des yeux et s'assit droite sur sa chaise sans grandement modifier sa posture. Le guide resta ferme. Oul croqua à nouveau dans sa pomme et rompit le silence gêné.

- Quoi ? Ça n'avance pas votre histoire. Je croyais qu'on devait faire rapide et courir sauver le demi-esprit. J'ai des choses à vérifier là-bas, plus vite on y sera, mieux ça sera pour tout le monde. Railla un brin agacé la brune.

- Excusez ma collègue, c'est une personne de terrain ayant peu d'intérêt pour la chose politique et les règles protocolaires. S'exaspéra-t-il.

- Non, non, ne vous excusez pas. Votre collègue a sans doute raison, vous avez vos propres impératifs. Quant aux nôtres, ils peuvent s'abstenir des règles contractuelles et protocolaires. Alors énonçons clairement le plan de ce sauvetage. Ce soir, vous vous rendrez en compagnie de ma femme près de la maison forte de Ladanie, à quelques kilomètres d'ici. C'est là où Delili est retenue prisonnière. Le domaine de Ladanie appartient à un riche propriétaire du Royaume. Il accueille les forces de l'évêché. Mais ce n'est ni un bâtiment officiel d'Avernorne, ni un lieu de culte de l'évêché.  Cette action ne sera qu'une intrusion chez un civil et l'évêché ne pourra pas vraiment aller au-delà d'une enquête réduite. Les hommes d'armes du Comte patrouillent dans la bâtisse et deux gardes sont à la porte principale. Il y a plusieurs relèves pendant la nuit. La ronde met plusieurs minutes à reprendre son tour des couloirs. Le personnel qui travaille pour les cuisines et le service vous aidera à entrer et sortir par l'arrière du bâtiment. La petite est retenue dans une pièce sécurisée, mais les hommes du Comte sont laxistes dans leur relève et la porte n'est pas gardée en permanence. Vous profiterez de ce lapse de temps pour délivrer l'enfant. On vous donnera un double des clefs de cette pièce. Vous sortez et fuyez par la forêt, vous ne serez que tous les trois. Vous devrez rallier le village et vous arriverez par la colline. Je viendrais vous y rejoindre dès que les hommes du Comte seront passés et auront fouillé Tris-et-Fand. Nous partirons ensuite mettre Delili en lieu sûr.