Corrigé ✅
Hayden :
Son sourire est sincère après ma réponse, il n'est plus aussi mal à l'aise. Le voir chez moi me déstabilise, je n'aurais jamais cru cela possible et il a vu Lucy. Il a été surpris, j'ai vu son visage se décomposer mais il n'a fait aucune remarque, je l'en remercie d'ailleurs.
Je n'ai pas honte de ma sœur, loin de là même, mais parfois les gens réagissent bizarrement en la voyant. Ma mère a perdu pas mal de ses amis après l'accouchement, parce qu'ils ne savaient pas quoi faire et que certains se sentaient coupable d'avoir des « enfants normaux ».
Gabriel n'a pas dit un mot sur Lucy, juste sur à quel point Simon est un connard. J'aimerais bien savoir comment il a su pour ma petite sœur. Je suis sûr que Gabriel a raison, son ex l'a fait exprès. Personne au lycée ne sait pour la trisomie de Lucy, à part mes quatre meilleurs amis mais nous n'en parlons pas. Alors comment ce connard l'a su ?
- Hayden ? m'appelle doucement Gabriel.
Je reviens à lui, ses joues sont rouges, il triture ses doigts. Sa confession le gêne, elle a réveillé quelque chose en moi : l'espoir. Je donnerais tout ce que j'ai pour être le garçon en question. La façon dont il en parlé m'a donné des fourmillements de partout. Ses yeux brillaient comme je ne les avais jamais vu faire. Je ne supportais plus de l'entendre parler de cette façon de quelqu'un qui ne serait jamais moi.
- Oui ?
- Tout va bien ? Tu as l'air ailleurs, me demande-t-il.
Il est vraiment adorable. Il a toujours son éternelle sourire, il a légèrement penché la tête sur le côté, il me regarde droit dans les yeux. Je pourrais défaillir sur le champ. Je ne sais pas pourquoi je lui ai posé ses questions. J'avais besoin de savoir et sa réponse m'a quelque peu soulagé. La curiosité l'a remporté.
- Je te remercie de n'avoir fait aucun commentaire sur Lucy, j'essaye de rester neutre mais je sens ma voix trembler.
- Oh, quel genre de commentaire ? Il n'y a rien à dire.
Je jure qu'à cet instant, je me retiens de pleurer. Entre son air bienveillant, ses réponses plus que parfaite dans ces circonstances, il est mignon, beaucoup trop pour mon propre bien.
- Tu vois c'est exactement ce que je disais, tu es trop bien pour un mec comme Simon, je lui dis.
- Vraiment ?
Il croise les bras sur sa poitrine et j'ai comme une impression de déjà vu. Il est exactement comme pendant notre conversation à la fête. Je sais ce que je dois faire, ça va complètement changer le ton de la discussion mais je dois lui avouer.
- Oui. Écoute Gabriel je dois te dire quelque chose.
Encore ce regard de bébé chat à damner n'importe qui. Si je veux améliorer notre relation, je dois me montrer aimable. Je lui propose à boire et nous allons nous installer à la cuisine. Nous nous assoyons à table, je lui donne une canette de soda.
- Dis-moi, me dit-il.
- Hier j'ai eu un mot de Simon dans mon casier.
- Quoi ? s'exclame-t-il surpris.
- Oui.
- Il me faut plus d'info là Hayden.
Il rigole,faisant fondre encore un peu plus mon cœur. Il arrive à me détendre en deux minutes. Quand je l'ai vu dans mon salon tout à l'heure, j'étais vraiment tendu mais maintenant, j'ai l'impression que c'est presque normal que nous soyons tous les deux chez moi, en train de parler.
- En gros, il m'a menacé pour que je reste loin de toi, je continue.
Gabriel explose de rire mais il s'arrête vite en voyant mon air sérieux.
- Ce n'était pas une blague ? me demande-t-il.
- Non.
- J'hallucine, il se prend pour qui ?
Il se lève furieux de sa chaise et fait plusieurs pas dans ma cuisine. Il est énervé, je ne l'ai jamais vu comme ça. Ses joues sont rouges, ses lèvres pincées, il passe une main dans ses cheveux et je suis presque sûr qu'il est en train d'en arracher.
- Gabriel ? je l'appelle le plus doucement possible.
Il se tourne vers moi et ses yeux pourraient tuer. Je dois bien avouer qu'il me ferait presque peur. Gabriel ne se met jamais en colère, il sourit tout le temps.
- Le sale enfoiré, il se prend pour qui ? s'écrit-il.
- J'ai eu cette même pensée, je lui dis en souriant.
Parce que même s'il est carrément sexy quand il s'énerve, je préfère le Gabriel joyeux. J'ai presque l'impression que nous venons d'échanger nos rôles. Il finit par se calmer et retourner s'assoir sur sa chaise.
- Je suis désolé, commence-t-il.
- Tu n'as pas à être désolé, je l'interrompt.
- C'est pour cette raison qu'il a dit ça tout à l'heure, pour te blesser, sa voix est un murmure mais j'ai très bien entendu.
- Je ne supporte pas que l'on parle de cette façon des personnes handicapés. Ils n'ont pas choisis ce qu'ils leurs arrivent, Lucy est née comme ça.
Il hoche la tête et j'ai la sensation qu'il mange mes paroles, il m'écoute attentivement. Nous continuons de parler et je me sens bien, apaisé. J'en apprends plus sur lui, comme le fait qu'il prend des cours de dessin et qu'il adore l'art. La façon dont il en parle, je sens que c'est une vrai passion pour lui. Il me confie qu'à l'université il penche pour un cursus l'art. Je lui parle également de mes projets pour l'année prochaine.
- Promets-moi de ne pas te moquer, me demande-t-il.
- Promis, je lève la main droite.
- Je fais de la gym depuis que j'ai six ans, avoue-t-il.
- Pourquoi je me moquerais ?
- La peu de gens qui le savent me font des réflexions du style « c'est vraiment un sport de gay » ou « je comprends mieux pourquoi tu es gay »
- Stéréotype à la con. Je fais bien de la boxe et c'est un sport considéré comme « masculin ».
Il s'étrangle avec sa boisson et me regarde incrédule. Il m'a confié des choses personnelles, je devais faire de même. Je ne vais pas me mentir, j'ai toujours cette pointe d'espoir que je sois le garçon dont il me parlait plus tôt.
- Tu es... heu...
- Gay ? Oui, je lâche.
- Oh putain de merde ! s'exclame-t-il. Enfin je veux dire, je ne m'y attendais pas, souffle-t-il choqué.
- Ce n'est pas écrit sur mon front. C'est pour ça que je n'aime pas les stéréotypes.
Ses lèvres s'étirent en un sourire rayonnant, je ne pensais pas que cette révélation lui ferait autant plaisir. Je suis ravi de mon effet de surprise, maintenant les choses sont dîtes.
- Je peux te poser une question un peu personnelle ? me demande-t-il et je le sens hésiter.
- Oui.
- Heu... Tu es sorti avec Aryn ?
C'est à mon tour de m'étrangler avec mon soda. Je tousse plusieurs fois pour me calmer, Gabriel me regarde inquiet. Sa question me surprenant beaucoup, Aryn ? Certes nous sommes amis mais nous n'avons jamais été proche au point que l'on puisse avoir des doutes sur le type de notre relation.
- Pardon ? j'exclame pour être sûr d'avoir bien entendu.
- Excuse-moi c'était stupide et hyper personnel comme question, désolé. Je ne sais pas ce qui m'a pris de te demander une chose pareille.
- Non, je ne suis jamais sorti avec Aryn, c'est juste un ami.
- Oh.
Il semble soulagé ou alors c'est mon imagination qui me joue des tours. Il a encore ce tique nerveux de triturer ces doigts. J'ai remarqué qu'il le fait quand il est gêné. Je décide de détendre l'atmosphère et lui montrer que sa question n'était pas déplacée.
- Je pense qu'il se passe quelque chose entre Logan et Aryn, je lui dis.
- Ah bon pourquoi ?
- Ils ont toujours été très proche mais depuis la rentrée je trouve que c'est encore plus flagrant. Ils prennent toujours la défense l'un de l'autre. Ils sont constamment ensemble. Je ne sais pas, je me fait peut-être des films, je mène mon enquête pour le moment.
- Effectivement, je peux t'aider si tu veux, j'adore ce genre d'histoire ! s'exclame-t-il enthousiasme.
Gabriel est ce genre de personne, qui se réjoui de petite chose. J'avais déjà eu l'occasion d'observer ce trait de caractère chez lui. Plus je parle avec lui, plus il m'épate, il possède tous les aspects que je recherche chez une personne. Malgré ce qu'il a traversé au collège, il n'a pas changé, il n'a pas perdu son visage heureux, il a toujours cette joie de vivre. Pourtant la vie n'a pas été très clémente avec lui. Cet homme mérite tout le bonheur possible et j'ai envie d'être celui qui lui apportera.
- Hayden, je vais devoir partir, annonce Agathe sur le pas de la porte de la cuisine.
- Je n'avais pas vu l'heure, bonne soirée Agathe, je la salue.
Elle me fait un signe de la main et quelque temps après nous entendons la porte d'entrée claquer. Pour ne pas laisser Lucy toute seule au salon, nous la rejoignons. Nous prenons place sur le canapé, alors que ma petite sœur est assise par terre en train de dessiner. Gabriel n'a pas parlé de partir et ce n'est pas moi qui vais lui dire.
- Lucy adore dessiner aussi, je lui dis, ce qui le fait rire.
- Et elle a du talent, me répond-t-il en regardant le dessin de ma sœur.
- Je trouve aussi mais comme c'est ma petite sœur, je ne pense pas être très objectif.
Il rigole et j'aime le fait que ce soit grâce à moi. Je veux tout savoir de lui et bizarrement je me surprends à souhaiter que lui aussi découvre tout de moi. Je suis prêts à laisser tomber mon masque de mec intouchable pour qu'il puisse voir le vrai Hayden Spence. Il a déjà appris mon plus gros secret, enfin Lucy n'est pas un secret mais je ne le cri pas à tout le monde.
- Quel genre de dessin fais-tu ? je lui demande curieux.
- Si tu veux je peux te les montrer. Enfin si ça t'intéresse, je ne veux pas que tu te sentes obligé. Pour tout te dire je n'ai jamais montré mes croquis à d'autre personne mais je veux bien faire une exception pour toi.
Je ne peux pas contrôler mon rire moqueur. C'est partit pour un autre discours de Gabriel. Joueur, il me donne une tape sur l'épaule.
- Ne te moque pas de moi, souffle-t-il en croisant ses bras sur sa poitrine en gonflant les joues comme un enfant.
- Pardon Gabriel, je suis flatté que tu fasses une exception pour moi.
Il rougit légèrement et il a bien du mal à cacher son sourire qui apparait. J'écrase mon doigt dans sa joue en rigolant, ce qui le fait rougir encore plus. Il est vraiment adorable. Je n'ai aucune idée de la façon dont nous nous sommes retrouvé là, à se taquiner tous les deux mais j'adore ça et je ne compte pas arrêter.
- Tu boude Gabriel ?
Il m'envoie un regard plein de malice et joueur. Il est près de moi, je pourrais presque sentir son souffle sur mon visage. La distance entre nos lèvres serait si vite franchie mais je me retiens, je ne veux pas le brusquer. Je recule un peu ma tête pour ne pas me laisser tenter.
- Pour un garçon aussi intelligent que toi... je ris sans finir ma phrase.
Il me tire la langue et je reste stupéfait face à un geste aussi puérile. Il rigole de ma réaction, je ne le savais pas aussi joueur.
- Tu verrais ta tête, se moque-t-il.
- Je ne m'attendais pas à une telle chose de ta part.
- Ce n'est pas toi qui me parlais de stéréotype tout à l'heure ?
- Touché.
Je pourrais rester là des heures, assis sur mon canapé à rigoler avec lui, je m'y habituerai trop vite. Sa présence me canalise, à ses côtés je me sens libre d'être moi-même et ça me fait peur parce que je sais que plus je passe du temps avec lui et plus je tombe amoureux. Si notre relation n'évolue pas dans le sens que je voudrais, je vais souffrir et cela ne sera rien de comparable avec les quatre années qui viennent de s'écouler.
- Donc pour ma proposition de tout à l'heure qu'est-ce que tu en pense ? re-tente-t-il.
Quand il m'a demandé de faire les trajets ensemble je suis passé par plusieurs émotions : la surprise dans un premier temps, l'excitation ensuite et pour finir la réalité. J'ai décliné pour une raison évidente, j'avais peur de sa réaction en apprenant pour Lucy mais il m'a montré que ce n'était pas important pour lui.
- Je ne sais pas Gabriel, je ne veux pas te forcer à faire un détour pour déposer Lucy...
- Hayden, si je te l'ai proposé c'est que ça ne me dérange absolument pas, me coupe-t-il.
Je dois me calmer sinon il va entendre mon cœur battre. J'hésite et si au bout d'un moment il en avait marre de faire les trajets, je serais déçu mais en même temps je pourrais en profiter, le temps que ça dure.
- Très bien mais avant je dois en parler avec ma mère, je finis par capituler.
- Génial !
- Ton ex risque de ne pas être très ravis de nous voir arriver tous les deux ensemble, je lui dis en rigolant pour ne pas qu'il s'énerve à nouveau.
- On s'en fou de lui !
- Tant mieux, par contre je ne...
J'arrête de parler en entendant la porte d'entrée s'ouvrir et se refermer. Gabriel aussi sursaute et me regarde apeuré. Ma mère arrive dans le salon, elle rentre tôt aujourd'hui, je n'avais pas prévu ça.
- Bonjour, salue-t-elle tout sourire.
- Bonjour, répond Gabriel en se levant.
Elle me lance un regard complice et je lève les yeux au ciel. Lucy court dans les bras de maman, me sauvant d'un moment gênant. Ma mère porte ma sœur en souriant à Gabriel.
- Tu restes manger avec nous Gabriel ? lui propose-t-elle gentiment.
J'aime ma mère, elle lui demande la chose que je n'osais pas faire. Gabriel semble hésiter, il se tourne légèrement vers moi, je lui souris pour lui montrer que ça ne dérange absolument pas.
- Je ne veux pas vous embêter, dit-il.
- Tu ne nous dérange absolument pas, je t'assure. Ça nous ferais très plaisir que tu restes, à moins que ta mère soit chez vous ?
- Non ma mère travaille ce soir.
- Raison de plus d'accepter alors.
- D'accord.
Je pourrais sauter de joie ! Je ne voulais pas du tout le voir partir. Avant de sortir avec Lucy, maman me fait un clin d'œil et je prie pour que Gabriel ne l'ai pas remarqué. Cette soirée s'annonce vraiment bien.
MlleLovegood